La narratrice, née dans les années 1970, a passé son enfance auprès d'une mère envahissante, amère et négative. À l'adolescence, l'univers mental de la jeune fille sage et effacée se dérègle. Elle devient obèse, se réfugie dans la lecture, engage une correspondance avec un écrivain qu'elle finit par rencontrer. Brève rencontre : déçu, l'écrivain ne perçoit pas l'être humain caché sous l'épaisseur de la graisse.
Elle prend alors une décision qui aura de grandes conséquences : elle va devenir Genica, une jeune fille svelte et différente, débarrassée de ses complexes, inattaquable. Une nouvelle vie commence, mais jusqu'à quand ?
L'univers d'Amina Danton est très étrange et prenant. Le roman développe un charme glacial pour nous faire partager la solitude de la narratrice, sa mise à l'écart volontaire. La détresse ne s'y exprime jamais par la plainte mais par une distanciation ironique, qui laisse percer un fort désir de vivre. Comme la Nadja d'André Breton, la narratrice est toujours " là où on ne l'attend pas " : personne en effet ne l'attend, sinon elle-même, ce double rêvé et patiemment construit dans la solitude.
Elle se sentait de plus en plus légère depuis qu'elle le connaissait, et plus forte. Elle retrouvait des contours. Quand ils allaient dîner au restaurant, elle se pendait à son bras, elle le respirait, le cri des mouettes et celui des corbeaux se mélangeaient sur les quais de la Seine où les façades de l'île Saint-Louis ressemblaient aux falaises de Normandie, blanches, poreuses et crayeuses, accrochant la lumière.
Le ciel était lavé par la pluie. Roland accompagnait le mouvement, très doucement. Il l'encourageait à trouver sa voie. Quand Mme Damian est sauvagement assassinée dans une villa voisine de la sienne, Aurore est obligée de sortir de la solitude qu'elle s'était choisie et qu'elle avait rendue presque parfaite. Retirée au bord de la mer, où elle se consacre à la peinture, elle vit un grand amour, qu'elle continue de porter en elle et de protéger.
Une hésitation au téléphone dans la voix de son mari, le souvenir d'une après-midi vieille de quinze ans chez Maud Nancy, les visites insistantes de sa voisine Irène B. viennent déranger le bel édifice de son intimité avec l'espace et l'infini.