Suivi de Saisons et passions de Roger Vailland
Nouvelle édition en 2017
René, professeur d'histoire mélancolique qui sent la vieillesse approcher, revient à Paris après un colloque sur Napoléon à New York. Il y retrouve Marianne, son assistante, jeune femme pleine de vie avec qui il partage sa passion pour l'Empereur et pour les écrivains qui l'ont raconté. Stendhal, Chateaubriand, Bloy, Zweig, Dumas ou Burgess, tous alimentent la fascination de Marianne et l'antipathie de René pour cette «star de l'Histoire», alibi parfait des deux personnages pour ne pas nommer l'amour qui naît entre eux, au fil de leurs discussions jusqu'à l'aube. Un amour à Waterloo est suivi de six autres nouvelles, où François Bott fait rimer amour et littérature.
«Il a traversé le siècle avec son éternel mégot, et son fantôme déambule encore dans Paris, faisant l'éloge des passions de jeunesse ou le procès (narquois) des empêcheurs de vivre. Avec une antipathie particulière pour les amiraux, et beaucoup d'affection à l'égard des plombiers-zingueurs...» Ces deux phrases, merveilleuses de précision et de concision, ressuscitent Prévert. Il en va de même pour la quarantaine d'écrivains réunis dans ce recueil de portraits et de chroniques : les voici croqués sur le vif, de Marcel Aymé à Léon Werth, en passant par Raymond Chandler, Joseph Kessel ou Boris Vian. Entrer dans leur intimité, les découvrir «en robe de chambre», ne retire rien à leur oeuvre : comme l'écrit François Bott dans son avant-propos, «sous l'influence de leurs écrits, la vie des auteurs revêt, en effet, les apparences et les couleurs d'une mythologie».
De Montaigne, qu'il décrit comme «notre cousin de province le plus aimable», à Montesquieu, dont il rappelle qu'il eut l'idée d'une étude sur le goût en prenant de la liqueur de cerise chez Mme du Deffand, François Bott arpente, en promeneur éclairé, trois siècles d'histoire littéraire, entre le crépuscule du Moyen Âge et l'éclat des Lumières. C'est avec la même allégresse qu'il dépeint les «seconds rôles», parmi lesquels Bussy-Rabutin, cousin de la marquise de Sévigné, auteur impertinent d'une Histoire amoureuse des Gaules, «trop dissipé dans un siècle tellement tenu».
«Maman nous a faussé compagnie. Elle avait quatre fils. Nous l'appelions Gina... Il faisait beau. C'était impardonnable, et nous réprouvions le contraste entre les états d'âme et la météo. Ma mère ne voulait déranger personne. Peut-être considérait-elle comme une indiscrétion de souffrir et de mourir sous le regard des autres. Elle a tout laissé en ordre avant de partir, sauf nos sentiments.»
Au Vésinet, dans les jardins où elle déjeune chaque jour en solitaire, une jeune bibliothécaire fait la rencontre d'un vieil homme. Après sa mort, elle apprend dans le journal qu'il s'appelait Émile-Auguste Chartier, dit Alain. À Argenteuil, un professeur de français instaure des parties de poker en classe pour mieux parler de Rimbaud. À Bois-Colombes, une postière s'écrit des lettres à elle-même et se raconte son propre chagrin d'amour. Dans chacun de ces dix-huit récits, François Bott redonne un peu de couleur au gris de l'hiver, des années, de la mélancolie francilienne.