Dans une maison de la banlieue londonienne, Violet Hook élève seule ses sept enfants, qui ont entre treize et quatre ans. Un monde clos, qui fonctionne parfaitement. Même lorsque Violet meurt et que les enfants dissimulent sa disparition : une tombe dans le jardin, une cabane - le tabernacle - où ils transportent les objets personnels de leur mère, où ils se réunissent pour prier...
Maundy est un Londonien d'une quarantaine d'années. Banquier circonspect, fiancé à une charmante fille, son existence se poursuit sans heurt jusqu'à la disparition mystérieuse d'une paire de chaussettes. S'agit-il d'un vol, d'un oubli ou d'un dérèglement mental ? C'est la première faille dans l'agencement de la vie de Maundy. Les épisodes suivants confirment la folie croissante où s'enfonce le héros...
"- Bonjour chéri, dit Deb d'un ton joyeux. Tu as passé une bonne journée ? - Couci-couça. Comment va Bobo oeQuand elle entra dans la cuisine, Greg vidait le sac du supermarché - un paquet de couches, une boîte de lait en poudre, deux bouteilles d'eau..." Cette scène se passe à Édimbourg, dans un appartement où règne un certain laisser-aller. Deb n'a pas le temps pour tout. Une femme de ménage s'impose : petite, sèche, Mrs Keats a un visage d'Écossaise, décharné et qui ne laisse rien deviner de ses sentiments. De plus, elle est sourde-muette, ce qui ne l'empêche nullement d'accomplir sa tâche tandis que Deb, interminablement, lui parle.Au centre de ce roman, il y a le silence ; pesant, mais nécessaire pour taire l'impensable. Autour du silence, des personnages qui, tels des pantins, jouent la comédie de la vie. Banalité et folie se côtoient dans un minimalisme que l'auteur pratique avec talent, parce que l'extrême douleur se dit avec des mots de tous les jours.
Vivian Winter, avocat londonien, jeune, riche, séduisant, est retrouvé mort dans sa cuisine, transpercé de seize coups de couteau. Sa mère, lady Winter, charge son meilleur ami de mener une enquête parallèle à celle de la police. En se fondant sur les indices de deux documents, le testament du défunt et la liste des meurtriers qu'il a défendus au cours des dernières années et qui ont pour point commun d'avoir assailli sexuellement et tué des femmes enceintes, le narrateur se lance dans une série d'investigations de plus en plus déconcertantes. Il est sur le point de renoncer à sa mission - dont lady Winter a d'ailleurs voulu le décharger très tôt - mais s'obstine, poussé par les doutes et les réticences des enquêteurs officiels. Sa théorie, tantôt étayée et tantôt ébranlée par le psychiatre qui a eu à connaître de plusieurs de ces cas, le conduit à rencontrer les proches de ces meurtriers ou de leurs victimes, et le lecteur se voit offrir un champ très vaste où risquer ses propres conclusions. L'énigme se résoudra au prix de deux morts supplémentaires, mais nous n'en sommes déjà plus à les compter. Il ne faudrait pas insister beaucoup auprès de l'auteur pour lui faire admettre qu'il partage nombre des curiosités, des raisonnements et des réactions du narrateur. Presque tous les ouvrages de Julian Gloag offrent une trame d'enquête policière, même ceux où l'analyse psychologique domine de beaucoup la recherche d'une solution satisfaisante aux yeux de la justice. C'est toujours un plaisir pour le lecteur quand le mystère de l'intrigue sert de support à une oeuvre littérairement riche et accomplie. Le cas n'est pas si courant.
Rupert Darley a résolu d'une façon draconienne la crise à la fois familiale et professionnelle qui couvait depuis un certain temps déjà : il a quitté sa seconde femme et démissionné de son poste d'enseignant. Ces deux ruptures l'ont en quelque sorte libéré. Cependant, il redoute la réaction de ses parents à qui il vient annoncer la nouvelle : lui, Oliver, architecte renommé, un vieux monsieur bougon, amateur de whisky et de bon vin ; elle, May, jadis pleine d'allant, qui a gardé, malgré l'âge et la maladie, l'esprit vif et la repartie facile. Arrive Miranda, la fille de Rupert - une jeune étudiante en médecine -, qu'il ne s'était pas préparé à rencontrer et qui lui donne involontairement, parce que ses grands-parents l'avaient invitée, l'impression d'être un intrus dans la maison familiale. Des relations complexes s'établissent alors entre ces quatre personnages, différents par l'âge et le caractère, et pourtant proches les uns des autres, souvent complices. On devine que l'auteur éprouve pour eux non seulement de la sympathie, mais aussi de l'affection. Le ton du roman tranche sur la rigueur de sa construction par une tendresse, une émotion parfois pathétiques, que tempèrent toujours une ironie discrète et un humour parfois truculent.
C'est par compassion qu'Aaron est devenu «écoutant» à Secours-Amitié ; il y réconforte de pauvres êtres qui ont perdu foi en la vie - les «appelants». Par ailleurs, avec une patience et un amour infinis, il prend soin de sa femme Kay, aveugle, atteinte de sclérose en plaques, tout en tenant une librairie et en répertoriant l'immense bibliothèque de la richissime Matilda, étrange et ténébreuse héroïne du roman.Et c'est par excès de compassion que cet homme de bonne volonté, le plus logiquement du monde, va devenir un criminel... Les conversations téléphoniques d'Aaron sont prétexte pour l'auteur à dresser une étonnante galerie de portraits, à la fois excentriques et pathétiques, dans la plus pure tradition anglaise. L'évocation saisissante des lieux - la petite ville proche de la falaise qui surplombe la mer enveloppée de brume, les recoins de la librairie où rôde constamment le chat, le château où règne la femme fatale, avec ses chambres remplies de mystère - dessine un monde flottant et spectral qui témoigne de l'imagination foisonnante de Julian Gloag. L'auteur et le lecteur pénètrent ensemble, étonnés, terrifiés, amusés, dans l'intimité d'âmes tourmentées et dans les abîmes de la bonté.
"Puis un matin, sans raison aucune, il s'était réveillé les idées claires, sain d'esprit, et il avait compris que tout était fini. Il ne retrouverait jamais son roman. Arlette et lui avaient fait leurs bagages et, l'après-midi du même jour, ils avaient repris le train pour Croze." Le jour de 1946 où Paul Molphey, monté à Paris, perd son manuscrit à la suite d'un stupide échange de valises à la gare, son existence bascule. Anéanti, il oublie son roman et s'enterre en province, abandonné par sa femme et ses deux filles. Il mène une existence de plus en plus solitaire, comme si le fait d'avoir raté la première marche le condamnait à trébucher sur toutes les autres.
Jusqu'à ce que son oeuvre, soudain, réapparaisse. Peut-il encore réparer sa vie ?