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L'argument du rêve est un ensemble de poèmes documentaires ou poèmes-essais qui, en trois temps, posent la question du corps. Entre l'intime et le politique, le corps biologique et le corps social, les poèmes témoignent de la manière dont les idéologies nous conditionnent et dont les corps sont possédés par des mots d'ordre.
A chaque fois, les images proposent au lecteur un voyage temporel et une confrontation avec les faits qui font voix. Il s'agit de susciter une participation active de celui qui lit en soulevant des questions, attendu que la véritable question de ce volume, dont l'ambition est aussi didactique, peut être formulée ainsi : comment regardons-nous les victimes ? Et, à son revers, depuis les traces : comment nous regardent-elles ? Les kamikazes d'Okinawa, les naturistes d'Orplid, les migrants comme les ermites du Dodécanèse sont des documents humains. Les uns pris dans la Guerre du Pacifique et l'idéologie militaire, les autres dans une idéologie du retour à la nature, dont l'utopie a suscité bien des opportunismes et les derniers dans une catastrophe, dont la vision oscille ici entre mythe religieux et réalité migratoire du troisième millénaire.
Chaque poème est conté par une voix soeur, transportée par le rêve jusqu'aux évènements et jusqu'à nous, en collectant des éclats de mots et d'images. Ce sont des fantômes de l'étonnement, bienveillantes présences qui encouragent à cheminer entre les corps pulvérisés : la poétesse japonaise Sei Shônagon, la poétesse allemande Annette von Droste-Hülsshof, les poètes Robert Lax et Loránd Gáspár, qui prêtent également leurs photographies, le dernier volet du recueil débouchant sur le contemporain.
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Georges Bataille converse sur l'amour et la jouissance avec Timothy Leary et Edith Piaf, Rosa Luxemburg avec Nelson Mandela, Victor Hugo avec Nina Simone, Maya Deren avec Mahatma Ghandi. L'atmosphère libre et fantastique de ce livre, composé de dialogues des morts et de récits de rêves, est celle des contes, dont le gai savoir se transmet de bouche à oreille. Dans les paroles que s'échangent les défunts comme dans les proses de la nuit, les traits sont brefs et clairs, les chutes parfois absurdes dans leur morale, cruelles aussi, souvent tendres. Les récits de rêves traduisent par la fable des sensations, des lectures et des expériences : rêve de la maison de poussière, rêve du chien de Goya, rêve de la vipère noire, rêve de Robert Walser, rêve de Franz Kafka. L'appropriation joue avec le dilemme qui s'installe entre rêvé de et rêvé par, invitant le lecteur à s'inclure dans cette situation onirique, au fil d'anecdotes révélatrices et d'historiettes.
Cela étant, le livre propose de jouir pleinement de notre faculté d'imaginer et de raconter face à ce qui nous inquiète: l'amour et le genre, les relations sociales et les émotions, la mort et notre place dans l'univers, la folie et la logique du progrès, la vérité du langage et le chaos du monde.