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Nathalie Sarraute
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Ce livre est écrit sous la forme d'un dialogue entre Nathalie Sarraute et son double qui, par ses mises en garde, ses scrupules, ses interrogations, son insistance, l'aide à faire surgir «quelques moments, quelques mouvements encore intacts, assez forts pour se dégager de cette couche protectrice qui les conserve, de ces épaisseurs ouatées qui se défont et disparaissent avec l'enfance». Enfance passée entre Paris, Ivanovo, en Russie, la Suisse, Pétersbourg et de nouveau Paris. Un livre où se dessine l'oeuvre à venir, d'une sonorité unique à notre époque.
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«C'est bien, ça.» Telle est la phrase banale que deux amis vont disséquer, tordre et interpréter, jusqu'à la rupture. Si la dispute est un thème récurrent au théâtre, elle provoque sous la plume de Nathalie Sarraute un malaise irrésistible. Drame du soupçon par excellence, Pour un oui ou pour un non pose une question simple : qui, du langage ou du silence, creuse le vide le plus menaçant ? A retenir : Repères chronologiques ; Nathalie Sarraute et son temps ; Résumé de la pièce ; Les thèmes clés de Pour un oui ou pour un non Dossier sur l'oeuvre et sur le parcours associé, «La dispute au théâtre» : - Pourquoi lire Pour un oui ou pour un non aujourd'hui ? - Histoire littéraire et présentation de Pour un oui ou pour un non - Les mots importants de la pièce - Deux groupements de textes - Prolongements artistiques - Exercices d'appropriation - Points de méthode De nombreux exercices rédigés et guidées pour préparer l'écrit (le commentaire, la contraction de texte, l'essai, la dissertation) et l'oral du Bac (les analyses linéaires et la grammaire).
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Les tropismes, a expliqué l'auteur, " ce sont des mouvements indéfinissables, qui glissent très rapidement aux limites de notre conscience ; ils sont à l'origine de nos gestes, de nos paroles, des sentiments que nous manifestons, que nous croyons éprouver et qu'il est possible de définir. " Vingt-quatre petits tableaux d'oscillations intérieures presque imperceptibles à travers clichés, lieux communs et banalités quotidiennes : vingt-quatre petits récits serrés, où il n'y a plus de trame alibi, plus de noms propres, plus de " personnages ", mais seulement des " elle " et " il ", des " ils " et " elles ", qui échangent leur détresse ou leur vide au long de conversations innocemment cruelles ou savamment féroces. (...) Textes très courts où une conscience jamais nommée, simple référence impersonnelle, s'ouvre ou se rétracte à l'occasion d'une excitation extérieure, recevant la coloration qui permet de l'entrevoir.
Gaëtan Picon.
Mon premier livre contenait en germe tout ce que, dans mes ouvrages suivants, je n'ai cessé de développer. Les tropismes ont continué d'être la substance vivante de tous mes livres.
Nathalie Sarraute, préface à L'Ère du soupçon, Gallimard, 1964.
Initialement publié par Denoël en 1939, le premier livre de Nathalie Sarraute (1900-1999) est paru aux Éditions de Minuit en 1957, dans une nouvelle version où l'auteur avait retranché un chapitre pour en ajouter six nouveaux. -
Six personnages ne peuvent poursuivre un dialogue normal à cause du silence d'un septième. L'existence de vide au coeur de l'échange traditionnel fait naître une spirale infernale où chacun est entraîné jusqu'à la destruction de toute vérité, de tout langage. Mais cette cantate à six voix en contient pourtant une septième, celle de l'humour.
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Cette oeuvre de Nathalie Sarraute ne comporte ni personnage ni intrigue. Son héros est un roman, Les Fruits d'Or, et elle a pour sujet les réactions que ce roman et l'accueil qu'il reçoit provoquent chez ceux qui l'aiment ou le rejettent.Il ne s'agit pas de peindre la réalité visible et connue. Les péripéties balzaciennes qui entourent le lancement d'un livre ne sont pas le domaine de Nathalie Sarraute. Il n'est ici question ni d'éditeurs, ni de publicité, ni des jeux des prix littéraires. L'auteur des Fruits d'Or est également absent. Seules sont montrées ces actions dramatiques invisibles et cependant très précises, qui constituent cette substance romanesque dont, depuis ses Tropismes parus en 1939, Nathalie Sarraute n'a jamais cessé d'étendre le champ et qui a déterminé toutes ses recherches techniques.En recréant ces mouvements dans le domaine du contact direct ou indirect avec l'oeuvre d'art, en les amplifiant parfois jusqu'à la satire, c'est à certains aspects essentiels du phénomène esthétique que touche ce roman.Ne faut-il pas dire aussi ce poème, tant dans cette forme romanesque nouvelle se confondent les limites qui séparent traditionnellement la poésie du roman.
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Pour un oui ou pour un non ; 1re ; Bac français
Nathalie Sarraute
- Nathan
- Une Oeuvre, Un Parcours
- 4 Juillet 2024
- 9782095032227
Des analyses claires, concises et accessibles destinées aux élèves pour leur fournir l'essentiel sur l'oeuvre et le parcours associé pour le Bac de français 1re.
Pour un oui ou pour un non... à la loupe.
Sous forme de fiches en couleurs, ils proposent :
- Repères sur l'auteur et le contexte historique de l'oeuvre
- Résumés de textes et des repères dans l'oeuvre
- Thèmes expliqués et commentaires linéaires
- Le parcours associé explicité
- Astuces pour comprendre et réviser vite et efficacement
- Exemples de dissertations corrigées et expliquées pas à pas
- Explications de texte complémentaires et guide pour l'entretien à l'oral
- Citations incontournables à retenir et quiz de révision -
«Voici les Guimier. Un couple charmant. Gisèle est assise auprès d'Alain. Son petit nez rose est ravissant. Ses jolis yeux couleur de pervenche brillent. Alain a un bras passé autour de ses épaules. Ses traits fins expriment la droiture, la bonté. Tante Berthe est assise près d'eux. Son visage, qui a dû être beau autrefois, ses yeux jaunis par le temps sont tournés vers Alain. Elle lui sourit. Sa petite main ridée repose sur le bras d'Alain d'un air de confiance tendre.Mais on éprouve en les voyant comme une gêne, un malaise.Qu'est-ce qu'ils ont ? On a envie de les examiner de plus près, d'étendre la main... Mais attention, un cordon les entoure. Tant pis, il faut voir. Il faut essayer de toucher... Oui, c'est bien cela, il fallait s'en douter. Ce sont des effigies. Ce ne sont pas les vrais Guimier.»
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Ces «essais sur le roman» constituent la première manifestation théorique de l'école du «nouveau roman». Nathalie Sarraute y expose ses propres conceptions qui ont exercé une influence profonde sur les jeunes auteurs. De Dostoïevski à Kafka, de Joyce à Proust et Virginia Woolf, Nathalie Sarraute scrute l'oeuvre des grands précurseurs du roman moderne et examine leur contribution à la révolution romanesque de nos jours.
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Une réalité inconnue : essais et entretiens, 1956-1986
Nathalie Sarraute
- Gallimard
- Blanche
- 23 Novembre 2023
- 9782072909092
Les oeuvres littéraires de Nathalie Sarraute se sont toujours accompagnées d'écrits qui, sous forme d'essais, d'articles, de conférences et d'entretiens publiés dans la presse en France et à l'étranger, livrent un portrait à multiples facettes de l'auteure et de ses divers engagements, littéraires et autres. À une époque où le roman, ses formes et son avenir jouissaient d'un prestige maintenant perdu, Nathalie Sarraute refuse le langage des théories d'avant-garde pour raconter sa propre expérience d'écrivaine innovatrice à l'intention des lecteurs qu'elle souhaitait pour son oeuvre. Au hasard des rencontres et des sollicitations, elle commente aussi des questions d'ordre social, culturel et parfois politique du moment, qui vont bien au-delà du giron du nouveau roman auquel elle a été souvent associée. Ce volume réunit une quarantaine de textes rédigés entre 1956 et 1986, non parus en recueil pour la plupart, ainsi que plusieurs inédits à travers lesquels une grande voix ressuscitée se fait de nouveau entendre.
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Oeuvres complètes
Nathalie Sarraute
- Gallimard
- Bibliotheque De La Pleiade
- 15 Novembre 1996
- 9782070114344
Ce que manifestent les oeuvres complètes de Nathalie Sarraute - qui, outre l'ensemble des récits, réunissent le théâtre, les essais critiques et des conférences et articles inédits en volume - c'est d'abord l'étendue considérable de l'oeuvre accomplie par cette pionnière solitaire, indépendante de tout mouvement littéraire, fût-ce celui du Nouveau Roman, auquel on l'a souvent assimilée. C'est aussi la cohérence, la richesse et la capacité d'innovation remarquables d'un corpus tissé de liens et d'échos.
Nombre d'écrivains se veulent novateurs, mais celui qui, sournoisement, s'oppose aux réformes et revient au monde ancien, ce réactionnaire, c'est le lecteur. L'oeuvre de Nathalie Sarraute, novatrice ô combien, aura fait beaucoup pour qu'il évolue. Attaché aux «types» littéraires, le lecteur, «tel le chien de Pavlov, à qui le tintement d'une clochette fait sécréter de la salive, sur le plus faible indice», «fabrique des personnages». C'est pourquoi Nathalie Sarraute s'est attachée à libérer «l'élément psychologique» de son support individuel, à empêcher son partenaire de s'attacher à des héros en le privant des indices qui lui permettent de «fabriquer des trompe-l'oeil». Aussi le langage parlé et le langage pensé - l'«usage de la parole» - sont-ils peu à peu devenus le sujet de ses récits.
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«- Quelque chose apparaît... - Oui, qu'est-ce que c'est ? - Pour le moment ce n'est qu'une main. L'homme à qui elle appartient, on ne le voit pas, il reste dans l'ombre... Sa main seule est là en pleine lumière devant nous... une longue main un peu noueuse aux ongles coupés ras... - Et maintenant aussi dans ce visage à peine visible, pas même des yeux... juste le regard... - Il regarde intensément sa main posée sur la table. - Et dans son regard tant d'amour... C'est ainsi chez ceux qui s'aiment... leur amour va d'abord à tout ce qu'ils peuvent apercevoir d'eux-mêmes... leurs mains, leurs pieds, leurs avant-bras... et puis dans la glace leur reflet...» Nathalie Sarraute.
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Martereau constitue une étape de cette recherche d'une substance et d'une forme romanesque nouvelles que Nathalie Sarraute n'a cessé de poursuivre à travers tous ses livres.
Martereau a été écrit sur deux plans. D'une part, des mouvements intérieurs ou tropismes ;
D'autre part, l'apparence, le lieu commun. Un narrateur, particulièrement sensible à ces tropismes, les découvre en lui-même et chez ceux qui l'entourent quand surgit l'apparence :
Martereau, un vrai « personnage », qui a un nom, des contours nets et précis. Il paraît constitué par une substance qui lui est propre, une substance compacte et stable qui lui donne un « caractère ». Sa simplicité, sa pureté émerveillent le narrateur et éveillent sa nostalgie.
Mais le fait le plus banal - l'achat d'une propriété - provoque un conflit qui oppose Martereau aux autres et le rapproche d'eux. Et, dès lors, une faille se produit dans ce personnage fait d'un seul bloc. Les soupçon s'y introduit. Martereau est-il bien tel qu'il apparaît ? Quelque chose, en lui aussi, se met à bouger, des mouvements pareils à ceux des autres se révèlent en lui aussi et se développent. Un moment la conduite de Martereau apaise les soupçons. Mais le mal est fait - ou peut-être est-ce un bien ? - Martereau, à son tour, s'est désintégré.
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Dans cet ouvrage, Nathalie Sarraute a repris, en la développant, la forme poétique de ses premiers textes brefs, Tropismes. Chacun de ces textes a été suscité par certaines paroles qui lui ont paru particulièrement riches en potentialités insoupçonnées. Insoupçonnées, soit parce que l'impact de ces paroles reste méconnu, soit parce qu'il est enseveli sous un amoncellement de représentations convenues, comme lorsqu'elles touchent aux thèmes éternels de l'amour et de la mort. Dans l'un et l'autre cas, le lecteur assiste ou, mieux, est appelé à prendre part aux diverses actions dramatiques qui sont ici mises au jour et se déploient. C'est un assez extraordinaire exercice !
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«Soudain il s'interrompt, il lève la main, l'index dressé, il tend l'oreille... Vous les entendez ?... Un attendrissement mélancolique amollit ses traits... Ils sont gais, hein ? Ils s'amusent... Que voulez-vous, c'est de leur âge... Nous aussi, on avait de ces fous rires... il n'y avait pas moyen de s'arrêter... » Un soir après le dîner, un père de famille reçoit la visite d'un voisin et ami. Tandis que les deux hommes s'installent au salon autour d'une table basse où est déposée une statuette, les enfants s'éclipsent poliment dans leur chambre. Autour de l'oeuvre d'art naît une conversation où se mêlent curiosité, admiration et désirs... Mais leur contemplation est dérangée par les rires en cascade qui leur parviennent depuis l'étage. Rires innocents ou sarcasmes ? Futilités ou rébellion ?
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Un homme est torturé par une idée qui loge dans la tête de sa collaboratrice. Cette idée, qui lui semble défier tout ce à quoi il croit, tout ce qu'il tient pour assuré, le fait souffrir par sa seule existence. Intolérant H. 2 ? Non, simplement attentif à tout ce qui se joue entre les êtres, à la contamination des esprits, à la torture des corps. Corps et idées se tiennent, pour le meilleur et pour le pire. Pour le pire surtout. Et l'on en rit, comme pour se protéger.Elle est là est la première oeuvre de Nathalie Sarraute à avoir été écrite directement pour le théâtre. Le thème de l'obsession, que l'on retrouve dans Enfance, est l'un des plus profonds, des plus préoccupants chez l'auteur. L'idée existe par les ravages qu'elle provoque, alors même qu'elle n'a pas été définie par les mots : c'est un genre dangereux et tout physique, «contre elle, on ne peut rien».
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Sous l'apparence conventionnelle de deux personnages - un vieil «avare» et sa fille - sous leurs attitudes, leurs paroles, leurs pensées, celui qui raconte cette histoire découvre un monde invisible. C'est comme une vision au microscope. Mais ce qui se révèle ainsi est tellement complexe, rapide, insaisissable qu'il finit par être contraint d'abandonner et de revenir à l'apparence, aux conventions.Une passionnante exploration que ne permettent pas les formes du roman traditionnel.
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Un père et une mère se déchirent sous l'oeil ironique de leur enfant, dont la seule présence les empêche d'admirer librement l'oeuvre qu'ils contemplent : impossible de dire «c'est beau» face au regard hostile du fils, qui paralyse ses parents. Effet de mai 68, bandes dessinées contre musées ? Refus de l'autorité ? La culpabilité parentale prend ici des proportions énormes.
La pièce met ainsi en scène une perpétuelle quête de l'auteur : l'objet, l'enfant, le conjoint, quête qui n'aboutit jamais. On est puni à vouloir trouver ce que cachent les mots les plus simples.
Cette oeuvre comique se moque donc du jugement esthétique émis par trois personnages. Mais la farce sur le langage cache le drame de l'incommunicable, du dialogue comme lutte, du langage comme trahison.
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«Arcimboldo. Tout ici est à lui. Ici est l'espace dont il a besoin pour prendre ses aises... répandre aussi loin qu'il le voudra ses ondes... Déployer sa désinvolture. Son outrecuidance. Qu'il fasse venir ici cela et encore cela, tout ce qui lui chante, ces fleurs, ces légumes, ces fruits, ces objets incongrus, ces bêtes étranges, qu'il en dispose comme bon lui semble... Arcimboldo, l'assurance même. L'affirmation. Le défi. Arcimboldo. Tout ici n'est que lui. Arcimboldo.»
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«Des imbéciles. Imbéciles. Les imbéciles. C'est à ne pas croire. C'est lui qui vient de dire ça. Lui-même. C'est de sa propre bouche que sont sortis ces mots étonnants : des imbéciles. Ces gens-là, regardez, je vous les désigne, regardez-les bien. Vous voyez, ce sont des imbéciles. Les voici. Ils se nomment ainsi. Ils sont là, devant nous, immobilisés. Ils sont tout raides... comme inanimés... Ils sont emmaillotés soigneusement, entourés de bandelettes, sur leur visage des masques peints ont été posés...»
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Isma, c'est quoi ? Un prénom de femme ? Isma, Irma, Emma, Alma... petits noms à susurrer délicatement. Isma, une héroïne féminine dont le destin nous serait conté le temps d'une comédie ? Rien de plus insinuant qu'Isma, cependant ; rien de moins doux, de moins plaisant. Isma, c'est le petit bruit de bouche que font les Dubuit lorsqu'ils prononcent avec délectation les mots en -isme. Une fois de plus, Nathalie Sarraute nous donne ici une comédie des tropismes, ces mouvements involontaires, inconscients, en tout cas non dits, qui tissent ce qu'il y a d'impalpable dans les rapports humains. La manière de prononcer les mots suffit à opposer deux groupes humains. Dans un prodige de drôlerie inquiétante, l'auteur, qui semble ne traiter que de détails, nous livre sa vision de l'homme et de la société.
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«Errant seul de nouveau dans ces étendues sans fin où il lui semble que personne avant lui n'a été tenté de s'aventurer... Aucune trace nulle part. Aucun jalon ici ni point de repère qui permette de conserver le sens des proportions. La plus inoffensive bestiole alerte toute l'attention, paraît aussi effrayante qu'un tigre...Tâtonnant, cherchant, mais quoi ? Il n'en sait trop rien. Cela ne porte aucun nom...»Là où une oeuvre littéraire prend naissance, grandit, ou meurt...
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Ces vingt-quatre lettres de Nathalie Sarraute offrent un aperçu inédit sur la personnalité de l'un des écrivains majeurs du XXe siècle. Elles témoignent d'une personnalité facétieuse, aussi prompte à l'émerveillement qu'au sarcasme. Comme autant d'entrées d'un journal de voyage, elles dressent le portrait inattendu d'une jeune fille bondissante de soixante-trois ans, emportée dans une traversée continentale des États-Unis au début de l'année 1964. Écrites dans un style impressionniste, heurté, presque télégraphique, ces lettres, écrites à son mari absent, montrent en outre la communion de ce couple.
Avec la réédition de Tropismes par les Éditions de Minuit en 1957, la publication de son troisième roman, Le Planétarium, en 1959, puis de son quatrième, Les Fruits d'or, en 1963, sa réputation était devenue internationale.
Nathalie Sarraute aborde sa tournée de conférences aux États-Unis en 1964 avec la naïveté d'une néophyte dans l'art de recevoir les éloges et la fureur d'une revanche dans l'appétit à les recevoir. Enfin reconnue, à soixante-trois ans, Nathalie Sarraute traverse les États-Unis dans une excitation électrique, en même temps qu'une certaine forme de stupeur, ayant encore peine à croire à sa bonne fortune.
Elle donne une vingtaine de conférences dans les universités américaines les plus prestigieuses.
Elle arrive à New-York le 1er février 1964 et rentre en France le 1er avril. Les États-Unis sont alors au début d'une véritable révolution culturelle, dont les grandes universités sont les épicentres.
La réception enthousiaste pour la littérature d'avant-garde, telle qu'elle est représentée par Nathalie Sarraute, doit aussi être comprise dans ce contexte.
La surprise que constitue pour elle sa soudaine notoriété, contribue à donner au récit de son voyage un ton profondément comique. Ces lettres montrent une spontanéité qui leur donne un ton bien différent de son oeuvre de fiction.
Écrivant souvent en pleine nuit, elle résume quotidiennement ses activités et ses impressions les plus frappantes. Ironique, joyeuse, parfois même moqueuse et surtout émerveillée par le spectacle d'un pays en pleine mutation, Nathalie Sarraute se révèle sous un jour entièrement nouveau : le voyage intérieur est devenu extérieur.
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«Des mots, des êtres vivants parfaitement autonomes, sont les protagonistes de chacun de ces drames.Dès que viennent des mots du dehors, une paroi est dressée. Seuls les mots capables de recevoir convenablement les visiteurs restent de ce côté. Tous les autres s'en vont et sont pour plus de sûreté enfermés derrière la paroi.Mais la paroi est transparente et les exclus observent à travers elle.Par moments, ce qu'ils voient leur donne envie d'intervenir, ils n'y tiennent plus, ils appellent... Ouvrez.»Nathalie Sarraute.
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Paul Valéry et l'Enfant d'Éléphant - Flaubert le précurseur
Nathalie Sarraute
- Gallimard
- 23 Janvier 1986
- 9782070706068
Il est extrêmement difficile de dégager une oeuvre à l'apogée de sa renommée de la gangue de commentaires enthousiastes qui l'enferme et de la regarder comme «un événement neuf». C'est cette difficulté que Nathalie Sarraute a fait sentir dans son roman Les fruits d'or. C'est à elle qu'auparavant elle avait essayé de s'attaquer dans ces deux essais. Le premier, écrit après la mort de Paul Valéry, montrait combien la vénération sans la moindre réserve dont il était entouré, l'absence de toute discrimination rendait parfois déconcertante, décourageante la lecture de son oeuvre. L'irrespect dont elle fait preuve à l'égard de Valéry, il le lui aurait pardonné, lui qui a donné l'exemple dans sa façon de traiter Pascal. Quant à Flaubert, que les romanciers modernes considéraient comme «notre maître à tous», surtout par son attachement aux pures formes descriptives, Nathalie Sarraute, en relisant son oeuvre sans idées préconçues, a vu que c'est non pas Salammbô ou L'éducation sentimentale, mais Madame Bovary, où son style glacé, figé, verni s'accorde admirablement avec un univers tout en trompe l'oeil, qui a permis à Flaubert d'introduire pour la première fois dans la littérature ce qu'on a appelé plus tard «l'inauthentique» et d'ouvrir au roman et au théâtre un domaine jusque-là inexploré. Flaubert, qui rêvait aussi d'écrire «un livre sur rien, un livre sans attaches extérieures» n'est-il pas un des plus certains précurseurs de celle qui a réussi à saisir dans son mouvement la plus infime parcelle de vie psychique ?