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Fayard
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Histoire de l'Italie : Des origines à nos jours
Pierre Milza
- Fayard
- Divers Histoire
- 12 Octobre 2005
- 9782213623917
Y a-t-il en Europe une terre qui ait connu en quatre millénaires davantage de bouleversements que l'Italie ? La Péninsule aura expérimenté tous les modèles d'organisation politique et elle les a souvent exportés. Elle aura subi aussi, de tous temps, des bouleversements démographiques et des brassages sans équivalents combien d'invasions, d'occupations, de descentes, de raids ? Quel invraisemblable empilement de civilisations sur un même sol, où presque tous les peuples du continent et tous les empires se sont un jour donné rendez-vous.
En dépit de cette instabilité, c'est en vain qu'on chercherait une époque où l'Italie aurait cessé d'illustrer le génie humain : de l'Empire romain à la Cité-Etat, du latin au toscan qui a été fixé bien avant les autres langues vernaculaires, des sciences à la peinture et à la sculpture, de l'architecture au cinéma et à la musique, etc., elle n'a pas souffert d'avoir eu dix ou douze villes capitales rivales (la France n'en a jamais eu qu'une seule !), au contraire, elle en a fait une force qui l'a transformée en institutrice des autres nations qu'elle féconde depuis des siècles et des siècles... A la différence de quelques autres « miracles » que les historiens relèvent ici ou là dans l'espace et le temps mais qui sont souvent éphémères, le miracle italien est permanent.
Il fallait toutes les connaissances, toute la culture et toutes les affinités électives de Pierre Milza avec le pays de ses aïeux pour faire le récit le plus documenté et le plus vivant qui soit de cette histoire longue et complexe. De l'âge du bronze à Berlusconi, il guide son lecteur sur tous les fronts : l'événement bien sûr, le portrait d'une longue cohorte d'hommes d'exception, mais aussi la civilisation, c'est-à-dire les champs culturel et spirituel. Le biographe de Mussolini accomplit, en à peine un millier de pages, un véritable tour de force qui fait de cette somme le livre de chevet des francophones qui visitent l'Italie, qui travaillent avec elle, qui aiment leur « soeur latine » et veulent la comprendre. -
Sauvegarder la grandeur de la France tout en faisant le bonheur des Français: le défi qu'eut à relever en 1715 Philippe d'Orléans, neveu de Louis XIV, était redoutable. Il s'en acquitta avec un sérieux et un succès que l'on a longtemps niés, oubliés ou dénigrés. Si nul aujourd'hui ne s'avise plus d'en faire un ambitieux ayant empoisonné une partie de la descendance du Grand Roi pour s'emparer du pouvoir, on le voit encore volontiers sous les traits d'un libertin veule, blasé de lui-même et de son rang, se désintéressant de l'Etat, bref comme ordonnateur des plaisirs d'une société raffinée mais corrompue, alors que se multipliaient les signes avant-coureurs de la Révolution.
Ce cliché reste bien léger. Comment ne pas voir que le Régent, personnalité complexe et insaisissable, fut un prince à l'intelligence lumineuse, aux dons aussi surprenants que multiples, curieux de tout, et aussi un travailleur acharné, un soldat brillant en même temps qu'un politique d'une habileté extrême
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Qui était Francisco Franco Bahamonde, dernier survivant parmi les grands dictateurs du xxe siècle, né en 1892 et mort en 1975? «Un militaire chimiquement pur», répondait un prêtre qui le connaissait depuis l'enfance. À l'âge des radars et des fusées, des missiles atomiques et des bombes à laser, pouvons-nous comprendre un militaire du temps de la baïonnette?
À travers ce portrait qu'il travaille comme il l'a fait pour Colette et Dostoïevski, Michel del Castillo longe et commente les grandes étapes de la vie de Franco, enfance, études, guerre coloniale au Maroc, direction de l'académie de Saragosse, etc. Il ne traite pas directement de la guerre, mais l'évoque par rubriques: soulèvement des gauches, mort de la République, les partis et l'État, la Phalange, l'Église, la répression, les Juifs, la nuit noire, sans oublier la reconnaissance internationale, le décollage économique, l'instauration de la monarchie avec Juan Carlos, l'épilogue interminable de la mort...
Attentif au mouvement d'une vie, Le Temps de Franco brosse à travers l'homme un demi-siècle de l'histoire d'un pays. Ce témoignage hautement littéraire est l'analyse d'un mythe non dénué d'une ironie amère envers les légendes, affabulations et trompe-l'oeil auxquels il a donné lieu.
Né à Madrid, de père français et de mère espagnole, Michel del Castillo a évoqué son enfance et son adolescence chaotiques dans nombre de ses livres. Membre de l'Académie royale de Belgique, de nombreux prix ont couronné son oeuvre, dont récemment le prix des Écrivains croyants, reçu pour La Vie mentie (Fayard, 2007). -
« Un cardinal escroc, la reine impliquée dans une affaire de faux ! Que de fange sur la crosse et le sceptre ! Quel triomphe pour les idées de liberté ! » Loin de donner les clés de l?énigme, cette exclamation d?un magistrat du parlement de Paris montre l?importance d?une affaire marquée au coin de l?invraisemblance. Quel auteur dramatique aurait imaginé un scénario mettant en scène la reine Marie-Antoinette et le cardinal prince de Rohan, grand aumônier de France, avec une bande d?aventuriers et de charlatans tels que Cagliostro ? Le scandale dépassait largement l?imbroglio romanesque des liaisons dangereuses et des intrigues de cour où la politique, l?escroquerie et le sexe se trouvaient étroitement mêlés. Le retentissant procès qui s?ensuivit fut pourtant un véritable procès politique, mettant en cause le régime, la société et la personne de la reine. Cette étrange aventure projetait sous les feux de l?actualité une société aristocratique isolée du monde extérieur, prête à n?importe quelle extravagance pour échapper à l?ennui qui la délitait. Révélée dans sa faiblesse, elle se profilait comme un bouc émissaire à abattre. Evelyne Lever a repris toutes les pièces de la procédure, interrogé les écrits du temps relatifs à cet événement, qui « remplit d?épouvante » le jeune Goethe « comme l?aurait fait la tête de Méduse ».
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Voyage en Europe ; de Charlemagne à nos jours
François Reynaert
- Fayard
- 23 Janvier 2019
- 9782213711423
Notre histoire est européenne S'arrêter face au trône de Charlemagne, dans la cathédrale d'Aix-la-Chapelle, pour rêver d'un empire qui fonda l'Europe. Se promener dans les rues de Nuremberg, de Bruges, de Gênes pour raconter la résurrection des villes et l'invention de l'économie, au Moyen Âge. Arpenter les falaises de Sagres, au sud du Portugal, pour imaginer le prince Henri le Navigateur guettant à l'horizon le retour des caravelles. Retrouver, en Pologne, le chanoine Copernic, qui chamboula notre rapport à l'univers. Chercher, dans les couloirs de Westminster, l'âme du parlementarisme et dans la salle du Jeu de Paume à Versailles celle de la Révolution française. Profiter d'une promenade d'un bout du continent à l'autre, pour explorer son passé.
En ce début de XXIe siècle, les passions nationales flambent de nouveau. Nombre d'Européens n'imaginent plus l'avenir que dans le repli alors que notre histoire est indissociable de celle du continent. Un Espagnol et un Polonais, un Allemand et un Français ont en commun le Moyen Âge et ses châteaux, la Renaissance, les Lumières, les bouleversements consécutifs à la Révolution française, la révolution industrielle, les deux guerres mondiales. C'est une évidence, et elle est oubliée. Le but de cette promenade est de lui redonner force et vie.
François Reynaert est journaliste et écrivain. Le premier livre d'histoire qu'il a publié, Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises (2010), est devenu un best-seller. Avec La Grande Histoire du monde arabe (2013), puis La Grande Histoire du monde (2016, prix des lecteurs Essais 2018 du Livre de Poche), l'auteur continue d'inciter le lecteur à changer de regard sur le passé.
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Tout pousse Clément V, le Gascon sujet du Capétien et fidèle du Plantagenêt, à retarder son voyage vers Rome. Porté à la temporisation, effrayé par les troubles qui ne cessent d'agiter Rome, soucieux d'en finir d'abord avec tant d'affaires qui concernent la France et de les mettre à l'ordre du jour d'un concile, il s'installe en 1309 à Avignon, hors du royaume de France mais aux portes de celui-ci. Ses successeurs trouveront commode d'y demeurer. Ils en feront la capitale d'une énorme machine politique, administrative et financière largement dominée par les Français mais non aux ordres du roi de France.
La cour pontificale sera le foyer d'un rayonnement intellectuel et artistique sans précédent. Mais le pape d'Avignon, c'est d'abord le pape. Et « là où est le pape, là est Rome ». Les choses changent en 1378, quand une double élection donne à l'Église deux papes. Il en est un à Rome, un à Avignon. Ce Grand Schisme d'Occident sera pendant trente ans l'une des plus terribles épreuves de l'Église. L'Occident chrétien en sortira changé. -
L'URSS n'est plus. Pourtant, son histoire nous concerne toujours, aujourd'hui plus que jamais. Une histoire longtemps impossible à écrire, non seulement faute de documents fiables, mais aussi parce qu'elle a été au coeur d'affrontements idéologiques qui, entre réquisitoire et apologie, ont largement contribué à occulter les soixante-quinze années qu'a duré le régime soviétique.
Il y a peu, l'ouverture des archives a de nouveau rendu
possible cette entreprise. Dans Le Siècle soviétique, Moshe Lewin s'attache à cerner ces années dans toute leur complexité. Multipliant les éclairages - démographie, économie, travail,
culture, camps et répression -, il nous conduit dans les
« entrailles » d'un système encore largement méconnu et bouscule les idées reçues sur les dirigeants, le parti-Etat ou encore la bureaucratie, pieuvre tentaculaire qui détenait le véritable
pouvoir.
Histoire sociale de l'URSS, Le Siècle soviétique montre que, même aux pires heures de la dictature stalinienne, la société a conservé, par de multiples biais, une certaine autonomie. Profondément rurale au début de la période, elle a aussi connu de gigantesques bouleversements, devenant en quelques
décennies une société moderne à dominante urbaine.
Aux antipodes d'une histoire linéaire, ce livre permet de prendre toute la mesure des continuités et des ruptures qui mènent, à travers un cheminement complexe, de la révolution fondatrice d'octobre 1917 à l'implosion finale, en passant par la dictature stalinienne et les impossibles réformes des années khrouchtchéviennes.
Né en 1921, Moshe Lewin a été, entre 1978 et 2000, professeur d'histoire à l'université de Pennsylvanie (Etats-Unis). Parmi ses ouvrages traduits en français : Le Dernier Combat de Lénine (Minuit, 1967), La Formation du système soviétique (Gallimard, 1987).
Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Denis Paillard et Florence Prudhomme. -
Histoire du Portugal
Jean-françois Labourdette
- Fayard
- Biographies Historiques
- 1 Mars 2000
- 9782213605906
"Toutes les nations sont des mystères", écrivait Pessoa. Cette affirmation s'applique au Portugal plus qu'à toute autre. Comment, en effet, ce territoire sans unité naturelle et dont la population était si diverse est-il devenu l'un des premiers Etats-nations de l'Occident ? Comment expliquer que ce petit royaume se soit lancé dans les grandes découvertes qui allaient bouleverser l'Europe de la Renaissance ?
L'épopée singulière des Portugais se dessine au XIIe siècle, pendant la Reconquête, quand leur premier roi répand l'idée que Dieu l'a élu pour combattre les païens et les Infidèles. La vocation impériale, qui traverse toute l'histoire du Portugal, s'est nourrie de cet esprit de croisade, inséparable d'une forme particulière de messianisme, le sébastianisme.
Dès le XIVe siècle, les Portugais commencent à se lancer sur les mers. Sous le règne de Manuel de Fortuné, ils sont à la tête du plus grand empire maritime et commercial du monde, mais celui-ci sombre avec l'Union ibérique, imposée par Philippe II. Une autre chance s'offre au pays, qui retrouve son indépendance en 1640, grâce au sucre et à l'or du Brésil, mais ce deuxième empire s'effondre avec les invasions napoléoniennes. Pendant près de deux siècles, le Portugal cherche à fonder un empire en Afrique. Mais ni la monarchie, ni la courte expérience républicaine, ni la dictature militaire de Salazar ne peuvent ressusciter le rêve impérial. Jusqu'à la révolution des Oeillets, en 1974, le pays s'enfonce dans une irrémédiable décadence et s'accroche obstinément à ses derniers domaines d'outre-mer. Une nouvelle époque allait bientôt s'ouvrir : celle du Portugal européen.
Jean-François Labourdette est professeur émérite de l'université Charles-de-Gaulle-Lille-III. Spécialiste des relations internationales à l'époque moderne, il est aussi l'auteur de trois livres sur le Portugal.
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Les discriminés ; l'antisémitisme soviétique après Staline
Sarah Fainberg
- Fayard
- 12 Mars 2014
- 9782213662848
L'Union soviétique s'est voulue le pays de l'égalité démocratique et de l'« amitié entre les peuples ». Pourtant, Lénine puis Staline ont initié des discriminations ethniques qui se cristallisèrent en racisme d'État. Certaines minorités, tels les Tchétchènes et les Tatars de Crimée, furent déportées quand d'autres furent promues. Les Juifs, d'abord bénéficiaires de la révolution, firent l'objet d'une violente répression officielle orchestrée par Staline après la Seconde Guerre mondiale. À la mort du Pharaon rouge, le Kremlin poursuivit à leur encontre un système tacite d'exclusion. Pourquoi l'empire soviétique a-t-il discriminé les Juifs jusqu'à sa chute en 1991 ? Et comment les victimes inventèrent-elles de nouveaux chemins pour survivre ? Cette enquête, forte d'entretiens menés auprès de quatre générations de Juifs originaires d'ex-URSS et d'archives inédites, dévoile la mécanique de ce monde kafkaïen où la pseudo-correction des inégalités devient une machine à broyer des minorités. Sarah Fainberg démonte les ressorts de la domination étatique, du racisme ordinaire et de la compétition interethnique, source de réflexion pour nos démocraties du XXIe siècle.
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Pirates et membres du Parlement, marchands et ménestrels, nobles et notaires, grandes dames enamourées, roturiers ambitieux, religieuses boudeuses: voilà les personnages de cette fresque de la seconde moitié du XVe siècle anglais, dans laquelle, avec son remarquable talent d'écriture, P.M. Kendall démontre que, contrairement à ce que l'on a longtemps soutenu, la guerre des Deux-Roses n'a pas été un plongeon dans l'anarchie mais bien une remontée des profondeurs de l'anarchie. L'histoire de l'Angleterre moderne ne commence pas avec les Tudors mais avec les York, en cette période d'équilibre et de prospérité qui suit les soulèvements de la fin du XIVe siècle et précède les temps difficiles et les rancoeurs du début du XVIe.Idées, attitudes, craintes, aspirations, la " vieille danse " de l'amour et de la mort, le costume, la tenue de la maison, en ville et à la campagne, les affaires: autant de sujets traités à partir de sources contemporaines, récits de voyageurs, correspondances, rapports des diplomates français et italiens, comptes privés et publics, testaments, etc., qui restituent la couleur et le parfum de l'époque.Professeur d'histoire et d'anglais, Paul Murray Kendall (1911-1973) a enseigné pendant plus de trente ans à l'université de l'Ohio, puis, après sa retraite, à l'université du Kansas. Il a consacré plusieurs ouvrages à l'histoire du XVe siècle, dont trois grandes biographies: Richard III, Louis XI et Warwick, le Faiseur de Rois.
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Deux siècles ensemble Tome 2
Alexandre Soljenitsyne
- Fayard
- Litterature Etrangere
- 10 Septembre 2003
- 9782213615189
Le second et dernier volume de l?étude considérable d?Alexandre Soljénitsyne sur les relations entre Juifs et Russes est consacré à la période soviétique de 1917 à 1972. Sur treize chapitres, il expose et analyse successivement la part prise par les Juifs de Russie à la révolution de Février, puis à celle d?Octobre aux côtés des bolcheviks, puis à la guerre civile et aux événements dramatiques des années 20 et 30 ; il se penche sur le dossier douloureux et jusque-là « interdit » de la participation de certains, trop nombreux, à l?appareil répressif soviétique et à l?administration du Goulag, sans omettre d?aborder également, pour finir, les conséquences du pacte germano-soviétique, puis de la « Grande Guerre patriotique », et l?essor de l?antisémitisme stalinien à la fin des années 40. A la suite de la guerre des Six jours et de la politique indécise du gouvernement soviétique, la communauté juive d?URSS se détache de plus en plus du communisme, mais, parallèlement, rejette la faute de l?échec de la révolution sur les spécificités de l?histoire et du caractère des Russes. Les deux derniers chapitres sont consacrés, d?une part, au début de l?exode à destination d?Israël ou de l?Occident, d?autre part aux problèmes de l?assimilation de ceux qui restent. Si l?auteur arrête son analyse en 1972, c?est qu?avec la liberté de mouvement recouvrée, les Juifs ne se trouvent plus astreints à vivre en Russie : désormais, les rapports entre les deux communautés se situent dans une perspective nouvelle.La méthode suivie est identique à celle du premier volume. Soljénitsyne s?appuie principalement et parfois même quasi exclusivement sur les sources juives et offre un tableau aussi précis que contrasté des périodes étudiées. Une véritable somme, la première du genre, qui, vu son ampleur, pourrait bien être reconnue comme définitive.Prix Nobel de littérature, réinstallé en Russie après un exil de vingt ans, l?auteur du Premier Cercle et du Pavillon des cancéreux, après avoir bouclé ses deux entreprises littéraires géantes, L?Archipel du Goulag et La Roue rouge (six tomes sur huit déjà publiés en France) et tout en poursuivant la rédaction de ses mémoires (deux volets publiés, sans doute encore deux à venir), a renoué depuis peu avec le genre court ?, notamment avec Deux Récits de guerre ? ainsi qu?avec l?histoire et la critique littéraires.
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Les impériaux, administrer et habiter l'Europe de Napoléon
Aurélien Lignereux
- Fayard
- 25 Septembre 2019
- 9782213710297
Taillé à coups de sabre dans le continent pour nourrir les guerres et venir à bout de l'Angleterre, et pourtant destiné à offrir aux Européens un espace de droit et de civilisation, le Grand Empire de Napoléon fascine autant par ses proportions que par les tensions qui le parcouraient. Or que sait-on des fonctionnaires chargés de lui donner corps ? Les états d'âme de ces hommes, à la fois missionnaires impériaux et pères de famille désorientés par de tels déplacements, sont ceux de toute une génération partagée entre souci de stabilité et désir de mobilité, et reflètent les contradictions d'une France portée à 130 départements, qui se construit simultanément en État-Nation et en État-Empire. En s'attachant à l'expérience sensible, sociale et culturelle de l'expatriation, ce livre entend réintégrer l'ère napoléonienne au sein d'une histoire toujours plus ouverte et connectée des circulations d'hommes et de savoirs.
L'enquête suit, pas à pas, une cohorte de 1 500 Impériaux, du préfet au préposé des douanes, depuis leur départ hors des vieilles frontières jusqu'à la mémoire d'un épisode ayant conjugué l'épreuve intime du dépaysement au sentiment gratifiant d'avoir écrit l'Histoire. Se dessinent alors une sociologie de ces agents happés par le marché impérial des emplois publics ainsi qu'une anthropologie de l'expatrié au fil d'une immersion au sein des correspondances privées. À leur retour en France, ces experts occupent des postes clefs dans les administrations fiscales, les Eaux et Forêts ou les Ponts et Chaussées ; la leçon qu'ils ont tirée de la domination napoléonienne contribue à redéfinir le rapport au monde de leurs compatriotes : ces praticiens du droit d'un peuple à disposer des autres se font, après 1815, les partisans du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, tout en poussant au rebond mondial de l'expansionnisme français. -
L'Allemagne de Weimar (1919-1933)
Christian Baechler
- Fayard
- Biographies Historiques
- 16 Mai 2007
- 9782213633473
Issue de la défaite et de la révolution de novembre 1918, la République de Weimar n'a jamais pu se dégager d'un si lourd héritage. Jusqu'à sa fin, en 1933, il a pesé sur la vie politique, économique et sociale de l'Allemagne, et restreint les chances de succès. Le régime démocratique était-il condamné dès l'origine du fait de l'absence de révolution sociale et de nationalisation des industries clés, comme l'ont prétendu certains historiens ? N'y avait-il, en 1918, qu'une alternative : une révolution sociale avec dictature sur le modèle bolchevique ou un régime parlementaire avec le soutien du corps des officiers et de la bureaucratie d'Ancien Régime, ce qui limitait les réformes de fond ? Une troisième voie aurait-elle pu assurer une base populaire plus large au nouveau système ?
La période finale de la République de Weimar et l'arrivée des nazis au pouvoir ont suscité des interrogations et des controverses bien plus vives encore. La fin de la grande coalition, en mars 1930, et la chancellerie de Brüning signifient-elles la mort de la démocratie ? Brüning est-il le fossoyeur de Weimar ? Le régime parlementaire a-t-il été condamné à la paralysie par l'incapacité des partis à trouver une solution à la crise économique et sociale ? La déflation pratiquée par Brüning, son refus de mener une politique monétaire expansionniste pour relancer l'économie et mettre fin au chômage ont-ils fait le lit du nazisme ? A l'extérieur, Stresemann a-t-il continué la politique de puissance du Reich wilhelmien, ou faut-il le considérer comme l'un des pères de la construction européenne ?
Ce livre répond ainsi à de multiples questions qui ont longtemps divisé les historiens. Avec prudence, Christian Baechler estime que, si les conditions de naissance et de développement de la République de Weimar ont été difficiles, la démocratie allemande n'était pas condamnée dès l'origine. Même en janvier 1933, l'accession de Hitler au pouvoir n'était pas inévitale, et d'autres issues s'offraient à l'Allemagne... -
Depuis bien longtemps, l'Histoire de France est devenue une espèce de genre littéraire avec tout ce que cela comporte de conventions. Comment faire du neuf en accumulant toujours les mêmes événements censés avoir infléchi le destin du peuple français?Sur une trame légère _ mais bien présente _ de faits, Pierre Goubert a préféré donner de notre passé une vue cavalière qui lui permet de faire apparaître les lignes principales, les temps forts et les temps morts, donc de donner à un passé souvent trop figé du relief et de l'animation. Nourri d'histoire nouvelle (économie, démographie, mentalités), ce livre renouvelle en profondeur notre vision: il s'agit bien de la même histoire et du même peuple mais comme ils parlent mieux ici à l'intelligence et à l'imagination!Pour donner un manuel complet, l'auteur a également joint en annexe une chronologie précise, des tableaux généalogiques, une bibliographie, des cartes.Professeur d'université à Rennes puis à Paris, Pierre Goubert est l'un des pionniers de la démographie historique et l'un des meilleurs spécialistes du XVIIe siècle et de l'Ancien Régime. Sa thèse sur Beauvais et le Beauvaisis a fait date, tout comme ses ouvrages sur l'Ancien Régime, sur Louis XIV et vingt millions de Français et la Vie quotidienne des paysans au XVIIe siècle.
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L'invention des Français ; du temps de nos folies gauloises
Jean-françois Kahn
- Fayard
- Documents Fayard
- 27 Février 2013
- 9782213668208
Entre 600 avant Jésus-Christ et 500 après, dans ce qu'on appelle aujourd'hui la France, que s'est-il passé ? Faites l'expérience, posez la question : au mieux on vous citera la défaite de Vercingétorix à Alésia et le baptême de Clovis. Le reste est comme un immense trou de plus de mille ans. Or, c'est au fond de ce trou, dans ce creuset, qu'en vérité tout se passe : que, d'un invraisemblable capharnaüm de bandes et de hordes, de tribus et de peuples, de cités et de nations, va peu à peu surgir, se cristalliser, s'affirmer quelque chose d'étrange, mille-pattes à mille têtes, qu'on appellera les Français. Aventure improbable, inouïe, parfois démentielle. Nul réalisateur hollywoodien n'oserait imaginer la dramaturgie de cette épopée dont Jean-François Kahn retrace ici la dynamique et l'effervescence, tant y tonitruent la fureur et l'hilarité, le fracas des armes et le sifflement des intrigues, l'héroïsme des sacrifices et l'ignominie des forfaitures, la fulgurance des intelligences et l'étalement des médiocrités. La France, déjà ! Incroyable roman vrai qui ne ressemble pas toujours, rarement même, à la chronique officielle qu'en ont congelée nos écoles. C'est aussi le mérite de ce livre que de révéler une réalité parfois plus grise, parfois plus lumineuse, que les mythes.Essayiste, polémiste, auteur de nombreux ouvrages dont, aux Éditions Fayard, Tout change parce que rien ne change, Les Bullocrates, Comment on y va... Jean-François Kahn est le fondateur de l'hebdomadaire Marianne.
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La personnalité de Philippe II (né en 1527 et mort, il y a tout juste quatre siècles en 1598) ne laisse pas indifférent ; il n'a, à vrai dire, pas bonne presse et la "légende noire" forgée de son vivant par ses adversaires français, anglais et hollandais lui colle à la peau. Le présent ouvrage n'entend pas réhabiliter sa mémoire en offrant une nouvelle biographie, mais plutôt montrer comment quarante ans de gouvernement ont durablement engagé le destin de l'Espagne et de ses possessions. C'est sous l'égide de Philippe II qu'ont pris forme les grandes orientations politiques, économiques et idéologiques qui ont eu des effets profonds dans la péninsule et en Amérique.
La définition qu'on donne souvent de l'Espagne de ce temps - un empire au service de la Contre-Réforme - est à l'évidence trompeuse et réductrice. Ce qui la caractérise en effet ce n'est pas la défense acharnée du catholicisme, mais une volonté obstinée de puissance, l'obsession chez le roi de garder sa réputation d'homme le plus puissant de la chrétienté ; s'il a été intolérant, Philippe II ne l'a pas été davantage que les autres monarques de son temps. En revanche, pour protéger ce qui à ses yeux constituait un ensemble de droits patrimoniaux inaliénables - aux Pays-Bas, au Portugal et même en France -, il a compromis voire sacrifié les intérêts bien compris de l'Espagne.
Mettant en oeuvre une ample documentation et surtout faisant la synthèse de nombreuses recherches inédites en France, Joseph Pérez revient sur les idées recues et propose une appréciation radicalement nouvelle du règne de Philippe II.
Joseph Pérez est professeur honoraire de civilisation de l'Espagne et de l'Amérique latine à l'université de Bordeaux-III. Fondateur et premier directeur de la Maison des pays ibériques à Bordeaux, ancien directeur de la Casa de Velasquez de Madrid, il est l'auteur de nombreux ouvrages sur l'histoire et la culture espagnoles, en particulier d'Isabelle et Ferdinand, Rois Catholiques d'Espagne (Fayard, 1988) et de l'Histoire de l'Espagne (Fayard, 1996). -
Justifiées ou non, les mauvaises réputations ont la vie dure, et il est vrai qu'en se bornant à l'exposé des événements bruts, l'Espagne mérite plus que tout autre pays l'opprobre de l'Histoire et la sévérité des historiens : expulsion des Juifs en 1492 (les Français avaient fait la même chose deux siècles plus tôt) ; répression du protestantisme (où donc la Saint-Barthélemy a-t-elle eu lieu ?) ; répression politique dans les Pays-Bas (les Irlandais ont-ils connu un sort meilleur ?) ; morts troublantes dans la famille royale (Henri VIII, Elisabeth Ire, les rois Valois sont-ils irréprochables de ce côté-là ?) ; aspiration à la domination universelle (ce qui n'a jamais, on le sait bien, intéressé ni la France ni l'Angleterre) ; édification par l'épée d'un empire colonial (ni le Portugal voisin, ni la France et l'Angleterre encore, ni même les Provinces-Unies n'ont jamais eu de Compagnie des Indes ni fait le trafic de bois d'ébène), etc.
La vérité toute nue, c'est que la réputation de l'Espagne, sa « légende noire » ont été forgées par la propagande de guerre imaginée de génération en génération depuis le règne de Charles Quint par ses ennemis. Et comme lesdits ennemis ont eu le dessus, les élites espagnoles elles-mêmes se sont laissé inculquer une véritable haine de soi aujourd'hui encore totalement intériorisée ou presque. L'une des preuves de cet état des lieux « historiquement correct » est sans doute que ce soit un historien français, Joseph Pérez, qui doive redresser les erreurs de perspective : l'Espagne ne fut ni pire ni meilleure que les autres puissances européennes.
Joseph Pérez, directeur de la Casa de Velazquez de Madrid de 1989 à 1996, professeur émérite de civilisation de l'Espagne et de l'Amérique latine à l'université de Bordeaux-III, est l'auteur de nombreux ouvrages, en particulier Histoire de l'Espagne ; Isabelle et Ferdinand. Rois Catholiques d'Espagne ; L'Espagne de Philippe II ; Brève histoire de l'Inquisition en Espagne ; Thérèse d'Avila, tous publiés chez Fayard. -
Les passions intellectuelles Tome 3 ; volonté de pouvoir (1762-1778)
Elisabeth Badinter
- Fayard
- 18 Avril 2007
- 9782213626437
Les savants et les philosophes qui constituaient auparavant la République des Lettres écrivaient principalement pour convaincre leurs pairs. Ils dépendaient du pouvoir et des grands. Avec l'émergence, au milieu du XVIIIe siècle, d'une opinion publique éclairée et de plus en plus puissante, le pouvoir change de camp. On voit naître chez les intellectuels trois passions successives qui ont fait l'objet de cette trilogie d'Elisabeth Badinter.
Dans les deux premiers volumes, qui évoquaient respectivement le désir de gloire et l'exigence de dignité, nous avons vu les intellectuels solliciter les applaudissements du public puis revendiquer à la fois leur indépendance à l'égard des grands et un statut d'autorité morale.
Dans le dernier volume que nous publions ici, on observe la naissance de la troisième grande passion intellectuelle : la volonté de pouvoir. Dans les années 1760, l'aura des philosophes est telle qu'ils sont de plus en plus courtisés par les rois et les princes étrangers. On recherche leur onction pour se faire une réputation de souverain éclairé. Ils se rêvent conseillers du prince, voire souhaitent entrer eux-mêmes en politique...
Diderot, d'Alembert, Helvétius ou Voltaire vont mesurer, chacun à sa façon, les limites de leur pouvoir.
Philosophe, observatrice de l'évolution des mentalités et des moeurs, Elisabeth Badinter clôt ici sa réflexion sur ces passions intellectuelles du siècle des Lumières qui sont encore les nôtres aujourd'hui. -
Européens, Anglo-Saxons ou Asiatiques, anonymes et personnalités célèbres, ils furent nombreux à sillonner l'Allemagne de 1933 à 1939. Flânant de Brême à Heidelberg, ces touristes parcoururent les lieux de pèlerinage du nazisme en action, Munich-Nuremberg-Berchtesgaden, jusqu'au camp de concentration de Dachau.
Quelles furent leurs impressions face à ce pays aussi séduisant qu'effrayant, doté de structures d'accueil performantes ? Tantôt parodie de voyages-Potemkine, riche en mises en scène, tantôt fenêtre entr'ouverte sur l'autoritarisme, l'Allemagne nazie a su attirer des sphères aussi variées que les cercles mondains, les anciens combattants, les diplomates, les journalistes, le monde des arts ou les grands dirigeants économiques. Des préparatifs, véritable tour sur soi avant la confrontation au nazisme, à la diffusion du retour, les différents temps du voyage révèlent une chronologie propre aux méthodes de séduction mises en place par le Troisième Reich à l'égard de l'étranger.
En s'appuyant sur une riche documentation littéraire, Frédéric Sallée dresse un tableau nuancé et novateur des relations internationales de l'Allemagne des années trente. De l'approbation aveugle au rejet inconditionnel d'un séjour en « Hitlérie », la gamme variée des réactions des voyageurs révèle comment le pays façonna son image aux yeux du monde.
Agrégé, Frédéric Sallée est docteur en histoire de l'université de Grenoble-Alpes. Spécialiste de l'Allemagne nazie et de ses représentations, il est membre associé au laboratoire universitaire Histoire Cultures Italie Europe (LUHCIE).
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Réflexions sur la Révolution de février
Alexandre Soljenitsyne
- Fayard
- Litterature Etrangere
- 7 Novembre 2007
- 9782213635354
Ces quatre courts essais ont été écrits dans les années 1980-1983 et devaient servir de conclusion à chacun des quatre volumes de Mars 1917, troisième et avant-dernier noeud de la Roue rouge. Mais après mûre réflexion, l'auteur a renoncé à les inclure dans l'épopée pour ne pas influencer le lecteur et sauvegarder la perspective d'ouverture propre à tout récit littéraire, où tout reste possible.
Dans ces essais, publiés pour la première fois dans la revue Moskva en 1995, et écrits avec une concision et une virulence dignes de ses meilleures textes publicistiques, Alexandre Soljénitsyne analyse le caractère paradoxal de la révolution de Février : elle a déterminé les destinées historiques non seulement de la Russie, mais du monde entier, et cependant elle s'est produite sans cause apparente, sans la participation des révolutionnaires, principalement grâce à l'incurie et à l'inertie du pouvoir. La monarchie multiséculaire s'est effondrée en trois jours sans y être poussée par des forces adverses. -
Propagande et persécution ; la résistance et le "problème juif" ; 1940-1944
Renée Poznanski
- Fayard
- 21 Mai 2008
- 9782213635705
Les dits - et les non-dits - de la propagande développée par la Résistance nous mènent au plus profond de l'imaginaire social de la France de l'Occupation. Dans la guerre du verbe entre les Français de Londres - émissions de la BBC renforcée par la presse clandestine - et la voix officielle de Vichy, l'enjeu était de séduire une opinion qui au début avait soutenu Pétain avec ferveur.
Quant aux juifs, ils ont subi presque tout de suite les effets d'une double persécution, l'une pilotée par Vichy, l'autre imposée par les Allemands. À la marginalisation à laquelle les procédures d'exclusion les acculèrent se superposèrent bientôt pour beaucoup l'internement puis la déportation vers un inconnu terrifiant. Des explications circonstanciées en même temps qu'un tapage haineux précédèrent et accompagnèrent chacune des étapes de leur calvaire. En face, la propagande de la Résistance a parfois mené et souvent esquivé la bataille sur ce front dans une guerre des mots.
Aucune étude d'ampleur ne s'était encore penchée attentivement sur la façon dont la Résistance s'est exprimée sur les persécutions antisémites en France et/ou sur le sort des Juifs déportés à l'Est. Comparer les publications des organisations juives, les émissions de Londres et la presse des mouvements montre que l'ignorance invoquée (a posteriori) sur le sort promis aux Juifs n'explique rien ; c'est dans les priorités des uns ou des autres que se trouve la clé des thèmes avancés, des expressions ambiguës ou des silences obstinés. Pour la première fois est examiné ici - force citations à l'appui - ce qui a contribué à en fixer l'échelle dans les médias de l'époque - collaborateurs ou résistants, autorisés, tolérés ou clandestins, radiophoniques ou écrits. Ces choix de propagande, mis en regard des études d'opinion circulant dans les milieux résistants, jettent une lumière crue sur la place qu'occupa « le Juif » dans l'imaginaire de la société française, comme dans l'esprit des élites en lutte contre l'occupation nazie.
En cela, ce livre apporte aussi une contribution majeure à l'histoire de l'antisémitisme et à celle de la Résistance.
Professeur de science politique à l'université Ben Gourion à Beer Sheva (Israël) où elle est titulaire de la chaire Yaacov and Poria Avnon d'étude de l'Holocauste, Renée Poznanski a édité le Journal de Jacques Biélinky (1992) et est l'auteur de Les Juifs en France pendant la Seconde Guerre mondiale (« Pluriel », 2005). -
La France conteste ; de 1600 à nos jours
Charles Tilly
- Fayard
- Espace Du Politique
- 26 Février 1986
- 9782213015767
De 1600 à nos jours, la France n'a jamais cessé de connaître, avec une intensité variable selon les époques, des agitations populaires. Charles Tilly s'est attaché à restituer dans toute son ampleur l'histoire de ces groupements de personnes agissant ensemble, réunies par des griefs et des espoirs communs, défendant des intérêts partagés. Ces actions collectives ont leur propre histoire, puisque les mots d'ordre changent, les capacités d'agir évoluent, les moyens de l'action se transforment et que les possibilités de s'organiser ne se présentent pas toujours. L'histoire de la contestation est donc une histoire discontinue. A priori, il n'est rien de semblable entre le Lanturlu de février 1630 à Dijon, violente émeute antifiscale, les manifestations ouvrières répétées de la Nation à la République, les défilés étudiants de mai 68, ou les saccages des préfectures aujourd'hui par les agriculteurs.Pourtant, l'étude de la contestation a tôt fait de révéler que les actions collectives, si elles ne se répètent pas à l'identique sur des siècles, répètent néanmoins pendant de longues périodes des signes, des pratiques, des formes d'organisation définies. Elles puisent à un répertoire selon les groupes, les lieux et les époques _ 1848 marquant en ce domaine une rupture décisive. La contestation, c'est donc la conjugaison d'intérêts, d'une occasion, d'une organisation et d'une action.Pour autant, ces quatre éléments fondamentaux, s'ils sont nécessaires, ne suffisent pas à expliquer, ni par un lieu précis, ni par une population particulière, ni même par un événement spécifique, pourquoi la France a contesté. Charles Tilly livre ici le secret de cette alchimie sociale. Ecrire l'histoire des actions collectives en France depuis le XVIIe siècle, c'est simplement répondre à la question: comment la formation de l'Etat et le développement du capitalisme ont-ils influencé les modalités de l'action _ et de l'inaction _ collective des gens du commun?Charles Tilly, professeur d'histoire et de sociologie à la New School for Social Research, est notamment l'auteur d'un ouvrage désormais classique, La Vendée (Paris, trad. française Fayard, 1970).
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Le siècle des Platter Tome 1 ; le mendiant et le professeur
Emmanuel Le Roy Ladurie
- Fayard
- Divers Histoire
- 25 Janvier 1995
- 9782213014449
Peut-on rêver plus beau _ et plus rare _ corpus de textes que les écrits autobiographiques de trois générations d'hommes du XVIe siècle (1499-1628), plus belle étude de cas aussi de l'apparition d'une dynastie de la bourgeoisie urbaine caractéristique des sociétés d'Ancien Régime?Au commencement est le père, Thomas Platter, dit le Vieux (1499-1582), petit berger misérable du Valais qui va tenter sa chance comme mendiant itinérant dans une partie de l'Europe germanique puis à Bâle. Il y est ouvrier cordier et bientôt devient un authentique intellectuel sur le mode humaniste: l'ancien illettré est un professeur renommé de latin, de grec et d'hébreu. Mieux encore, il s'établit comme patron imprimeur dans une ville très tôt et largement (mais avec modération) passée à la Réforme: c'est de ses presses que sortira la première édition latine de l'Institution chrétienne de Calvin en 1536. Assez à l'aise pour acquérir un domaine à la campagne, il peut aussi payer à son fils (né en 1536) des études de médecine à Montpellier, université très réputée en ce domaine, et lui offrir une pérégrination (à cheval, alors que lui-même circulait à pied dans sa jeunesse) en France et dans certaines contrées circonvoisines _ une sorte de voyage initiatique. Investissement judicieux: Felix Platter, " médecin de ville " à Bâle, brûle les étapes. Le voilà professeur de médecine, doyen, recteur, auteur de livres médicaux et de physique, nouant des liens avec le réformateur David Joris comme avec Montaigne. Il épouse la fille d'un grand chirurgien bâlois. Le praticien est à présent un patricien.L'histoire ne s'arrête pas là. Sur le tard, à près de soixante-dix ans, en 1574, Thomas a, d'une seconde femme, un autre fils (prénommé Thomas également), qui représente en quelque sorte la troisième génération _ il sera élevé en partie par son aîné. Thomas II lui aussi voyage, lui aussi embrasse la carrière médicale, lui aussi racontera certains épisodes de sa vie.A eux trois, les Platter traversent en tous sens le temps et l'espace de l'Europe de la Renaissance, de la Réforme et du Baroque. Leurs souvenirs et les informations recueillies par ailleurs jettent sur leurs personnalités et sur le monde dans lequel ils se meuvent une lumière incomparable. Acteurs (et bénéficiaires) d'une ascension sociale remarquable (le mendiant a fait de son fils un grand professeur et un médecin des princes), nés dans l'Europe rhénane (l'un des foyers les plus novateurs de la civilisation du temps), voyageurs, écrivains, collectionneurs, ces protestants répondent pleinement au portrait de l'homme de la première époque moderne.Comment l'historien aux mille curiosités qu'est Emmanuel Le Roy Ladurie _ l'analyste attentif de la vie des habitants de Montaillou au XIVe siècle, le chercheur qui a décrit l'histoire du climat depuis l'an mil, le spécialiste des paysans du Languedoc et l'évocateur du Carnaval de Romans, l'auteur de deux des cinq volumes d'une ample Histoire de France _ aurait-il résisté à la fascination exercée par cette famille? A partir des récits qu'elle a laissés, il dresse avec verve, à travers ses trois héros, une chronique pittoresque et savante de treize décennies durant lesquelles l'Europe du Moyen Age a donné naissance au Grand Siècle.Professeur au Collège de France, administrateur général de la Bibliothèque nationale (1987-1994), Emmanuel Le Roy Ladurie est membre de l'Institut (Académie des sciences morales et politiques).
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Deux acteurs initiaux: une France sûre de son indentité nationale et de sa place en Europe et une Prusse ambitieuse, confiante dans son armée et brûlant de réaliser l'unité politique de l'espace allemand. Le conflit débute entre deux Etats et s'achève entre deux nations: une France vaincue, diminuée et humiliée, une Allemagne nouvelle, victorieuse, s'affirmant en Europe et bientôt dans le monde.Les événements militaires se sont déroulés exclusivement sur le sol français. Conduite par Moltke, l'armée prusso-allemande remporte des victoires éclatantes. Elle mène une guerre de mouvement jusqu'à Orléans, Tours, Dijon, Le Mans, Rouen. Elle assiège Metz, Paris, Belfort. Après cent trente-deux jours de blocus, Paris capitule, vaincu par la famine et la puissance du feu adverse.Pourquoi la France a-t-elle été battue? Pourquoi l'Allemagne a-t-elle gagné? Difficiles questions auxquelles un recul suffisant et un examen serré des sources permettent d'apporter des réponses plus nuancées que celles des contemporains.Jusqu'en 1914, 1870 est restée la guerre par excellence, celle qui a fourni les références et influencé les comportements. Les Français sont émus par l'héroïsme des cuirassiers de Reichshoffen, ils détestent les Prussiens coiffés de casques à pointe, les sinistres uhlans et le traître Bazaine; ils rêvent de la revanche pour reprendre l'Alsace-Lorraine. Les Allemands sont fiers des victoires " inoubliables " de Saint-Privat et de Sedan. Ils idéalisent Bismarck, Moltke et Guillaume Ier, les héros fondateurs. Au coeur de l'Allemagne nouvelle est installé un pouvoir militaire incontrôlé, puissance redoutable qui se prétend le garant des intérêts du Reich. La victoire allemande de 1870 est comme la matrice des deux guerres mondiales.Né en 1936, professeur d'histoire contemporaine à l'université de Nancy, François Roth travaille sur l'histoire des XIXe et XXe siècles et sur les relations franco-allemandes. Rédacteur en chef des Annales de l'Est, il a publié, entre autres, Les Lorrains entre la France et l'Allemagne et La Lorraine annexée, 1870-1918.