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Al Manar
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Depuis L'Algérie des contes et légendes (2 003), de livre en livre, d'album en album (tel déjà le petit Théâtre du Prince tisserand), Nora Aceval ne cesse de nous montrer à quel point la littérature orale est à l'image de cette femme sage, qui sait si bien faire du neuf avec du vieux. Ce conte aurait ma préférence, tant ces paroles parlent à chacune, à chacun, aux divers âges de la vie.
Il n'est que de feuilleter, de glaner, de voir ici une belle-mère de prime abord aimante, là une épouse déterminée à améliorer son sort ou une autre, prête à garder le silence pour y mieux parvenir le moment venu : partout la patience est mise à l'oeuvre du temps.
(...) Bien loin du fracas médiatique, la parole conteuse allie ici la sobriété et l'élégance, la vivacité du dialogue et la rythmicité de la pensée. Sans parti pris idéologique, ni dogmatisme, Nora Aceval, par la magie de son style, nous ouvre un océan de formules sapientiales (proverbes, hadiths, sourates du Coran), certaines en traduction, avec des références précises, comme précieuses balises. Laissons se dérouler ce Tapis chatoyant où s'amuser de tel ou tel personnage, de telle ou telle variante, de tel ou tel motif (par exemple ce gargotier cannibale ici, que l'on pourrait trouver ailleurs fabricant de savon) : un lieu de ressourcement où respirer en toute confiance et liberté.
Nadine Decourt
anthropologue et comparatiste
spécialiste de littérature orale -
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Dans ces "Contes libertins du Maghreb", les maris jaloux ou naïfs n'ont pas disparu, ni les femmes lubriques jusque dans la grande vieillesse, ni les épouses volages, ni les ruses pour tromper un mari surveillant, ni les talebs duplices ou les faux talebs... Les situations sont souvent cocasses, les récits facétieux, ironiques. Nombreux sont les contes où des pratiques sexuelles illicites, condamnées par la loi coranique, sont déclinées par les femmes qui racontent, sodomie, homosexualité, inceste, zoophilie, âne, ânesse, singe, chamelle... autant de bêtes, familières sur les Hauts Plateaux et dans les contes grivois. Le ton des conteuses n'est pas moralisateur, il dit l'imaginaire comme s'il s'agissait du réel quotidien, domestique, une sorte d'initiation à la vie même.
On entend Nora conter, la grâce rieuse de ses gestes, l'humour et la malice des femmes des Hauts Plateaux, ses complices
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La « Science des femmes et de l'amour » dont il s'agit ici trouve son origine dans les contes que les femmes du Maghreb aiment à raconter entre elles. Elle est, pour l'essentiel, puisée à la source des contes populaires d'Algérie, et plus précisément dans le corpus parti- culier des contes réservés aux adultes. Y sont mis en scène des maris ivres de jalousie et immanquablement trompés, des amantes amou- reuses, des épouses naïves... le tout, orchestré par une gent féminine rouée comme il se doit !
Le beau prince de ces contes, sorte de Shahrazade au masculin, est lancé dans une série d'aventures et de découvertes étonnantes. Il parcourt de lointaines contrées, livré aux facéties de l'amour et du hasard. Chacune de ses rencontres est une promesse, mais aucune ne lui livre l'absolu du « secret des alcôves ». ..
Emporté par un tourbillon d'histoires aux senteurs orientales, le prince finira-t-il par découvrir la science des femmes ? Laquelle de ces belles lui fournira la clé du savoir ultime qui lui permettra d'accéder au royaume de ses ancêtres ?
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Poèmes d'amour et de combat contre l'obscurantisme intégriste.
Je suis né entre une mosquée et un cimetière
Les morts d'un côté et Dieu de l'autre
A la fin je les confondais
Je prenais la mosquée pour une épouvante
Et Dieu pour une tombe
Je rêve de me livrer pieds et poings liés
A une langue inconnue
Dont je ne connaîtrais aucune syllabe.
Je rêve de devenir, imperméable, réfractaire aux mots
Pour vivre juste de mes yeux
Et me dire que la seule langue étrangère, c'est la vie. -
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De la matière autant que du sens
James Sacré, Mustapha Belkouch
- Al Manar
- 12 Janvier 2023
- 9782364263116
Recueil de texte poétiques sur les rapports poésie-peinture, à partir de l'oeuvre du peintre graveur marocain Mustapha Belkouch.
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« Nous avons redressé la tête pour voir passer au-dessus de nous une volée de corbeaux dont la multitude masquait en bonne partie le ciel. Ils étaient si nombreux que c'en était oppressant. Battant des ailes dans un même ondoiement, unis en un silence impressionnant, les oiseaux noirs se dirigeaient vers la colline et le moutonnement de ses bois. Ils se fondirent bientôt dans la distance à la masse confuse des arbres.»
Cinq nouvelles d'une inquiétante étrangeté poétique. -
Le sort de la Palestine et son important apport à l'histoire de l'humanité nous interpelle et nous demande d'être vigilants contre la piraterie massive qui cherche injustement à dérober non seulement la terre de la Palestine, mais aussi son histoire. La partie n'est pas perdue, car la Palestine et son patrimoine sont défendus par son peuple et par tous les êtres humains qui croient en la justice.
Cet ouvrage s'est efforcé de mettre en valeur la contribution de la Palestine dans le domaine de la vigne et du vin à l'échelle mondiale.
Renouer aujourd'hui avec cette histoire plusieurs fois millénaire a une importance symbolique, car le vin est un donneur de plaisir, et un excellent ambassadeur pour nous raconter la Palestine. Le vin avec sa force de partage, d'amour et de convivialité nous ramènera un jour vers la justice et la paix. -
Je viens à toi
De Majel Bel Abbes El Hencha Sufetula
Kairawan Hadrumète Tacape et Taparura
Les palmeraies soeurs des neiges
Les forêts amies des dunes
Les steppes complices des mines
Et la mer dans les bras de mes rivages
Aussi larges que tes vallées
Je rassemble
Cascades colonnes et arcades
Dômes bassins et dalles
Roses du désert marbres et granites
Leurs échos dans les mizmars et tambours
Portés par les caravanes chargées de ton sel
Ce n'est pas un mirage que je vois là-bas
Mais le miroitement de tes frontières
Qui m'appellent
Dirais-je au Fort génois de veiller sur les îles
Les troglodytes sont à l'abri -
Recueil de vers et de proses poétiques d'un lyrisme intense, qui gardent l'empreinte d'une enfance passée au contact intime de la nature.
De grandes herbes sèches achèvent les labours. La belette y est chez elle, l'oseille rouge y tient refuge et se confie à l'automne. Les mésanges tissent la lumière, ou bien les fleurs mêlées, leur saveur à pleine bouche leur ciel piqueté de rose. Elles sont venues comme la première neige, inattendues, là soudain jaillies avec le chant du merle...
Il a suffi d'un instant au soleil pour offrir comme par mégarde un trésor au bas-côté des routes. -
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De temps à autre
surgissant du fond des ténèbres intérieures
tel visage telle voix
dont le temps a échoué à corrompre
tout à fait le précieux souvenir
s'extrait de la sphère des êtres disparus
pour s'inviter à revivre un instant en nous dans nos pensées qu'un souffle
déplace en tourbillonnants flocons de poussière avant de les amalgamer à l'onde
de la grande lumière du dehors -
Le feu a embrasé la Palestine en mai 2021 avec une même rage : destituer vainqueurs et vaincus.
« Le vieil homme » est décliné ici en sept langues pour porter à la lumière la blessure qui fonde notre humaine condition et tracer un chemin dans le désordre du monde, cet archipel de brutalité. -
La pluie a recommencé de tomber sur la ville flamande et j'ai ouvert le parapluie que l'on m'avait prêté au Reylof, le matin, avant que je monte dans le minibus pour le gymnase du groupe scolaire. Un parapluie rouge comme la robe de la Vierge, ce rouge absolu né pour le théâtre, que le théâtre attendait comme une amoureuse attend,
accoudée au rebord de sa fenêtre, l'arrivée de son fiancé. Et les vitraux aussi, à cet instant, ont rougi ! Eux, si bleus dans le soir, si bleus sous le ciel bas et l'unique rayon du soleil pâle qui l'avait l'espace de quelques secondes percé, si obstinément bleus et dont le passage au noir l'autre matin n'aura été, me suis-je dit, qu'une impression infondée car cette fois, c'est indiscutablement de l'intérieur que semblait provenir la coloration des losanges de verre, comme rougissent de l'intérieur, sous sa peau diaphane, les joues de l'amoureuse lorsqu'enfin, après un long moment de rêverie, de tension et de crainte, arrive sous sa fenêtre l'élu de son coeur.
(...) -
Il se passe quelque chose
Un bruissement comme celui du feuillage
Un frémissement
Pourtant le silence est toujours là
Familier et amical
Entendez-vous ?
Nous entendez-vous ?
L'un contre l'autre
Coeur contre coeur. -
Amour et zénitude, par un poète citoyen du monde.
naissance à l'aube
les amants perdent espoir
le monde s'essouffle à naître
éclôt le geste s'inspire la voix
l'encre comme tente
le qalam comme témoin -
...
Mon vers est fait je ne sais de quoi
Je le transmettrai à celui
Qui le transmettra à quelqu'un d'autre
Là-bas vers l'Anjou
Pour qu'il me transmette de son étui
La contre-clef.
Guilhem de Peiteus
Ma peinture ne représente rien non plus, mais elle fait
sens pour le regardeur qui en a « la contre-clef ».
Pierre Soulages -
On ne rêve pas.
La nuit s'écrit presque sans nous,
une phrase en boule qui comble les cavités des incertitudes.
On jurerait que les mots ont des yeux, des mains et un corps,
puisqu'on pourrait trembler. -
Recueil poétique bilingue portugais / français.
La poésie transforme, reconfigure sur une base onirique les données de l'expérience amoureuse dans tout ce qu'elle ne permet pas ou ce
qui nous échappe. Cet aveu se répercute dans Chams : « vinha o remoinho/e tudo levava/a cega visão/em nuvens de areia » (« le tourbillon venait/et il emportait tout/ l'aveugle vision/en nuages de sable »). Chams surgit inondée de lumière, telle une apparition venue d'un lieu transcendant. Son premier visage a quelque chose d'angélique ; il transmet la douceur, le réconfort : « (em doces mãos/guardavas o mel/que lume tão brando/aquecia a pele) » (« (en de tendres mains/tu gardais le miel/car si douce lumière/réchauffait la peau) »). Mais il révèle en même temps un pouvoir magique, hyperbolique : « que tudo cegava » (« qui aveuglait toute chose »). Et la cécité, qui provient d'un excès de lumière, engendre la « femme fatale », vibratile et simple des quatrains qui suivent la présentation initiale composée de trois premiers groupes formés chacun de trois quatrains.(...)
(postface de José Manuel de Vasconcelos) -
Ordre & désordre des êtres : géographie d'une personne
Hassan Wahbi, Bouchaïb Maoual
- Al Manar
- 6 Juin 2024
- 9782364263994
Ne plus voyager dans le monde
laisser venir à sa fenêtre
quelques oiseaux de lumière.
Nulle demeure absolue
rien que le silence vivant
comme dernière langue à apprendre. -
Un été en vrac raconte que vivre n'est qu'une affaire de style. Shéhérazade, la narratrice par excellence, ne serait pas loin de cautionner cette idée, qui a toujours hanté les écrivains à la première personne, ceux qui préfèrent distiller la magie du rêve dans le seul enfermement qui vaille, le langage. Des silhouettes traversent la scène. Parfois elles sont en direct, mais souvent ce sont des ombres suscitées par une écriture en abyme.
Le narrateur renouvelle son pacte avec les pavés résignés de son quartier et il compatit avec les arbres dociles des squares. Guettant toutes sortes de rencontres, de réminiscences réelles ou imaginaires, il les couche sur une des feuilles volantes qu'il disperse aux quatre vents.