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Le recueil de lettres présenté ici pour la première fois dans leur continuité chronologique offre plusieurs aspects intéressants.
Il s'agit en effet d'un corpus documentaire rare en ce qui concerne Paoli, puisque, grâce à Boswell, nous avons la correspondance active et passive du chef corse. Elle nous éclaire un peu plus sur la dernière décennie du premier exil à Londres de Paoli, et sur l'identité des personnalités éminentes qu'il connaissait. Cette correspondance, qui se déroule sur une durée de quinze ans, est aussi la chronique d'une fidélité.
Paoli, reconnaissant envers l'écrivain écossais qui s'est engagé à défendre la cause corse à un moment crucial, prodigue inlassablement à son ami conseils, consolation et encouragements quant à Boswell, il met son coeur à nu, et de ce fait, sa personnalité acquiert consistance et profondeur. Boswell en effet met bas le masque du boute-en-train mondain et superficiel, pour révéler son anxiété existentielle : il souffre du mal de vivre non seulement parce qu'il a l'impression de s'étioler à Edimbourg " dans une obscurité provinciale ", mais parce qu'il est tourmenté par des interrogations métaphysiques lancinantes.
En dernière analyse, il est frappant de constater la permanence du rêve de Corse dans l'imaginaire de Boswell, au point même qu'il ne parvient pas à comprendre le retournement politique effectué par son ami corse en 1790. Jusqu'au bout, quelques mois seulement avant sa mort, Boswell justifie le surnom que lui avait valu l'éclatant succès littéraire de sa Relation de l'Île de Corse et mémoires de Pascal Paoli, c'est-à-dire " Corsica Boswell ".
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Couvent d'Orezza, 1773. Un jeune moine franciscain, Giuseppe Grimaldi di Rapaggio, compose une longue et belle Description d'Orezza. Ce qui frappe à la lecture de ce texte, inscrit dans une tradition ancienne et même antique, c'est une connaissance particulièrement fine d'une grande pieve de la Castagniccia. Se réclamant de la muse Clio, fille de Mnémosyne, fra Giuseppe connaît tous les hameaux, tous les chemins et tous les sentiers, les cours d'eau, toutes les églises et toutes les chapelles, ruinées, romanes ou baroquisées pour la plupart au cours du XVIIIe siècle, toutes les montagnes aussi. Dans la Description d'Orezza, comment ne pas voir s'enchevêtrer univers géographique et sensible d'une part, univers mental et imaginaire imprégné de culture savante et historique d'autre part ? Cet ouvrage est une recherche de première main qui s'appuie sur des matériaux rares, souvent inédits, et dont l'analyse montre la portée évocatrice et symbolique bien au-delà de leur localisation.
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Quatre ans de captivité en Corse
Joseph Rink, Pere Caspar
- Alain Piazzola
- 29 Juillet 2017
- 9782364790605
Le 24 août 1914, un bateau espagnol en route pour Gênes fait escale dans le port de Marseille. Les passagers de nationalité ennemie en âge de porter les armes sont arrêtés. Ils passeront la durée de la guerre dans différents camps de prisonniers, quelques semaines d'abord au large de Marseille, puis des années en Corse. Parmi eux se trouvaient deux religieux allemands, Joseph Rink (1878-1945), un théologien prussien, et le Père Caspar (1877-1926), un moine bavarois, qui ont publié à leur retour le récit de leur captivité.
Ces témoignages oubliés, qui n'avaient encore jamais été traduits en français, nous plongent dans l'ambiance de l'époque, mais du côté des prisonniers « ennemis », alors que d'habitude nous ne voyons la Grande Guerre que par la lorgnette tricolore. Comme les auteurs sont d'inoffensifs religieux pris dans la nasse, et qu'en plus ils sont détenus loin du front, il ne s'agit pas de récits guerriers et haineux mais de la description vive et animée du quotidien dans les camps où le moindre évènement fait fluctuer le moral.
Le livre contient en outre de belles évocations de la Corse du début du siècle passé et de son mode de vie d'alors.
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Journal militaire de la campagne en Corse du prince Louis de Wurtemberg en 1732
Anonyme
- Alain Piazzola
- 15 Janvier 2016
- 9782364790452
Ce document rapporte les événements survenus en Corse lors de la deuxième intervention impériale : celle du prince Louis de Wurtemberg en Corse en 1732. La première intervention s'étant déroulée en 1731, s'était soldée par un échec cuisant. Ce journal a été tenu par un membre du corps expéditionnaire, probablement officier dans l'artillerie. Le point de vue est celui des troupes de l'Empereur Charles VI d'Autriche : il ne s'encombre pas du droit des peuples et affiche la nécessité d'une intervention s'agissant d'une île en rébellion contre le pouvoir reconnu internationalement, celui de la République de Gênes, alliée de l'Empereur et dont le domaine est garanti par celui-ci ; mais aussi, comme l'affirme le manuscrit, parce que Charles VI voit derrière les mouvements dans l'île l'inspiration des Bourbons espagnols et français.
Ajoutons que ce manuscrit possède une iconographie remarquable et pratiquement unique. Les représentations connues de la Corse sont quasi exclusivement urbaines et le plus souvent liées à un édifice remarquable ou à des travaux à effectuer. La vue du campement des troupes qui débarquent à Calvi, les vues de Belgodere, Montemaggiore, Calenzana, Corte, Bastia. et surtout une grande carte dépliante reproduite en fin d'ouvrage, nous font découvrir une iconographie qui est demeurée inédite jusqu'à ce jour.