À la fameuse question « Pensez-vous qu'on peut rire de tout ? », François Morel répond à sa façon : « Oui, mais on n'est pas obligé. » Quand un auditeur l'aborde gentiment pour lui dire : « Je ne rate jamais une de vos chroniques », il répond : « Moi, hélas, ça m'arrive... » Ainsi parle l'auteur des centaines de textes savoureux rassemblés dans ce volume, qui, depuis septembre 2009, continue à réjouir chaque semaine des millions d'auditeurs de France Inter. En partant du principe que l'humour est un ingrédient et non une discipline, il nous amène à réfléchir en nous amusant, réussit à nous émouvoir en nous bousculant, qu'il s'agisse de nous donner des nouvelles du Bon Dieu ou du cardiologue d'Alain Finkielkraut. Il n'hésite pas non plus à flirter avec l'impertinence et la causticité lorsqu'il écrit une lettre à son papa avant un grand rendez-vous électoral ou qu'il fait la liste d'un certain nombre de personnalités qui ont fait la France sans porter un prénom d'origine française. Courageux, François Morel ? Non, réplique-t-il, pas spécialement. Mais « libre » oui.
Qu'il se fasse poète en rendant un hommage félon à Jean Dutourd en alexandrins ou qu'il s'interroge sur la capacité de Francis Lalanne à déchaîner les passions, Morel croque l'époque dans ce qu'elle a de pire et parfois de meilleur, en quelques phrases ciselées avec un sens inimitable de la satire tranquille. Et c'est encela que François Morel nous est indispensable !
Qui aurait pu penser que l'antisémitisme puisse aujourd'hui relever la tête ? Sous couvert de défendre de nouveaux damnés de la terre, une certaine gauche passée à l'ennemi réactive l'antique théorie du bouc émissaire et désigne les Juifs et Israël comme les causes de toute négativité. Un rabbin et un philosophe se proposent de penser, l'un à partir de son judaïsme, l'autre de sa chrétienté sans Dieu, ce qu'il en est de Dieu, de son existence ou non, de sa responsabilité ou non dans le mal, mais surtout la nécessité de l'herméneutique juive et de la symbolique chrétienne pour fonder et conduire un dialogue, qui semble devenir la chose du monde la moins partagée.
M.O.
Si « l'antisémitisme renaît de ses cendres ? pardon !, de nos cendres » (Herbert Pagani), c'est peut-être en raison de l'assignation identitaire qui gagne. En eff et, pourquoi les Juifs, éternelles victimes expiatoires, échapperaient-ils à cette tentation mortifère de réduire l'autre à l'idée souvent fantasmée que l'on se fait de lui ? Là n'est pas le moindre des paradoxes d'un monde d'hypercommunication où l'on ne dialogue qu'avec celui qui nous ressemble. Pouvait-on imaginer un fossé plus large que celui qui sépare un croyant d'un athée, dépositaires de traditions de pensée si diff érentes ? Contre toute attente, un authentique échange s'est établi entre eux et s'est progressivement tissé autour d'un objet de questionnement, Dieu, qui semblait les vouer à ne jamais se rencontrer.
M.A.
S'il y a un peintre français qui, par son seul génie, a bouleversé le monde entier, c'est bien Édouard Manet.
Depuis l'enfance, j'aime ses oeuvres, ses noirs, ses ivoires, ses énigmes, ses amoureuses. La violence extrême qu'il a suscitée est inimaginable aujourd'hui. Je vous propose une balade personnelle et intime dans sa vie.
Ado, j'avais trois idoles : lui, Jacques Monory, le peintre des meurtres bleus, et Led Zeppelin. Vous allez les retrouver ainsi que des conversations sur le bel Édouard avec Koons, Barceló, Longo, Condo, Tabouret, Lavier, Yan Pei-Ming, Traquandi, Mivekannin et ceux qui font l'art vivant.
Je ne suis pas historien, ce qui me permet de convoquer des surprises dans le secret des ateliers : Picasso, Warhol, De Niro père et fils, Hockney, Visconti, César, Niki de Saint Phalle, La Casa de Papel, Laurence des Cars, Bourdieu, la maladie brutale, le journalisme, mes parents, modestes marchands de tableaux et ceux du monde entier...
Notre Hitchcock de la peinture a inventé l'art moderne pour le reste de la planète. Il adorait la vie et il a fini, presque paralysé, par peindre des fleurs déchirantes. Étant passé tout proche du ravin rejoindre mon père, je me suis autorisé ce roman vrai avec des reproductions magnifiques.
Édouard Manet a vécu la mort aux trousses en revenant tout jeune du Brésil, à cause de la syphilis qui l'a tué à 51 ans. Comme Baudelaire à 46 ans. Il lui ferma les yeux.
Il repose au cimetière de Passy, à Paris. Il incarne la preuve que l'art contemporain n'existe pas car le Déjeuner sur l'herbe est vivant pour l'éternité.
Partout.
Et si le propre de l'Homme n'était pas le rire, le langage ou l'aspiration à l'éternité, mais son pouvoir de destruction ? Dérèglement climatique, hausse des températures, montée des eaux, pandémies... nous allons droit à la catastrophe.
Le responsable de cette catastrophe est l'humanité elle-même. À force de grandir et de recouvrir toute la surface de la Terre, elle se comporte comme un cerveau géant et surpuissant, doté d'une infinité de connexions.
C'est ce cerveau qui prélève des ressources sur la Terre, produit des millions de SUV et de smartphones, fait travailler les humains sans relâche et recrache des milliards de tonnes de CO2 dans l'atmosphère. Mais à quoi pense cet organe ? A-t-il des désirs ? Des émotions ? Quels sont ses plans ?
Dans Human Psycho, Sébastien Bohler adopte une démarche clinique pour analyser le cerveau global qu'est devenue l'humanité, comme un psy le ferait avec son patient.
Le constat qu'il livre est glaçant : ce cerveau possède les traits caractéristiques d'un psychopathe. Il coche toutes les cases du profil psychologique d'un serial killer qui massacre sa victime - la planète.
Alors, peut-on le soigner ? Tel est le questionnement ultime de cet ouvrage, qui nous emmène sur une crête étroite entre néant et espoir.
Souvenez-vous. Les ferrets de la reine Anne d'Autriche, le duc de Buckingham, les perfidies de Richelieu, le siège de La Rochelle. Et, vingt ans après, l'autre cardinal, la Fronde, l'Angleterre de Cromwell, l'exécution de Charles 1er...
Cette Histoire-là est inoubliable. Elle reste dans nos mémoires, revivifiée pour l'éternité par la présence des héros d'Alexandre Dumas, ces trois mousquetaires qui sont quatre - " tous pour un, un pour tous " -, par la magie de ces romans où vibrent, à l'infini, dans le fracas des chevauchées et des épées, la fougue de la jeunesse, le goût de l'aventure, la force de l'amitié, la nostalgie du temps qui passe, la mort qui rôde, aussi, portée par les vents contraires des grands événements.
C'est le théâtre qui avait fait d'abord la gloire de Dumas. On découvrira ici La Jeunesse des mousquetaires qu'il adapta pour la scène en 1849.
Edgar Morin, dont on vient de fêter le centième anniversaire avec grand éclat, est la dernière des grandes figures intellectuelles de notre temps. Sa parole continue de faire autorité. Tout autant que sa pensée, c'est sa longue destinée qu'il évoque ici avec son amie Laure Adler dans cet ultime témoignage qui a valeur de testament.
Ce livre est le fruit d'une longue complicité intellectuelle qui a fait de Laure Adler une interlocutrice privilégiée d'Edgar Morin. Au cours de ces échanges réguliers poursuivis jusqu'à ces derniers mois, ils font ensemble le tour de la vie du philosophe, de ses engagements, de ses rencontres.
Ils évoquent son enfance marquée par la mort de sa mère, ses relations, entre autres, avec Marguerite Duras et François Mitterrand dans le cadre de la Résistance, autour de ce qu'il appelle " la communauté de la rue Saint-Benoît ", brossant d'eux un portrait très personnel. Il revient sur son engagement au sein du Parti communiste, puis durant la guerre d'Algérie, sur Mai-68 et le conflit israélo- palestinien, parmi les innombrables thèmes d'actualité qui ont alimenté sa réflexion et ses prises de position.
Tout a intéressé, passionné, mobilisé Edgar Morin dans cette époque complexe et tourmentée qui se confond avec l'histoire de son existence. L'idée européenne, le défi écologique, la création artistique dans son ensemble, le sujet migratoire, le racisme et l'antisémitisme, le rôle et le devoir des intellectuels en période de crise, en particulier à l'heure du Covid.
Sur tous ces sujets, Edgar Morin livre à Laure Adler l'analyse, le point de vue d'un sage plein d'acuité et capable d'autocritique. Les multiples reflets d'une pensée sans cesse en mouvement chez cet intellectuel que Laure Adler présente comme "?un baroudeur du savoir?", en perpétuel vagabondage à?travers toutes les disciplines. "?Un anti-maître à penser?" auprès de qui elle nous invite à puiser à notre tour des leçons d'optimisme et de vitalité.
C'est l'histoire d'un gamin du passage de Choiseul, écolier à Diepholz et à Karlsruhe, étudiant à Broadstairs, apprenti chez Lacloche, puis soldat, aventurier, médecin. Né dans un petit monde égoïste où la misère régnait, Louis Destouches (1894-1961) a grandi comme un chien fou et dans la solitude. Il a fait le plein des images de son enfance et de sa jeunesse, à l'affût des malheurs au-devant desquels il se précipitait pour mieux s'étonner ensuite de les avoir reçus comme des paquets de mer, en pleine figure. Revenu de la Grande Guerre mutilé dans sa chair et halluciné par l'horreur, Louis Destouches eut encore à découvrir la vanité de la souffrance et de la mort qui avaient été les compagnes de ses vingt ans. Il se plut ensuite à se raconter et comme il avait le génie de l'expression verbale, il écrivit comme on parle, au prix d'un labeur formidable, toujours fidèle à sa musique personnelle et sans jamais tempérer un besoin irrésistible de voir, de comprendre, d'enlaidir et de délirer, mais aussi de rire au plus fort de ses détresses.
« J'ai grandi à Oran, une ville inondée de soleil, que j'ai plus tard appris à aimer. Adolescent, je ne rêvais que d'en partir. Quitter cette Algérie française sans horizon. Vivre à Paris. Voyager. Le journalisme, où je m'engageai par hasard, fut un moyen inespéré d'assouvir ma curiosité.
J'ai été témoin, parfois acteur, des bouleversements vertigineux qu'ont connu la France et le monde. Combat pour l'émancipation des femmes, prémices de l'écologie, révolutions technologiques. J'ai parcouru une planète longtemps coupée en deux par la guerre froide. Aujourd'hui, de puissants antagonismes continuent de la traverser, tandis que nous basculons dans une nouvelle époque.
J'ai interrogé des écrivains, des artistes, de grands dirigeants français et étrangers. Je les ai vus dans le doute, le désarroi, toujours dans la solitude du pouvoir et de la création. J'ai admiré leur courage et senti leur obsession de laisser une trace. Ces rives de la mémoire sont aussi peuplées de celles et ceux qui ont le plus compté pour moi tout au long de ce périple. » J-P. Elkabbach.
Mark Twain (1835-1910) a fait rire le monde entier par ses aphorismes et ses contes depuis La Célèbre Grenouille sauteuse de Calaveras County, dont il trouve l'anecdote dans un camp de chercheurs d'or de Californie en 1865. Il y aurait quelque paresse intellectuelle à se contenter de la célébrité que lui ont value ses contes et d'oublier les romans, fruits d'une expérience acquise au cours d'une existence tumultueuse et variée : apprenti typographe, journaliste, pilote pendant quatre ans sur le Mississipi, éphémère officier de l'armée sudite, pionnier du Far-West, chercheur d'or, directeur de journal, imprimeur, éditeur, voyageur, polémiste, moraliste. Si l'on retrouve l'humour sarcastique de La Célèbre Grenouille sauteuse dans les romans Wilson Tête-de-Mou et Les Jumeaux extraordinaires (1894), ou l'aplomb de l'Américain qui ne s'en laisse pas conter dans Un Yankee à la cour du roi Arthur (1887), on découvre un conteur tendre et presque féérique dans Le Prince et le Pauvre (1881). Mais c'est le cycle des aventures de Tom Sawyer (1876-1896), l'enfant indiscipliné et aventureux, et de son ami Huckleberry Finn, petit clodo sympathique, qui a consacré Mark Twain comme le père fondateur du roman américain moderne.
Nombreux sont les écrivains à la vie aventureuse et passionnante. Cependant, aucune oeuvre française n'a suscité autant de scandales ni donné lieu à des fêtes aussi mémorables. Molière met à l'honneur des thèmes sulfureux : la mondanité dans Les Précieuses ridicules, le « féminisme » dans L'École des femmes, l'impiété dans Tartuffe, le libertinage dans Dom Juan... Devenu très rapidement le comédien-dramaturge favori de Louis XIV, plusieurs de ses pièces, et notamment les grandes comédies-ballets, seront créées et rejouées lors des divertissements royaux dont elles seront le clou (c'est Molière qui, avec la complicité de Lully, a inventé Broadway !), et l'histoire de leurs premières fourmille d'anecdotes savoureuses : La Princesse d'Élide lors des fêtes des Plaisirs de l'Île enchantée et Georges Dandin à Versailles ; Monsieur de Pourceaugnac à Chambord ; Les Amants magnifiques à Saint-Germain-en-Laye ; Le Bourgeois gentilhomme à Chambord ; Psyché au palais des Tuileries, etc.
En 1643, âgé d'à peine vingt et un ans, Molière fonde avec la comédienne Madeleine Béjart la troupe de l'Illustre Théâtre. Deux ans plus tard, incapable d'honorer ses dettes, Molière s'enfuit de Paris pour voyager en province et, chemin faisant, obtient la protection de Monsieur, frère du Roi. En 1658, la troupe débute devant la cour. Les créations se succèdent alors sous la protection de Louis XIV : c'est le théâtre sous toutes ses formes, de l'impromptu au spectacle total que sera la comédie-ballet, désormais au centre des divertissements royaux du Roi-Soleil.
Les notices d'introduction de chaque pièce font la part belle aux événements (succès, scandales, censures) qui ont ponctué leurs représentations. Mises bout à bout, elles forment le passionnant feuilleton de l'aventure de la compagnie la plus célèbre du théâtre français. Mais aussi de la vie de Molière, formidable stratège en « médiatisation », et qui, plus d'une fois, parvint à faire du roi son complice. Une histoire littéraire rivée à l'histoire du règne de Louis XIV.
La France n'est pas ingouvernable, comme il est beaucoup dit faussement ces temps-ci, elle est ingouvernée ? si l'on me permet ce néologisme. Et elle est ingouvernée parce que la dilution de la souveraineté du pays dans le condominium européiste depuis Maastricht a privé la Nation de toute puissance. Le traité de 1992, obtenu de justesse malgré une immense propagande d'État, a retourné la souveraineté contre elle-même afin de décider souverainement de la fin de la souveraineté. Ce fut un suicide. En renonçant à sa souveraineté, la France a perdu la puissance, elle a gagné en décadence. Ce fut un contrat social invaginé. La Nation ne décide plus du destin d'un peuple, c'est une Commission non élue qui gouverne à sa place. L'État ne sert plus qu'à museler un peuple désormais de trop. Je ne crois pas à l'homme providentiel qui abolirait cette abolition. Mais je crois au peuple providentiel qui peut décider que le nihilisme ne passera pas par lui. Puissance et Décadence offre le mode d'emploi de cette résistance.
Les civilisations naissent, croissent, vivent, connaissent un temps de puissance, décroissent, chutent, tombent et disparaissent avant d'être remplacées par d'autres. Les plus lucides le savent, les plus intellectuellement encrassés le nient.
Notre civilisation judéo-chrétienne est en phase terminale. Il est politiquement sot et niais, sinon dangereux, de prétendre redonner de la santé et de la vitalité à un centenaire subclaquant. N'importe quel médecin promettant de remettre sur pied un vieillard cacochyme passerait illico pour un charlatan. Mais pour une civilisation, les vendeurs d'illusion font toujours florès.
Ce deuxième volume de La Nef des fous est le journal voltairien, au jour le jour, de cet inévitable naufrage. On y trouve tous les délires de notre fin de millénaire wokiste désireux de faire du passé table rase...
M.O.
Observatrice hors pair des moeurs politiques françaises depuis plus de quarante ans, portraitiste d'une acuité implacable, mordante et drôle, Catherine Nay a côtoyé les principaux acteurs de cette période - la plus romanesque de la Ve République après la grande épopée gaullienne - et recueilli leurs témoignages.
Précédé d'une préface inédite, ce volume rassemble pour la première fois quatre grandes enquêtes, au style vif et enlevé, qui relatent, sur scène et dans les coulisses, les mille rebondissements de ce grand théâtre du pouvoir. Dans les rôles principaux : Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Chirac, François Mitterrand, Édouard Balladur et Nicolas Sarkozy. Rivalités, trahisons, coups d'éclat, déchirements, comédies... tous les ingrédients sont là pour créer une dramaturgie digne des meilleures séries télévisées.
Dans La Double Méprise, Catherine Nay raconte l'histoire d'un couple improbable, celui du président de la République Valéry Giscard d'Estaing et de son Premier ministre, Jacques Chirac.
Le Noir et le Rouge est consacré aux multiples facettes de François Mitterrand, personnalité aussi complexe que controversée.
La journaliste a été la première à éclairer des parts d'ombre liées à sa jeunesse et à sa vie privée, dévoilant ainsi les ressorts cachés de l'homme et de sa destinée. Le Dauphin et le Régent retrace les péripéties d'une « amitié de 30 ans » entre deux figures, Édouard Balladur et Jacques Chirac, que l'expérience des responsabilités, le goût de l'ambition et le jeu des entourages vont détruire sans merci. Dans Un pouvoir nommé désir, Catherine Nay évoque enfin l'ascension politique la plus spectaculaire de ces quarante dernières années : celle de Nicolas Sarkozy, qui aura consacré toute son énergie à la conquête du pouvoir, envers et contre tous.
Des monstres sacrés que l'on retrouve avec d'autant plus de plaisir et de nostalgie qu'ils n'ont guère d'équivalents aujourd'hui.
Après avoir vécu un épisode douloureux, Mara, désemparée, fuit en direction de la mer, laissant toute sa vie derrière elle. Elle arrive dans une station balnéaire en fin de saison. La ville se vide et Mara traîne sa solitude et son chagrin dans les rues désertes et sur les plages oubliées. Elle survit. Lorsque l'argent vient à manquer, elle trouve un job dans une des rares boutiques restées ouvertes. Les mois passent, le quotidien se pose et, tandis qu'elle effleure de nouveau une certaine forme de joie, le passé la rattrape.
Mélange singulier d'intimité et de pudeur, Marées brosse un puissant portrait de femme, dans un style sensuel et imagé. Sara Freeman signe un premier roman d'une grande poésie, largement salué par la critique américaine.
Que dire à des jeunes de vingt ans pour leur conduite dans ce monde qui part à la dérive ? La civilisation s'effondre, les valeurs s'inversent, la culture se rétrécit comme une peau de chagrin, les livres comptent moins que les écrans, l'école n'apprend plus à penser mais à obéir au politiquement correct, la famille explosée, décomposée, recomposée se retrouve souvent composée d'ayants droit égotistes et narcissiques.
De nouveaux repères surgissent, qui contredisent les anciens : le racisme revient sous forme de racialisme, la phallocratie sous prétexte de néo-féminisme, l'antisémitisme sous couvert d'antisionisme, le fascisme sous des allures de progressisme, le nihilisme sous les atours de la modernité, l'antispécisme et le transhumanisme passent pour des humanismes alors que l'un et l'autre travaillent à la mort de l'homme, l'écologisme se pare des plumes anticapitalistes bien qu'il soit le navire amiral du capital - il y a de quoi perdre pied.
J'ai rédigé une série de lettres à cette jeune génération pour lui raconter les racines culturelles de notre époque : elles ont pour sujet la moraline, le néo-féminisme, le décolonialisme, l'islamo-gauchisme, l'antifascisme, la déresponsabilisation, la créolisation, l'antisémitisme, l'écologisme, l'art contemporain, le transhumanisme, l'antispécisme.
L'une d'elles explique en quoi consiste l'art d'être français : d'abord ne pas être dupe, ensuite porter haut l'héritage du libre examen de Montaigne, du rationalisme de Descartes, de l'hédonisme de Rabelais, de l'ironie de Voltaire, de l'esprit de finesse de Marivaux, de la politique de Hugo.
Arrivé à l'âge de quatre-vingts ans, au moment où il s'y attendait le moins... un homme se trouve confronté tout à coup à une réalité qui, peut-être, s'appelle la vieillesse. Pris de court, il s'interroge : pour certains, c'est un des plus beaux moments de l'existence ; pour d'autres, celui où l'on commence à perdre ses clés, ses lunettes, ses cheveux et le fil de la conversation. L'auteur décide d'en avoir le coeur net.
Considérant que cette avancée en âge pourrait être la période sereine des réponses enfin trouvées, il nous livre avec humour sa vérité sur l'homme qu'il est, ou plutôt qu'il croyait être et qu'il ne sera peut-être jamais. Vaste programme...
Spécialiste des présocratiques, ces « philosophes » du Ve siècle avant J.-C. que Martin Heidegger désigne comme l'aurore de la pensée, Barbara Cassin raconte l'histoire de la philosophie en s'appuyant sur les sophistes, ces autres maîtres en culture et en démocratie.
Ce volume réunit des textes devenus souvent introuvables, des traductions - de Gorgias en particulier - et des ouvrages intégraux, parmi lesquels Parménide, la langue de l'être ?, Aristote, la décision du sens. Tous structurés autour d'une trame qui fait de cet ouvrage une oeuvre à part entière.
Sa rencontre avec René Char et Martin Heidegger a conduit Barbara Cassin à repenser le rapport entre philosophie et poésie. Que peut le langage, peut-on fabriquer le monde aussi avec des mots ? Et que nous apprend la diversité des langues à l'heure du mauvais anglais mondialisé qui raccourcit la pensée ?
L'Antiquité qu'explore Barbara Cassin est aussi d'une grande actualité. Elle ouvre sur le « peuple arc-en-ciel » et la commission Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud, sur la psychanalyse ou le rapport entre sens et non-sens chez Freud et Lacan, sur la définition de la culture et de la démocratie avec Google-moi, sur l'hospitalité et la barbarie avec La Nostalgie. Elle livre les clefs du Dictionnaire des intraduisibles avec Plus d'une langue. Et partout, qu'il s'agisse de la toute première Initiation à l'explication de texte ou du récent Avec le plus petit et plus inapparent des corps, l'oeuvre de Barbara Cassin témoigne de cet amour du langage et de l'écriture qui ne requiert aucun savoir préalable et ne se laisse enfermer dans aucune discipline.
Stefan Zweig, romancier et essayiste, était aussi un grand biographe, admirateur des artistes et des intellectuels, passé maître dans l'art de déchiffrer l'énigme de leurs vies et de leurs oeuvres. Ce livre rassemble dix-neuf textes, en bonne partie inédits, qui illustrent son talent de portraitiste, exercice de style qu'il accomplit en écrivain virtuose et psychologue raffiné. Autant de reflets de l'éclectisme, du cosmopolitisme et de l'humanisme de leur auteur. Dante, Tolstoï, Byron, E.T.A. Hoffmann, Nietzsche, Walt Whitman ou Cicéron côtoient des figures de son époque : le sculpteur Constantin Meunier, l'écrivain Max Brod, le dramaturge Frank Wedekind ou le compositeur Ferruccio Busoni.
Si les portraits de Zweig restent attachants même un siècle après avoir été écrits, c'est grâce à leur façon inimitable d'éclairer en quelques pages le sens d'une destinée et, avec elle, une personnalité tout entière. Zweig exhume comme personne le passé enfoui et peint avec le même talent les visages qu'il a connus. À travers ses maîtres ou ses proches, il nous livre une partie de son art et définit également son esthétique et sa morale. Ses portraits sont autant de paysages de l'âme qui dévoilent une part du mystère de sa condition humaine.
En voyage, je vis, je respire, je cherche l'aventure. Je rencontre des êtres qui savent tenir une conversation, je croise quelques ennuis, je cueille une vision, je pousse une porte, je me sors d'un pas désagréable. Je traverse une forêt, je parle à un homme que je ne connais pas et lui confie davantage de choses que s'il était mon frère, parce que je suis sûr de ne pas le revoir.
L'énergie vagabonde, c'est la traversée de l'éphémère, perpétuellement renouvelé.L'énergie vagabonde consiste à faire moisson d'idées dans les collines inspirées. Un jour, les notes deviennent un livre. Aujourd'hui, ces livres sont rassemblés dans ce recueil.
Il contient les récits de mes voyages à pied, à cheval, à bicyclette, dans les piémonts du Caucase, les steppes de l'Asie centrale, les taïgas de Sibérie, les plaines de Mongolie et de Russie, et sur le plateau du Tibet. Cette géographie a aimanté mon corps. Là-bas, les ciels aspirent le regard, les horizons reculent : on n'a pas de scrupules à tirer des bords en pareils parages ! Je joins à ces textes le souvenir de mes virées à moto sur les routes du Nouveau et de l'Ancien Monde, de mes bivouacs et de mes ascensions. À ces récits de promenades plus ou moins contrôlées, j'ai ajouté des reportages en des contrées lointaines où les hommes vivent des existences plus dangereuses que la mienne ainsi que certaines pages de mes journaux, tenus dans l'espoir de donner un ordre à ces agitations.
Je crois aux vertus de la tangente et de l'échappée.
Puisse l'énergie vagabonde ne jamais se tarir !
Sylvain Tesson.
Textes courts, instantanés littéraires... Tous les recueils rassemblés dans ce second volume de «La collection» Bouquins ont leur singularité, et chacun des textes de chacun des recueils peut se lire séparément. Pourtant, au-delà de cette fractalisation apparente, ou grâce à elle, je vois bien en les rapprochant ainsi qu'ils constituent un tout, une manière globale de regarder la vie et d'essayer de la traduire. Imposer ce genre, a priori peu vendable, un peu plus que la poésie mais infiniment moins que le roman et même la nouvelle, fut le fruit d'une longue patience, qui ne me coûta guère, pénétré que j'étais de l'idée que c'était cela que je voulais faire. Les points communs entre tous ces titres ? Une proposition de partage des sensations et des comportements, qui accompagnait paradoxalement l'effort pour les dire de la façon la plus personnelle possible. La diversité de la vie même, la pastèque ou la pluie de mars, croquer un navet ou dire oui au coiffeur. Des sujets qui n'étaient pas des sujets mais qui le devenaient, la gageure était là. Trouver l'aiguille la plus mince, la plus infime, se dire que c'est seulement ainsi qu'elle pourra pénétrer profondément la peau de mes semblables. Se dire que dans un atome de neige il y a toute la neige.
Philippe Delerm.
Ce volume contient : Le Bonheur - La Sieste assassinée - Enregistrements pirates - Le Trottoir au soleil - Les Eaux troubles du mojito - Ma grand-mère avait les mêmes - Je vais passer pour un vieux con - Et vous avez-eu beau temps ? - Dickens, barbe à papa - La Tranchée d'Arenberg - L'Extase du selfie - Rouen - Les Mots que j'aime - La Vie en relief - C'est bien - C'est toujours bien - C'est trop bien.
Une nuit, à Rome, dans une bibliothèque de livres rares, le journaliste Jean-Baptiste Malet découvre par hasard un ouvrage de 1913 présentant les plans d'une cité colossale appelée à devenir la capitale du monde. Glorifiant la mondialisation des échanges, cette ville promet d'écrire une nouvelle page de l'histoire de l'humanité en réunissant l'élite scientifique, intellectuelle, sportive et spirituelle de toutes les nations. Fasciné par cette utopie, Jean-Baptiste Malet se lance dans une enquête de plusieurs années afin d'en percer les secrets.
La Capitale de l'Humanité raconte l'histoire méconnue du Centre mondial de communication, une cité idéale conçue à l'aube du XXe siècle par deux artistes américains établis à Rome, Olivia et Hendrik Andersen, et dessinée par l'architecte français Ernest Hébrard. Soutenu par des prix Nobel de la paix, des monarques, des philanthropes, et de grands journaux tels que le New York Times et L'Illustration, ce rêve grandiose connut un succès planétaire à la veille de la première guerre mondiale. Et une seconde vie au temps du fascisme italien.
Tour de force d'investigation, ce récit reconstitue les aventures des créateurs de cette capitale du monde, tout en nous plongeant dans les milieux pacifistes de la Belle Époque. Il nous rappelle aussi combien leurs luttes et leurs espoirs ont façonné le monde contemporain.
Jean-Baptiste Malet est journaliste et auteur d'enquêtes au long cours. Lauréat du prix Albert-Londres pour L'Empire de l'or rouge (Fayard, 2017), une enquête mondiale traduite en 8 langues consacrée à l'industrie de la tomate, il a également infiltré un entrepôt logistique d'Amazon afin de publier En Amazonie (Fayard, 2013).
Des décennies après son départ, la narratrice, une romancière de renom, revient dans le village qui l'a vue naître. Dès son arrivée, elle est en butte à l'hostilité des villageois qui l'accusent d'avoir sali dans ses livres leur réputation et leurs familles.
Tandis qu'elle retrouve les visages, les lieux et les odeurs de son enfance, son histoire la submerge. Lui revient en mémoire son passé, et un terrible secret de famille si longtemps gardé refait surface. Encouragée par la parole, testamentaire de son maître spirituel et auteur du Prophète Khalil Gibran, dont l'ombre plane sur le village, elle veut dévoiler l'indicible, s'en affranchir et rendre justice.
Réalité et fiction se mêlent dans ce roman dense, incisif et fascinant. D'une plume aussi tranchante que poétique, Yasmine Ghata parvient à créer une ambiance sensuelle et envoûtante, et révèle au lecteur la force libératrice de la littérature.
Ce dictionnaire, d'une ampleur et d'une ambition sans équivalent, rassemble, sous la direction de Jean-Claude Monod, les éléments d'une pensée et d'une vie qui se trouvèrent au point de convergence, et parfois de friction, de nombreuses disciplines - philosophie, anthropologie, linguistique, sociologie, mythologie comparée, histoire de l'art, poétique... - et de plusieurs continents - Europe, Amériques du Sud et du Nord, Asie... L'oeuvre de Claude Lévi-Strauss transforma en profondeur non seulement les sciences sociales du xxe siècle, mais le regard que nos sociétés portent sur « les autres », d'abord sur ces peuples qu'on appela longtemps - avant Lévi-Strauss, justement - « primitifs » et, par là, sur nous-mêmes.
L'ouvrage parcourt l'intégralité des livres du grand anthropologue, les concepts qu'il a marqués de son empreinte, et nous éclaire aussi sur les rencontres qui ont été déterminantes dans son existence intellectuelle et personnelle. Sa vie est traitée comme un « fait biographique total » où les noms des maîtres et des collaborateurs, des lieux et des textes, des peuples et des notions sont autant d'entrées vers une oeuvre-monde.
Riche de multiples contributions françaises et étrangères, ce volume montre combien la pensée de Lévi-Strauss est animée par une quête de « sagesse » pratique visant à réformer notre civilisation et à réorienter le cours de nos sociétés. Ses réflexions engagent non seulement une idée de l'humanité - dans son unité et ses différences, dans ses liens vitaux avec la nature -, mais une conscience aiguë des conditions précaires de sa survie.