Filtrer
Support
Éditeurs
Prix
Viviane Hamy
-
L'enfance d'Eszter, pauvre et frustrante, la hante. Sa famille tente de survivre dans une Hongrie rurale au quotidien difficile. Eszter monnaye ses services, s'occupe de l'intendance de la maison tandis qu'Angela, sa voisine, riche et entourée d'amour, évolue dans un « paradis ». On lui a même offert un faon ! Rongée par la jalousie, Eszter échafaude un plan qui brisera ce bonheur trop parfait. Des années plus tard, elle est une actrice au sommet de son art, indépendante mais seule. Elle rencontre l'amour. Pourtant, un jour, elle découvre que l'homme qu'elle aime est marié à Angela. La rancoeur la conduit à tout détruire de nouveau. Magda Szabó distille la jalousie, goutte à goutte, dans un monologue intense et désespéré.
-
Dans sa maison de la campagne hongroise, la vieille Mme Szocs attend qu'on vienne la chercher pour aller à l'hôpital : son mari est en train de mourir. Sur place, le vieux Vince, inconscient, ne la reconnaît pas, et sa dernière phrase semble destinée à sa fille trop aimée, Iza. Iza, héroïne de cette histoire d'amour, d'incompréhension et de désespoir. Une fois le père enterré, Iza emmène sa mère à Budapest, dans son appartement, pour qu'elle soient ensemble, à la grande joie de la vieille dame. Iza va tout préparer à la perfection, faire le tri entre les meubles à garder et ceux à abandonner, elle va arranger une chambre pour sa mère de manière parfaite, sans lui demander ni son avis ni ses envies : elle va lui offrir une vie où elle peut se « reposer », où elle ne pourra que se reposer. Bien sûr, à Budapest, les draps usés et amoureusement raccommodés n'ont pas leur place, il y en a des neufs, les vieux costumes de Vince n'ont rien à faire dans les placards de la capitale, la bonne Terez fait impeccablement le ménage et la cuisine, quant à Kapitany, le vieux Kapitany, a-t-on idée de vouloir emmener un lapin dans un appartement ? Petit à petit, la fragile vieille dame se pétrifie dans le mutisme et la non-existence dans laquelle sa fille l'enferme sans même s'en rendre compte, jusqu'au jour où elle décide de retourner au village pour faire élever une stèle sur la tombe de son mari. Les personnages qui gravitent autour d'Iza et de sa mère, Antal - l'ex-mari d'Iza - Lidia, l'infirmière si douce et généreuse, Domokos, l'amant d'Iza, apparaissent comme en flash-back, en noir et blanc très contrastés pour faire ressortir la beauté d'Iza en même temps que sa froideur, sa terrible incapacité à s'oublier et à donner, véritablement donner.
-
« L'occupation se mit en place presque instantanément, avec la facilité d'une loi naturelle. Ce qui explique peut-être que la ville ne connut guère la panique. Au début, les habitants restèrent chez eux ; la plupart des administrations chômèrent, et les épiceries ouvrirent tardivement leurs portes. L'essentiel avait eu lieu pendant que la ville dormait, et les habitants, surpris, s'accommodaient du nouvel état de choses comme un malade qui revient à lui après une anesthésie et qui apprend qu'on l'a déjà opéré et qu'il ne lui reste plus qu'à s'habituer à vivre sans ses jambes. » Lors de la Seconde Guerre mondiale, le Grand Reich envahit le royaume de Cédric X. Longtemps, lui et ses sujets vont accepter l'humiliation jusqu'au jour où les Juifs sont tenus de porter l'étoile jaune...
-
Budapest. Juillet 1919. Les « Rouges » de Béla Kun ont perdu. Une ère nouvelle débute pour la bourgeoisie. Seule Mme Vizy, la femme du haut fonctionnaire Kornél Vizy, est obsédée par tout autre chose : Anna, la bonne promise par le concierge, viendra-t-elle ? Enfin Anna paraît :
« Alors commença pour eux une existence idyllique dont ils sentaient en permanence le goût dans la bouche. Non, ils n'étaient pas victimes d'un mirage surpassant leur imagination. L'impossible s'était réalisé ; ils avaient mis la main sur la bonne, la vraie, celle dont ils avaient rêvé. » Pourtant, la bonne idéale, la domestique inégalée que tout le quartier Krisztina envie aux Vizy, assassinera ses maîtres au cours d'une nuit, transperçant leurs corps de neuf coups de couteau.
Pourquoi ? La meurtrière elle-même ne saura répondre à la question. Le procès n'apportera aucune réponse. Kosztolányi, dont on a dit qu'il était le plus grand écrivain hongrois du XXe siècle, nous laisse seuls juges de l'acte d'Anna, Anna la bonne, Anna la douce
-
« Il est des livres qu'on sirote sans se presser, en modérant volontairement les signes d'impatience de l'index qui froisse les pages, comme si on voulait en préserver le parfum le plus longtemps possible. Le Traducteur cleptomane a le bonheur de faire partie de ces ouvrages-là. » Le Journal de Charleroi (Belgique).
« L'humour de Kosztolányi fait des ravages dans ces récits tranchants comme des rasoirs : l'avant-dernier, qui raconte les tribulations d'un chapeau melon, est un petit chef-d'oeuvre de dérision chaplinesque. Kafka chez Ubu... » - André Clavel, L'Événement du jeudi « Ne mourez pas avant d'avoir lu ces nouvelles ! » - Florence Lorrain, Librairie Atout-Livre (Paris XII)
-
« C'était la mort et non le sexe, le secret dont les grandes personnes parlaient en chuchotant, et sur lequel on aurait bien voulu en apprendre davantage. » Cet uppercut à la mâchoire, c'est la première phrase de Refus de témoigner.
Il est difficile de dire l' « indocilité » du récit dont Ruth Klüger nous fait ici l'abrupt et magnifique présent. Martin Walser ne s'y est pas trompé en commentant ainsi - à la Radio Bavaroise - sa parution en 1992 : « La précision du style, qui met en doute le témoignage de la mémoire, ne nous permet pas de nous dédouaner par la compassion. Je ne crois pas qu'on puisse lire ce livre sans se sentir provoqué... Chaque lecteur devra y répondre avec sa propre histoire. »
-
Un jour de 1936, Frigyes Karinthy, assis au Café Central, entend démarrer un train. Il n'y a pas de gare aux environs. C'est le premier symptôme de sa maladie, une tumeur au cerveau, et la première scène de Voyage autour de mon crâne que Karinthy écrira après avoir subi l'ablation de cette tumeur dans une clinique de Stockholm.
-
Alouette doit partir une semaine à la campagne ! Ses vieux parents achèvent amoureusement la valise. Comment vont-ils survivre à une si longue absence ? Quand Alouette paraît, le sourire se fige. Elle a trente-cinq ans. Elle est laide. Très laide.
Cette semaine sera la semaine de tous les possibles.
Mais Alouette revient. Grossie, encore plus laide, encore plus grotesque. Tout rentre dans l'ordre. Et les parents, émus, soupireront : « À tire-d'aile notre petit oiseau nous est revenu ».
Alouette est un des classiques incontestés de la littérature hongroise, et Kosztolányi le considérait comme son plus grand roman.
Traduction de Maurice Regnaut et Ádám Péter.
-
Juin 1940 « C'était le temps où ils étaient corrects, qui précéda le temps où ils donnèrent des leçons de politesse. » Ainsi débute le récit de ces 33 jours d'exode sur la route de Paris à Saint-Amour, dans le Jura. Il aura fallu attendre cinquante ans pour découvrir ce « grand livre » dont parle Saint-Exupéry dans Pilote de guerre, cinquante ans pour avoir accès à ce précieux témoignage d'un spectateur «engagé » sur l'un des épisodes les plus douloureux de notre histoire.
-
Je ne plaisante jamais avec l'humour : telle était la devise que Frigyes Karinthy aimait énoncer haut et fort. Ce recueil de quarante nouvelles - écrites entre 1912 et 1934 -, de presque « sketchs », met en avant ici la « petitesse » de l'être humain confronté à la « grandeur » de l'administration, là les préoccupations quotidiennes et mesquines de tout un chacun. Ou encore les questions existentielles et métaphysiques de l'Homme, les paradoxes du quotidien... D'une modernité impressionnante, ces histoires trouvent encore leur écho dans notre XXIe siècle. Karinthy sublime le banal en proposant des tableaux où la chute n'est pas celle attendue, avec un humour aussi corrosif que celui du Dictateur de Charlie Chaplin ou, plus proche de nous, celui de Pierre Desproges. Une fois la lecture terminée : vous serez assurément réconciliés avec vous-mêmes !
-
Gazdanov, comme des milliers de ses compatriotes en 1920, s'exile et se retrouve l'observateur fasciné et horrifié des bas-fonds parisiens. Au volant de son taxi, toutes les nuits, il parcourt le labyrinthe des rues de la capitale et de sa banlieue, en même temps que celui de sa mémoire. S'élabore ainsi une géographie où s'entrecroisent les destins d'individus qui n'auraient jamais dû se rencontrer. Apparaissent les figures, tragiques et comiques à la fois, de Raldi, la courtisane déchue, de Fédortchenko, l'ouvrier russe content de son sort et de Vassiliev, son âme damnée, de Suzanne à la dent d'or et de Platon enfin, l'ivrogne philosophe, qui est comme le récitant de cette histoire. Cette conduite nocturne, qui accuse les ombres et les lumières des âmes, vibre de nostalgie et d'une espérance ample comme un printemps russe.
-
Quinze ans après Refus de Témoigner, Ruth Klüger donne à lire ici le récit de sa vie, celle d'une petite Viennoise juive déportée à onze ans, échappée d'Auschwitz, avec sa mère, à seize ans, exilée aux États-Unis par nécessité, où elle est devenue adulte. Cette femme s'installe dans un pays neuf, et se confronte au « quotidien » complexe et ambigu des années 1950. Ruth Klüger appartient à cette génération des femmes qui ont dû se battre pour l'« égalité » dans tous les domaines : mariage, maternité, vie professionnelle... Elle analyse les relations qu'elle entretient avec les personnes (parents, amis, collègues), avec les lieux (les villes où elle a habité aux États-Unis), ses séjours dans diverses villes d'Allemagne, ses retours à Vienne, sa ville natale, lieu de tous les malaises. Le fil rouge est la discrimination constante, ressentie sans jamais parvenir à déterminer si elle la concerne en tant que « Femme » ou en tant que « Juive ». Ruth Klüger analyse, débat avec elle-même et avec les autres ; que garde-t-on, que refoule-t-on de ce que l'on a vécu ? Quels sont les mécanismes si complexes de la mémoire individuelle et de l'attitude collective envers les horreurs du passé et leurs victimes, leurs auteurs et leurs témoins ? Compte-rendu et accusation - énoncés avec un humour « klügerien » - se recoupent sans délimitation. Ce qui de prime abord peut faire l'effet d'une susceptibilité excessive au moindre manquement impressionne l'instant d'après par une lumineuse exigence d'équité. Et tout le récit submerge le lecteur par cette sincérité d'une intelligence souveraine, aux antipodes de toute paranoïa, qui est le cadeau qu'offre la générosité exceptionnelle d'une femme exceptionnelle. (Dans le livre, les poèmes sont traduits de l'allemand par Jean-Léon Muller).
-
Mémoires du capitan Alonso de Contreras
Alonso de Contreras
- Viviane Hamy
- Bis
- 20 Février 2020
- 9791097417598
"Je naquis en la noble ville de Madrid le 6 janvier 1582. Je fus baptisé en la paroisse de San Miguel ; mes parrain et marraine furent Alonso de Roa et Maria de Roa, frère et soeur de ma mère. Mes parents se nommaient Gabriel Guillén et Juana de Roa et Contreras. Je voulus prendre le nom de ma mère lorsque j'allai servir le Roi, étant enfant, et quand je m'aperçus de l'erreur que j'avais commise, je ne la pus réparer parce que dans mes états de services il y avait "Contreras".
J'ai vécu jusques aujourd'hui et suis connu sous ce nom, et nonobstant qu'au baptême on m'ait appelé Alonso de Guillén, moi, je m'appelle Alonso de Contreras." Les Mémoires du capitan Alonso de Contreras, découverts à la fin du XIXe, sont un splendide et captivant récit d'aventures, vécues sur terre et sur mer par un capitaine de l'ordre de Malte au début du XVIIe siècle. Il nous raconte la guerre des galères en Méditerranée, les abordages entre les galions espagnols et les corsaires anglais, sans oublier les expéditions sous le soleil des côtes barbaresques.
Alonso de Contreras a séduit, de son vivant, Lope de Vega qui lui dédia sa pièce Le Roi sans royaume.
-
« Une année j'interviewai tant d'assassins que je pus aller passer un mois de vacances au bord de la mer. Ce fut après avoir piqué du haut d'un rocher que je sentis l'eau pénétrer dans mon oreille. Ce fut si violent qu'il me sembla qu'un projectile passait violemment dans l'oreille et s'arrêtait au beau milieu de ma tête ». Werth va apprécier sa maladie comme un gourmet une nouvelle saveur. Les souffrances, il les goûte avec délectation. Il la quittera même avec regret : « Je ne sais plus lire le blanc. »
-
Quand Martine Fauré meurt, son fils quitte Paris pour passer le mois d'août en Provence, chez un ami. La rencontre avec la forêt, ses senteurs, sa lumière, son immuabilité et son silence vivants fait pressentir à Pierre - cet homme simple, comptable dans une petite entreprise - un royaume insoupçonné où le temps, l'espace et les sensations sont souverains. « Marie », surgie comme un mauvais rêve sur le pas de sa porte, achève de le convaincre que sa vie est ailleurs ; depuis ce jour de l'été 1940 où on l'a ramassée sur le bord d'une route, « Marie » a rompu avec l'humain et n'est plus qu'un « pauvre animal malade ». Des mois durant, Pierre s'acharne à sortir la jeune femme de l'enfer où elle a sombré. Et le miracle se produit : le refus du désespoir et la foi en la vie de Pierre Fauré réussissent là où la science s'était déclarée impuissante. « Marie / Anne » renoue avec son humanité, avec sa mémoire, avec son passé. Quant à l'avenir...
-
Dans un pays et un temps indéterminés, le lieutenant Livius fait l'objet d'une mutation inattendue vers une lointaine forteresse dans la montagne, quinze jours avant d'être démobilisé. Arrivé sur place, il apprend que « vu l'extrême importance stratégique du secteur, son temps de service est prolongé sans limite. » Dans cette forteresse, rien ne se passe comme ailleurs : même le règlement militaire fonctionne autrement. C'est un univers à part, absurde et paranoïde, celui d'hommes accrochés à leur passé et à leurs certitudes, qui ne savent rien de leur situation, sinon qu'ils doivent obéir à un Ordre énigmatique. Quant à l'ennemi, prétendument tapi dans la forêt, de l'autre côté du torrent, le doute plane fortement sur sa réalité... Sélectionné en 2002 sur la dernière liste du prix Femina, célébré par de nombreux critiques, La Forteresse est une entreprise grandiose où rôde l'ombre de très grands écrivains tels que Kafka, Buzatti et Gracq.
-
Veille du bac, début du XXe siècle. Vili Liszner excelle dans la course à pied mais guère en géométrie. Antal Novak enseigne les mathématiques avec foi et enthousiasme, et ne peut, en dépit de sa bonté et de sa compréhension, accorder l'examen à l'adolescent. Les cancres recalés sont dangereux la nuit, et complotent contre le professeur, déjà abattu par la fuite de sa fille avec son amant.
-
_ Pourquoi Napoléon a-t-il fait de l'abeille l'emblème de l'Empire ? La question obsède Pasolini, l'apiculteur elbois, convaincu que l'esprit de la ruche a inspiré au grand Corse ses plus belles batailles. Lorsqu'en mai 1814, le souverain déchu arrive sur l'île, l'émotion est à son comble. Alors que le rendez-vous est pris entre les deux hommes, on découvre qu'une Société Bonapartiste, déterminée à libérer l'Italie, voit en Napoléon son homme providentiel. Dans cette atmosphère étouffante, où Pasolini devient fou à force d'attendre la rencontre de sa vie, l'empereur d'Elbe ne rêve que d'un retour triomphal sur le devant de la scène européenne... _ On est le témoin à la fois des conflits intérieurs de Napoléon, des obsessions de Pasolini et du plaisir joyeux et pervers du narrateur. L'Apiculteur de Bonaparte est un récit à plusieurs voix qui s'inscrit dans les marges de l'Histoire, et qui émerveille par son intelligence et sa langue froide et sensuelle au pouvoir hypnotique. _ José Luis de Juan est né à Majorque en 1956. Il est juriste, spécialiste des relations internationales. Il collabore régulièrement au quotidien El Pais.
-
Ce livre n'existe que dans la collection bIs Chacune des nouvelles de Cygnes noirs est une fenêtre ouverte sur la destinée de Russes exilés que l'auteur a côtoyés, perdus de vue ou retrouvés. L'exil a redistribué les cartes sans pitié : les grandes aristocrates sont devenues femmes de chambre, les anciens professeurs d'université, ouvriers d'usine ; Gazdanov lui-même se retrouve chauffeur de taxi... Ces histoires, tour à tour graves, ou ironiques, se télescopent. Elles parlent de personnages qui ne sont plus que l'ombre d'eux-mêmes, mais au plus près de choix existentiels. Avec un regard distancié mais profondément humaniste, l'auteur les rend attachants. Dans un clair-obscur du Paris de l'Occupation à la lumineuse Côte d'Azur, Gazdanov parcourt sans fin les souvenirs et cueille les hommes face à leur destin. Il pose la lancinante question de la liberté, y compris face à la mort. Peut-on choisir sa fin ou doit-on l'accepter ? Le lecteur sera fasciné par les allers-retours entre passé et présent, entre rêve et réalité, et se laissera hypnotiser par l'écriture d'un des plus grands auteurs russes du XXe siècle. Ce recueil comprend quatre nouvelles, parues à des moments très différents de la vie de Gaïto Gazdanov. Elles se répondent. Au fil du temps, l'inspiration française y est toujours plus marquée. Elles ont été réunies et préfacées avec brio par Elena Balzamo, traductrice et spécialiste de Gaïto Gazdanov. Comment ne pas se réjouir que soit découvert un nouveau pan de l'oeuvre d'un auteur que ses contemporains n'avaient pas hésité à comparer à Camus ou à Proust ?
-
Libotz, le bouc émissaire, ne parvient pas à sauver son ami Askanius du désastre déclenché par le procureur Tjärne, pas plus qu'il ne parvient à se faire accepter dans la petite ville de province. Il part, il « supporte les coups du destin, l'un après l'autre, sans laisser s'éteindre son espoir tout ensanglanté ». Sven Stolpe, le biographe de Strindberg, a écrit que Le Bouc émissaire était « l'un des plus grands récits jamais écrits en langue suédoise, qu'il n'avait pas été surpassé par la suite, ni même égalé».
-
Léon Werth part en Cochinchine en 1925. Il a déjà publié Clavel soldat dont l'antimilitarisme fit scandale lors de sa parution en 1919. Son récit est imprégné de l'émerveillement de celui qui rencontre un univers étranger, et qui se délecte de cette étrangeté. Il s'immerge dans les paysages, les senteurs, les goûts nouveaux puis en exprime les moirures, les infinies subtilités. « Le dourian ressemble à un petit jacquier. Imaginez l'enveloppe à piquants d'un marron d'Inde, contenant un fruit gros comme un melon. Mais le dourian est un fruit difficile, un fruit auquel on n'accède point du premier coup. Son odeur, pour la désigner, il suffit de n'oser point la nommer. Oui... c'est bien cela que cela sent. Quand on passe devant un étalage de dourians, cette odeur vous poursuit et elle prête à une déplorable confusion. Au goût, cela rappelle le camembert d'abord, un camembert sucré. » Et d'une ample relation de voyage il fait, sans que le lecteur sous le charme s'en rende compte, un pamphlet rageur contre la bêtise du colonialisme et la stupidité des « politiciens qui donnent aux problèmes des solutions claires sans même en définir les termes ».
-
Dans ce roman antimilitariste publié en 1919, l'auteur livre sa propre expérience de la guerre. L. Werth a 36 ans lorsqu'il s'engage volontaire pour le front. Il y restera quinze mois pendant lesquels il prendra conscience de toute l'horreur de la guerre.
-
Pendant la Première Guerre mondiale, dans le calme et la terreur des tranchées, trois jeunes officiers allemands se retrouvent pour échanger des idées sur leurs destins, leurs avenirs et leurs émotions. Sans cesse ils reviennent sur le sens de cette guerre qu'ils ont choisi de faire. On retrouve tous les thèmes chers à Jünger, la guerre et la littérature, le nihilisme et le dandysme. Mais nous frappe surtout la magie de la prose du grand écrivain allemand.
-
En 1945, Léon Werth fut l'envoyé spécial de la revue Résistance (journal créé à Paris à la fin de l'année 1942 par Jacques Destrée, chef du mouvement d'opposition au régime de Vichy et du nazisme), pour couvrir le procès du Maréchal, aux côtés d'autres journalistes tels Joseph Kessel pour France-Soir, Jean Schlumberger pour Le Figaro. Ses chroniques quotidiennes portent bien leur nom : Impressions d'audience. Elles n'ont rien du compte rendu scrupuleux. Les Éditions Viviane Hamy les ont rassemblées en un volume inédit en mai 1995. Distancié, comme toujours, Werth observe. Il dresse les portraits des acteurs de cette « mascarade » - les avocats, le procureur, Laval, Darnand, Weygand, Daladier etc... - avec une ironie cinglante, et en premier lieu celui de Pétain, « présent absent », « ce contumace par le silence » ... La concision du style lui permet, en une seule phrase, de rendre palpable le ridicule suscité par le décalage qui se creuse entre l'attente des 28 jurés et l'opinion publique, la superficialité des débats qui ne mettent jamais en cause la responsabilité politique et meurtrière de l'accusé.