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Automoribundía ; 1888-1948
Ramón Gómez de la serna
- Table Ronde
- Quai Voltaire
- 1 Octobre 2020
- 9782710381976
Ramón Gómez de la Serna était considéré par Valery Larbaud comme l'égal de Proust et de Joyce. Porte-parole du baroquisme hispanique moderne, il avait un humour terriblement innovant, qu'on peut rapprocher de celui d'Alfred Jarry, mais il y avait aussi du Kafka et du Borges en lui. Inventeur d'un sous-genre littéraire, la «greguería», sort d'aphorisme drôlatique, il a aussi publié de nombreux romans et nouvelles.
Parues en 1948 à Buenos Aires, ses mémoires sont considérés par de nombreux critiques comme le chef-d'oeuvre de Gómez de la Serna.
Couvrant la période allant de 1888 à 1948, le livre paraît lorsque l'écrivain a 60 ans. C'est un moment difficile de sa vie : déraciné dans l'exil argentin, oublié de tous après le drame de la Guerre civile, il sent la maladie et la vieillesse s'abattre sur lui. Cette autobiographie constitue une tentative désespérée pour faire revivre «le grand Ramón» : l'artiste qui dans les années 1920 surprenait par ses productions imprévisibles.
Par-delà l'histoire personnelle de l'auteur, elle propose une somme des expériences stylistiques, poétiques, spirituelles et obsessionnelles qui constituent la marque - mi-avant-gardiste, mi humoriste, et tout à fait singulière - de ce grand écrivain.
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En 1966, le boxeur noir, Rubin «Hurricane» Carter, est arrêté pour le triple meurtre de consommateurs blancs dans un bar de Paterson, New Jersey. Il clame son innocence mais est néanmoins condamné. Depuis sa prison, il nous raconte ce qui l'a amené jusque-là : une enfance dans les États-Unis de la ségrégation avec les gangs, les premiers menus larcins, le placement en école disciplinaire dès l'âge de 11 ans à la suite d'une agression sexuelle dont il est victime, puis un vol qui le conduit en maison de redressement à 14 ans. Il parvient à s'évader avant sa majorité et s'engage dans l'armée. Il y découvre la boxe et commence une carrière qui le conduira aux portes de la consécration. Son punch lui fait fréquemment remporter ses matchs par des KO fulgurants et lui vaut son surnom, «L'Ouragan». Fin 1964, il est volé de la victoire dans le combat pour le championnat du monde. Il ne retrouvera pas de seconde chance avant son arrestation. Incarcéré, Rubin Carter obtient, après de nombreuses semaines à l'isolement et des brimades constantes, de ne pas porter l'habit du prisonnier, de ne pas manger la nourriture de la prison, de ne pas participer à la vie carcérale. C'est à ce prix qu'il peut continuer à vivre emprisonné à tort. Il concentre son énergie dans sa lutte judiciaire, étudiant le droit et acquérant une éducation que la vie ne lui avait pas donné l'occasion d'aborder. Ce livre est son moyen de démontrer au monde son innocence; Mohamed Ali s'engagera à ses côtés, tout comme Bob Dylan, avec sa chanson «Hurricane» et sa tournée Rolling Thunder (1975) devant servir à faire parler de l'affaire et à obtenir la libération de Carter (livre de Larry Sloman sur cette tournée, à paraître aux Fondeurs de Briques, octobre 2015).
Traversant plusieurs milieux - société ségrégationniste, système carcéral, armée, monde de la boxe - le récit de Rubin Carter est cru et rythmé d'une volonté viscérale de sur-vivre. Il porte l'implacable regard de celui qui a connu l'injustice et pour qui tout ce qui ne le détruit pas le rend plus fort.
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L'art de naviguer ; vivacité de pesanteur l'art de faire naufrage
Antonio De guevara, Pierre Senges
- Vagabonde
- 15 Avril 2021
- 9782919067336
L'antienne est connue : l'existence est un voyage. Ici, toutefois, la métaphore s'effondre car la navigation en mer, plus qu'aucune autre activité humaine, favorisa au XVIe siècle les ententes fatales entre l'aléatoire (les décrets de la Fortune) et l'inéluctable (la mort)? la notion de « galère » étant d'autant mieux partagée que son domaine s'étend indifféremment à toutes les brimades que réserve l'existence. Mêlant fable et réalité, Antonio de Guevara a composé une fiction où s'enchaînent la peinture de scènes saisissantes de la vie sur une galère et la description minutieuse du mouvement qui a pu animer ces âmes décidant de « prendre le large ». Ce à quoi Pierre Senges lui « répond » dans une autre fiction qui lui fait suite, aussi drôle que pertinente, plus actuelle et au titre explicite : L'art de faire naufrage (vivacité de pesanteur). « Certains se lamentent sur le pont du navire, au chapitre de la tempête, quand il s'ouvre en deux (le navire, mais le chapitre aussi), pile au milieu, là où il était le plus chargé, le plus fragile, et lègue à l'océan son contenu de merveilles? ah, l'insatiable océan : indifférent, absolument indifférent et cependant glouton comme personne, sa gloutonnerie proportionnelle à son absence d'appétit véritable. » (P. Senges)
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Le journal d'Anne Truitt est le témoignage passionnant, au fil des jours, de cette femme, mère, enseignante, artiste qui partage avec vérité, sincérité et profondeur ses réflexions sur la vie et son statut d'artiste. Elle permet aux lecteurs de rentrer dans son atelier en étant au plus proche de ses préoccupations et de ses attentes. C'est une oeuvre universelle qui révèle avec intensité sa démarche et sa personne.
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Le double jeu de Juan Martinez
Manu Chaves nogales
- Table Ronde
- La Petite Vermillon
- 21 Septembre 2017
- 9782710385325
Au cours d'un reportage sur les Russes réfugiés à Paris, le journaliste espagnol Chaves Nogales rencontre Juan Martínez. Ce danseur de flamenco lui raconte comment, après avoir triomphé dans des cabarets d'Europe cen- trale, sa compagne Sole et lui se sont fait surprendre en Russie par la Révolution d'octobre 1917.
Faute de pouvoir quitter le pays, ils en ont subi les ri- gueurs, et celles de la sanglante guerre civile qui a sévi à Moscou, Saint-Petersbourg et Kiev. Fasciné par l'inten- sité et l'humanité de ce récit, Chaves Nogales le publie en feuilleton dans le journal Estampa en 1934 avant d'en tirer un livre. Dans Le Double Jeu de Juan Martínez, dé- filent, sur fond d'atrocités, des personnages à la fois au- thentiques et romanesques : artistes et assassins, ducs russes prodigues et espions allemands, sans oublier les inévitables spéculateurs.
« [Un] exceptionnel et précieux témoignage. » Jean-Michel Barrault, Lire « Le point de vue [de Juan Martìnez] est irremplaçable.
(...) Aucune volonté de donner des leçons de morale ou de politique. » Frédéric Vitoux, Le Figaro littéraire
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Ciel et terre - terre sans limites, sans êtres vivants, et ciel sans oiseaux, sans alouettes qui percent le petit jour, sans alouettes qui décrochent la rosée du soir en pourchassant les rayons du couchant, ignorant qui, de l'ultime vestige de la lumière solaire ou de l'oiseau dans le bleu du ciel, est la balle perdue.
Dans cette solitude que la pampa a créée pour l'aventurier, on entend un crissement. C'est un bruit aigre et régulier, assidu comme le malheur et la pauvreté. C'est le joug jouant sur la nuque des boeufs attelés à une charrette qui tourne le dos à la civilisation - en quête des chemins du futur, des lacs suspendus de Neuquén, des gorges des Andes ou des rocailles des Punas. Ce crissement est le bruit du sang qui irrigue le corps informe d'un pays encore cloué au sol comme Gulliver, mais qui s'éveillera sous peu. -
On Air TV est la chaîne du mysticisme gonzo.
Pour toi, télévisionneur du futur, nos reporters jouent chaque jour leur âme immortelle en tentant de ramener des images définitives de l'autre monde. Pourchasser l'esprit du Che, enquêter sur le fantôme d'Elvis ou interviewer Sergio Leone en direct du purgatoire, telles sont leurs dernières réalisations. Il nous plaît que nos télémessies soient morts ou se détruisent en divers lieux de l'espace-temps pour te servir.
Authenticité et fantasmagorie sont le credo paradoxal de On Air Télévision.
Nous irons jusqu'à filmer la résurrection du Christ, filmer ta propre vie dans son intégralité et son exemplaire dégradation.
Puis, nous l'émettrons éternellement sur l'un de nos canaux hyperréalistes alors que tu ne seras plus qu'un cadavre devant ton écran. On Air TV est la seule télévision qui ne parle ni du présent ni du passé mais du seul temps possible : le Temps Sans Limites.
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En 1636, Gracian rencontre Vicencio Juan de Lastanosa, influent érudit de Huesca dont l'amitié et le soutien à son égard ne se démentiront jamais. C'est à cette époque qu'il entreprend la rédaction du Héros, premier d'une série de traités dans lesquels les ressources de l'intelligence et du langage sont portées à leur plus haut degré d'analyse. Le pseudonyme de Lorenzo Gracian, sous lequel il publiera l'essentiel de son oeuvre afin de se dérober à la censure ecclésiastique, ne prête à aucune illusion, ni sur son identité véritable, ni sur les fondements de sa morale : pour vivre en ce monde, il s'agit moins de tromper autrui que de se détromper soi-même. Cherchant à épouser au plus près nuances et variations de l'original, Catherine Vasseur propose ici pour la première fois un véritable essai de traduction française du Héros.
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Le journaliste M. Chaves Nogales quitte l'Espagne en 1936 pour la France, pressentant la défaite du camp républicain, dont il est un fervent défenseur. Quelques années plus tard, la France capitule devant l'armée allemande. L'espagnol, déçu, témoigne de ce qui mène selon lui à la collaboration avec l'idéologie nazie, auscultant la société française et ses prétendues élites.
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«Avec les manoeuvres d'Andalousie», «La Semaine sainte à Séville» et «L'Andalousie rouge et la Blanche Colombe» sont trois reportages réalisés par Manuel Chaves Nogales pour Ahora entre 1931 et 1936, au lendemain de la Seconde République espagnole. Qu'il interroge les manoeuvres au champ, les senoritos ou qu'il décrive les confréries des processions de la Semaine sainte, ce qui intéresse le journaliste, c'est de comprendre comment l'ancien monde de son pays natal, avec tout le poids de ses traditions, tente de ménager une place au nouveau, comment cohabitent ferveur populaire, drapeaux républicains, anarchisme et dévotion. Dans chacun de ces textes l'Histoire immédiate impose sa marque et délivre les signes annonciateurs de la guerre qui s'amorce. Mais Chaves Nogales a su également insuffler à ses récits une intemporalité qui en perpétue toute la pertinence.
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Histoires prodigieuses et biographies exemplaires de quelques personnages modestes et anonymes
Manuel Chaves nogales
- Table Ronde
- Quai Voltaire
- 2 Novembre 2012
- 9782710368137
«Je ne prétends inaugurer aucune forme inédite, ni résoudre aucun problème littéraire. J'ai écrit conformément à mon tempérament et j'ai adopté la forme la mieux à même de servir mon dessein : poursuivre jusqu'au bout l'idéal humaniste de la culture occidentale à laquelle j'appartiens, en communiquant une sensation forte et claire de l'humain - de l'humain véritable, non de ses fictions habiles.» C'est en ces termes que Manuel Chaves Nogales s'adresse aux lecteurs de Histoires prodigieuses et biographies exemplaires, sa première et dernière oeuvre purement fictionnelle où l'humaniste engagé montre sans jamais les juger les excès et les limites de la nature humaine.
Son goût pour la dérision des valeurs les plus sacrées, l'imaginaire bigarré et fertile que ses histoires déploient et le plaisir manifeste avec lequel il s'adonne à l'art de conter en font un digne héritier de la grande culture littéraire espagnole, et placent ces Histoires au panthéon des récits picaresques, qui ont su manier le rire pour protéger de la bêtise.
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La pelouse américaine en guerre ; de Pearl Harbor à la crise des missiles, 1941-1961
Beatriz Colomina
- Editions B2
- Societe
- 15 Décembre 2011
- 9782365090049
Du gazon " américain " ?! Une pelouse " en guerre " ?! De Pearl Harbor à la Crise des missiles cubains ?! Pour Beatriz Colomina, historienne de l'architecture à l'université de Princeton, le mythe patriotique du carré de pelouse (lawn) et le combat jardinier quotidien pour le maintien et l'embellissement de cette interface domestique de la famille et de la communauté reflètent une certaine conception du sol américain et de son paysage. Mais ils révèlent surtout une conception de la démocratie et de ses valeurs associées : libertés fondamentales, propriété privée et poursuite du bonheur, trilogie littéralement boostée durant la phase d'émergence de l'American Way of Life et de la Cold War. En menant une enquête visuelle et culturelle aussi serrée que passionnante, l'historienne répond à ces trois questions.
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La bolchevique amoureuse
Manuel Chaves nogales
- Table Ronde
- Quai Voltaire
- 21 Septembre 2017
- 9782710377689
Au lendemain de la Révolution russe, les préjugés bourgeois sont encore ancrés dans les mémoires et dans les moeurs. Ce sont autant d'ennemis à vaincre, au profit d'une liberté non moins soumise à la morale. Maria, femme vieillissante et membre haut placé du parti, se lie à un jeune garçon lui-même amoureux d'une fille de son âge. Mais le romantisme n'a plus sa place ni dans les villages du Caucase, ni dans les couloirs froids du Palais du Travail. Dans les quatre autres récits s'opposent des sociétés et des sentiments aussi ambivalents qu'indissociables. Un nouveau riche s'obstine à vouloir dénoncer une parfaite contrefaçon de billets de banque ; un homme pousse son épouse à l'adultère ; un employé de bureau se bat avec son double... Des fables où l'on retrouve l'économie de mots et le sens de l'absurde des Histoires prodigieuses, qui font de Chaves Nogales un grand nouvelliste.
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La Défense de Madrid regroupe une série d'articles consacrés à la guerre d'Espagne, écrits par Manuel Chaves Nogales en 1938, et retrouvés en 2010 grâce aux recherches minutieuses et passionnées de María Isabel Cintas. Rédigés à une certaine distance des faits que l'auteur relate, ce livre frémit pourtant de l'urgence d'une chronique dictée sur le vif. Le rythme épique, tragique du récit cède le pas, ici et là, à la drôlerie.
La puissance narrative y sert, de la première à la dernière ligne, une clairvoyance politique éblouissante. Et la position affirmée de l'auteur n'atténue en rien sa propension quasi enragée à l'autocritique. Son admiration pour les héros inattendus qui, en quelques jours et contre toute attente, sauvèrent Madrid de l'attaque de l'armée insurgée, n'a d'égal que son mépris à l'égard des politiques roublards et irresponsables qui ont précipité le désastre sans manifester une once de noblesse d'esprit ou de courage physique.
Au fil des heures, des jours, les décors de ce récit vertigineux se succèdent à la vitesse convulsive d'un montage cinématographique. Les complexités de la politique et de la stratégie militaire complètent sans effort la précision photographique des descriptions : sonneries de téléphone déchirant le silence d'un ministère ; grise lumière hivernale baignant les rues désertes d'un faubourg où l'ennemi peut surgir à tout instant ; métamorphose d'un vieux général grassouillet en héros d'une résistance impossible ; agressivité ridicule de Largo Caballero jouant, en bleu de travail et chapeau de paille, les caudillos d'opérette ; travailleurs rejoignant le front pour y trembler de peur et y mourir ; atmosphère oppressante, saturée de fumée, des sous-sols suintant d'humidité du ministère des Finances ; stupidité des doctrinaires.
Chaves Nogales est partout et voit tout.
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C'est en ces termes que Manuel Chaves Nogales s'adresse aux lecteurs de À feu et à sang - neuf récits sur la guerre civile espagnole, écrits dès 1937, alors qu'il était exilé en France. Un fils sommé de choisir entre son père et la cause révolutionnaire, un jeune milicien se sacrifiant pour sauver deux tableaux du Greco, l'élan de tendresse d'un colossal forgeron conducteur de tank pour une petite fille, la fraternité entre un guerrier maure et l'un des soldats républicains chargés de l'exécuter, les remords d'un prestigieux avocat après avoir laissé mourir trois jeunes serveuses qui lui avaient sauvé la vie...
L'auteur se place au coeur même de cette guerre qui fera plus d'un demi-million de morts. Il n'a guère plus de sympathie pour les révolutionnaires que pour les réactionnaires : « Idiots et assassins ont surgi avec une égale profusion et agi avec une égale intensité dans les deux camps qui se sont partagé l'Espagne. » Ces neuf récits d'une grande lucidité et d'une impartialité exemplaire montrent jusqu'où la bêtise et la cruauté peuvent entraîner les hommes.
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Au cours d'un reportage sur les Russes réfugiés à Paris, le journaliste espagnol Chaves Nogales rencontre Juan Martínez. Ce danseur de flamenco lui raconte comment, après avoir triomphé dans des cabarets d'Europe centrale, sa compagne Sole et lui se sont fait surprendre en Russie par la Révolution d'octobre 1917. Faute de pouvoir quitter le pays, ils en ont subi les rigueurs, et celles de la sanglante guerre civile qui a sévi à Moscou, Saint-Petersbourg et Kiev. Fasciné par l'intensité et l'humanité de ce récit, Chaves Nogales le publie en feuilleton dans le journal Estampa en 1934 avant d'en tirer un livre. Dans Le Double Jeu de JuanMartínez, défilent, sur fond d'atrocités, des personnages à la fois authentiques et romanesques : artistes et assassins, ducs russes prodigues et espions allemands, sans oublier les inévitables spéculateurs.
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Le tour d'Europe en avion ; un petit-bourgeois dans la russie rouge
Manuel Chaves nogales
- Table Ronde
- Quai Voltaire
- 5 Novembre 2015
- 9782710372110
Rédacteur en chef du quotidien espagnol l'Heraldo de Madrid, Manuel Chaves Nogales entreprend à l'été 1928 un périple à travers l'Europe qui le mène à Paris, Genève, Berlin, Leningrad et jusqu'aux confins du Caucase. Ce voyage donnera matière au présent reportage, publié en vingt-six articles entre le 6 août et le 5 novembre de la même année dans l'Heraldo.
Entretiens, flâneries et tribulations diverses émaillent ce panorama « spirituel » d'un Vieux Continent soumis à une accélération de l'Histoire sans précédent, et dont la Russie rouge, alors en pleine stalinisation, offre le spectacle le plus troublant et problématique.
En contrepoint des « choses vues », Chaves nous livre son expérience - alors inconnue du plus grand nombre - du vol en avion. Ces plages de contemplation immobile lui dictent autant de descriptions saisissantes que de constats essentiels sur le bouleversement des mesures liant l'être humain à l'espace. C'est aussi le lieu d'un apprentissage : sorti indemne de l'appareil posé en catastrophe, il reprend sa route sur le chemin de terre qui le conduira au prochain aéroport. Le journaliste devient alors l'archétype de l'homme moderne.
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Pepe, un historien de la guerre civile en Espagne, revient vivre à Léon après 20 ans d'absence. Un matin, alors qu'il vient de croiser son père par hasard, il est témoin d'une scène qui les met tous deux dans l'embarras. Son père, jeune phalangiste durant la guerre, est reconnu par un homme - presque aussi vieux que lui - qui a vu son propre père assassiné sous ses yeux en 36. Le père de Pepe a-t-il lui-même tué ? n'a-t-il fait qu'assister à la scène ? Qu'ont-ils fait du corps ?
Ces questions se propagent au-delà des personnages concernés, touchant leurs familles, les autres collègues historiens, la ville, et éveillent en chaque protagoniste une attitude personnelle et impartageable que traduit le caractère « choral » du roman - chacun prenant tour à tour la parole, tissant les bribes d'une histoire impossible à concilier.
Le roman est palpitant car le lecteur attend tout au long que se révèle une vérité. L'histoire des deux hommes restera finalement un mystère, l'historien est discrédité, victime dune cabale interne, il part, laissant la femme qu'il aime en se sentant trop vieux pour l'aimer.
On reconnaît dans la voix de l'historien celle d'Andrés Trapiello lui-même, telle qu'elle s'immisçait dans Les Armes et les lettres - le thème de la troisième Espagne notamment, cette troisième Espagne qui demeure introuvable, comme si la guerre civile devait se poursuivre sous d'autres formes.
Un roman qui rappelle l'obligation bien réelle de faire avec, avec les secrets individuels, avec les intérêts collectifs, avec l'ambiguïté propre à tout individu, avec l'oubli, avec le temps qui passe et les gens qui meurent, avec l'impossibilité, finalement, d'écrire l'histoire tant qu'on n'a pas fini de la vivre.
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Chroniques de la guerre civile
Manuel Chaves nogales
- Table Ronde
- Quai Voltaire
- 30 Octobre 2014
- 9782710370437
Ces 31 articles écrits entre août 1936 et septembre 1939, publiés à l'époque dans des revues, en espagnol, en français et en anglais, offrent un point de vue lucide et métaphysique au coeur de la guerre.
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Les armes et les lettres ; littérature et guerre d'Espagne
Andrès Trapiello
- Table Ronde
- 12 Mars 2009
- 9782710330271
Dans la lignée d'hommes aussi avisés qu'Antonio Machado ou Miguel de Unamuno, Andrés Trapiello a longtemps cru que la guerre civile espagnole avait été le fait d'un pays coupé en deux. En réalité, cette guerre a opposé deux Espagnes minoritaires et extrémistes déterminées à en finir l'une avec l'autre, aux dépens d'une Espagne, majoritaire, réunissant des gens de toutes conditions, de tous âges, de toutes classes et idéologies.
Aussi, dans Les armes et les lettres, Trapiello convoque et étudie les plus grands écrivains espagnols de l'entre-deux-guerres : Machado et Unamuno, bien sûr, mais aussi Ortega y Gasset, Federico García Lorca, Eugenio d'Ors, etc., dont il s'efforce de comprendre et de décrypter la posture ambiguë et le rôle qu'ils ont joué dans cette période clé.