Oeuvre d'une ampleur exceptionnelle, placée sous le parrainage de Salinger et Fitzgerald, La Ballade de l'impossible est le livre qui a révélé Haruki Murakami.
Un superbe roman d'apprentissage aux résonances autobiographiques, dans lequel le maître Murakami fait preuve d'une tendresse, d'un charme poétique et d'une intensité érotique saisissants.
une aide-ménagère est embauchée chez un ancien mathématicien, un homme d'une soixantaine d'années dont la carrière a été brutalement interrompue par un accident de voiture, catastrophe qui a réduit l'autonomie de sa mémoire à quatre-vingts minutes.
chaque matin en arrivant chez lui, la jeune femme doit de nouveau se présenter - le professeur oublie son existence d'un jour à l'autre - mais c'est avec beaucoup de patience, de gentillesse et d'attention qu'elle gagne sa confiance et, à sa demande, lui présente son fils âgé de dix ans. commence alors entre eux une magnifique relation. le petit garçon et sa mère vont non seulement partager avec le vieil amnésique sa passion pour le base-ball, mais aussi et surtout appréhender la magie des chiffres, comprendre le véritable enjeu des mathématiques et découvrir la formule préférée du professeur...
un subtil roman sur l'héritage et la filiation, une histoire à travers laquelle trois générations se retrouvent sous le signe d'une mémoire égarée, fugitive, à jamais offerte...
Alors que leur petite soeur est morte, trois enfants sont enfermés par leur mère inquiète jusqu'à la névrose. Ce roman est une ode à la poésie de l'enfance, à la beauté de ses imaginaires habités par la présence des animaux, celle des objets et des sons, ici celle des pierres pour contrebalancer peut-être la dureté des adultes, et l'expérience toujours trop précoce de la perte, de l'absence et du chagrin. Un très grand roman d'Ogawa, peut-être le plus fort. Un livre sur la maltraitance mais aussi et surtout sur la capacité des enfants à faire abstraction du mal, à persister dans l'amour filial, à survivre en tenant la peur à distance.
Enfant, lui seul comprenait le langage de son frère aîné, une langue totalement inconnue qu'ils ont appelée la langue pawpaw. Il s'agissait en fait du langage des oiseaux, d'un vocabulaire que les oiseaux comprenaient, de mots heureux oubliés par les humains depuis longtemps. Les parents de ces garçons ne comprenaient pas leur aîné et malgré de nombreuses consultations auprès de linguistes et autres orthophonistes, personne ne parvint à modifier son langage.
Après la mort de leurs parents, les deux hommes restèrent ensemble dans la maison familiale. D'une gentillesse extrême, l'aîné qui ne travaillait pas allait chaque jour se poster tout contre le grillage de la grande volière de l'école maternelle, il parlait aux oiseaux puis s'offrait à quelques pas de là une sucette emballée dans un papier au motif d'oiseau.
Son frère travaillait dans une pension. Responsable du jardin et de l'entretien, il aimait tout particulièrement les roses. Ensemble ils décidaient parfois de partir en voyage. Sacs bouclés, le duo s'arrêtait invariablement devant la volière de l'école, où ils entraient en conversation avec les oiseaux à lunettes, les moineaux de Java, les bengalis ou les canaris citron. Puis ils rentraient, oubliés les voyages, ils étaient heureux.
Un enfant révèle l'existence d'un instrument de musique unique au monde.
Dans un bureau de dactylographie, une employée s'attache à la portée symbolique des caractères de plomb de sa machine.
Avec discrétion, un jeune garçon se mêle au groupe qui ce jour-là visite sa région. Dans l'autocar, un vieux monsieur très élégant s'intéresse à l'enfant. Cet homme est un ancien poète...
Une petite fille devenue muette retrouve sa voix devant la féerie d'une envolée de poussins multicolores...
Un recueil de nouvelles poétiques et tendres dans lequel le lecteur retrouve l'univers rêveur de Yoko Ogawa, cette proximité entre les différentes générations ; ces héritages spirituels soudainement transmis à un inconnu et ces êtres délicats qui libèrent les souvenirs effacés en offrant un coquillage, une aile de libellule, une mue de papillon...
L'île où se déroule cette histoire est depuis toujours soumise à un étrange phénomène : les choses et les êtres semblent promis à une sorte d'effacement diaboliquement orchestré.
Quand un matin les oiseaux disparaissent à jamais, la jeune narratrice de ce livre ne s'épanche pas sur cet événement dramatique, le souvenir du chant d'un oiseau s'est évanoui tout comme celui de l'émotion que provoquaient en elle la beauté d'une fleur, la délicatesse d'un parfum, la mort d'un être cher. Après les animaux, les roses, les photographies, les calendriers et les livres, les humains semblent touchés : une partie de leur corps va les abandonner.
En ces lieux demeurent pourtant de singuliers personnages. Habités de souvenirs, en proie à la nostalgie, ces êtres sont en danger. Traqués par les chasseurs de mémoires, ils font l'objet de rafles terrifiantes... Un magnifique roman, angoissant, kafkaïen. Une subtile métaphore des régimes totalitaires, à travers laquelle Yoko Ogawa explore les ravages de la peur et ceux de l'insidieux phénomène d'effacement des images, des souvenirs, qui peut conduire à accepter le pire.
Un jeune muséographe vient d'entrer en fonction dans un manoir aux confins du monde.
Sous la direction d'une vieille femme plutôt étrange, il devra recenser, agencer, mettre en scène une véritable collection d'objets, de reliques du quotidien, de vestiges d'une intimité disparue et pourtant soutirée depuis des années aux défunts du village voisin. car ces objets ont un seul point commun : ils furent tous volés quelques heures après la mort de leur propriétaire. empreintes du temps qui passe, variations autour de la mémoire, accumulations, obsessions : la mission de cet homme est complexe car le musée du silence devra être à la hauteur des souvenirs de la vieille dame.
Mari et sa mère sont propriétaires de l'hôtel iris.
Modeste mais bien tenu, l'établissement est le plus souvent complet. comme chaque soir, la jeune mari tient la réception, l'hôtel s'endort paisiblement quand le calme des lieux est soudain troublé par des cris. une femme sort de sa chambre en insultant l'homme qui l'accompagne. mari est impressionnée par la scène, inconsciemment touchée par l'élégance et la distinction de ce vieillard accusé publiquement des pires déviances.
Mais ce n'est que quelques jours plus tard qu'elle fera sa connaissance. croisé dans un magasin, cet homme intrigue la petite. curiosité ou attirance, elle va le suivre. innocente ou très consciente de son effroyable beauté, la jeune ingénue entre dans l'arène du désir. les familiers de l'oeuvre de yôko ogawa, virtuose du malaise, entrent cette fois dans une histoire d'amour sans limites, bien au-delà de l'atmosphère allusive qui imprégnait les livres précédents.
Car entre la jeune réceptionniste et le vieux traducteur solitaire, le corps à corps n'est pas un jeu de dupes.
Dans les vestiaires d'une piscine, une jeune femme est soudain attirée par une inconnue. Banale, sans aucun intérêt, cette silhouette effacée et silencieuse vient d'entrer dans sa vie. Quelques jours plus tard elle la retrouve accompagnée d'une vieille dame, marchant dans la rue et, de nouveau, la jeune femme est fascinée. D'abord discrètement puis beaucoup plus naturellement elle les suit, longtemps. Dans une loge de gardien, les deux femmes sont assises sur des chaises, elles semblent attendre leur tour. La plus vieille se lève, entre dans une grande armoire hexagonale : la petite pièce à raconter.
Ce court récit fut écrit en 1994 tout comme L'Annulaire, un autre texte de Yoko Ogawa, avec lequel il entre curieusement en résonance. Atmosphère déroutante, étrange et obsédante : cette histoire est placée sous le signe de l'introspection et de la psychanalyse. Mais la grande armoire est éphémère et seule sa trace persiste sur le sol comme dans la mémoire de ceux qui un jour y sont entrés.
Seconde guerre mondiale, au sud-ouest du japon, l'officier Takuya Kiyohara est affecté au quartier général des forces armées. jour et nuit, il coordonne les informations concernant les intrusions d'avions américains, note la violence incessante des bombardements, puis l'ampleur sans précédent de la déflagration de la bombe atomique larguée sur Hiroshima. Vient l'annonce de la défaite, le 15 août 1945, avec la déclaration solennelle de l'empereur exhortant la population exténuée, hébétée, à "supporter l'insupportable."
Ce jour-là, l'état-major donne l'ordre d'abattre dans les plus brefs délais les aviateurs récemment faits prisonniers. Quelques semaines plus tard, le jeune officier Kiyohara apprend qu'il est recherché par les autorités pour crime de guerre.
Une longue fuite commence, une errance infinie, au cours de laquelle Takuya tente d'échapper au jugement d'un pays dévasté par l'horreur de la guerre, de se fondre dans l'anonymat de la population civile de son pays occupé, appauvri, anéanti par les destructions massives.
Mais ce cheminement vers la rédemption ne sera pas suffisant pour effacer en lui la lumière de l'été dans la clairière où furent décapités ces grands hommes blonds.
A la mort de son compagnon, Ryoko réalise qu'elle ne savait rien de lui.
Le jeune homme, prénommé Hiroyuki, s'est suicidé dans son laboratoire de parfumeur, où il composait des senteurs exceptionnelles en mettant en pratique son incomparable mémoire olfactive et ses capacités scientifiques. En retournant sur les lieux du drame, Ryoko espère comprendre les raisons de cet acte désespéré, mais elle ne trouve rien si ce n'est quelques phrases énigmatiques enregistrées sur une disquette.
Incapable de faire le deuil de cet homme étrange, Ryoko recompose lentement son passé. Et c'est à Prague, où il serait venu quinze ans plus tôt, que la mémoire et les parfums se répondent... Avec ce huitième roman traduit en français, Yôko Ogawa poursuit la construction d'une oeuvre fascinante où les personnages incarnent, en silence, l'indicible douleur de la vie. Entre le réel et l'imaginaire, le symbolique et l'inconscient, elle atteint ici le coeur des êtres, la source de leur mémoire.
une jeune femme se réveille un matin dans un étrange silence.
en l'espace d'une nuit, elle a perdu l'usage de ses oreilles, s'est égarée dans l'immensité d'un bruit blanc, d'une sonorité jusqu'alors imperceptible : le bruissement de ses souvenirs. a la clinique, elle est soignée, surveillée, observée mais sa maladie évolue : elle perçoit maintenant le moindre chuchotement comme un hurlement, le moindre choc comme un cataclysme. pour un magazine de santé, la jeune femme va devoir décrire ses symptômes en présence d'un sténographe, essayer de trouver les mots justes pour exprimer ce qu'elle ressent.
les doigts de cet homme glissent sur le papier, avec une incroyable virtuosité ils transcrivent son récit. fascinée, elle cherche à le revoir, elle pressent le pouvoir de ce garçon, sa capacité à révéler les traces enfouies dans le passé, à libérer la voix de sa mémoire. amours en marge, premier roman "long" de yoko ogawa, est paru au japon en 1991. depuis, la romancière japonaise s'est s'aventurée de plus en plus loin dans la "forêt des mots" pour explorer les territoires de la mémoire, et tenter d'appréhender l'indicible.
Après quinze ans d'incarcération, Kikutani bénéficie enfin du principe de libération conditionnelle.
Pris en charge par un tuteur, il doit réapprendre à vivre en société, ce qui représente pour lui une angoisse d'autant plus grande qu'il avait parfaitement su s'adapter à la prison.
Incapable de s'éloigner du foyer de réinsertion, Kikutani loue un studio à quelques rues de là, trouve un emploi grâce au soutien de l'institution postcarcérale et se compose peu à peu un quotidien acceptable. Mais, alors que son comportement est en tout point exemplaire, son tuteur lui propose de se remarier. Et soudain tout bascule, malgré ses efforts Kikutani dérive.
Une jeune femme entre dans une pâtisserie pour acheter un gâteau d'anniversaire à son fils mais il est mort depuis longtemps. Dans l'arrière-boutique, une vendeuse pleure en silence. Une romancière vit dans un appartement donnant sur un jardin potager qui regorge de légumes, de surprenants légumes. Un journaliste arrive dans un hôtel sur lequel il doit écrire un article. Dans sa chambre s'est installée une femme. Elle s'en va aussitôt mais ne quitte pas les abords de l'hôtel. Elle rôde en portant un curieux fardeau.
Une maroquinière confectionne pour une chanteuse de bar un sac délicat et précieux dans lequel la belle va déposer son coeur : étrange excroissance, difformité fragile posée non pas à l'intérieur mais à l'extérieur de sa cage thoracique.
Dans chacune de ces onze nouvelles, un détail, parfois infime, évoque la précédente ou annonce la suivante pour former un ruban, une spirale, une chaîne soutenant la trame du livre et créant ainsi une subtile mise en abyme.
Sept nouvelles autour de ce que la narratrice appelle la "forêt des mots", c'est-à-dire ce sas souvent étrange qui accompagne l'écriture, la naissance des romans ou le long voyage des histoires parfois issues de l'enfance des écrivains.
Quelle est cette étrange forêt des mots à travers laquelle l'écrivain ne cesse de se perdre avant de trouver son histoire ? C'est la question que se pose la narratrice de ce recueil de nouvelles. Sous différentes voix, à différents âges, elle découvre la nécessité d'écrire et se confronte à l'indicible alchimie de la création.
Suite à un accident, une jeune femme prend le train chaque jour pour se rendre à l'hôpital. Chaque jour, elle voyage avec une autre femme qui finit par lui raconter l'étrange histoire de son petit frère. Impressionnée par la gravité romanesque de ce récit, la jeune convalescente se lance dans l'écriture. Mais sait-elle vraiment d'où vient ce désir d'écrire oe
Une petite fille mal-aimée par sa mère s'attache à l'employée de maison. La jeune femme pleine de fantaisie est particulièrement attentive aux talents romanesques dont fait preuve l'enfant depuis que son père lui a offert un stylo plume.
Une romancière commet l'erreur de se présenter à un étrange individu qui, sur un banc public, est plongé dans la lecture de l'un de ses romans.
Une romancière part sur une île pour des raisons professionnelles. Totalement seule suite à une tempête, la jeune femme croise un vieillard ayant dans le cou, juste au-dessous de l'oreille, la très belle empreinte d'une aile de papillon.
Une jeune femme tente de conduire son labrador chez le vétérinaire. Sous une pluie battante, elle pousse le landau de son bébé et s'épuise en tirant l'animal affaibli. Quand soudain une voiture s'arrête à sa hauteur.
Quelles sont ces petites poches d'eau qui parfois se glissent sous notre peau, quelles sont ces histoires que notre corps protège et puis soudain libère oe...
Sept nouvelles à travers lesquelles se glisse une touche autobiographique, caractéristique assez rare dans l'oeuvre de Yoko Ogawa. Sept histoires autour de la genèse de l'écriture et de l'envoûtante forêt des mots que parcourt indéfiniment l'écrivain pour atteindre au plus profond de lui-même les rives de l'imaginaire.
Après le décès de son père, alors que sa mère doit s'éloigner pour parfaire sa formation professionnelle, la petite Tomoko est revue pour un an chez son oncle et sa tante. Tomoko a douze ans ; à Kobe, son oncle l'attend sur le quai de la gare. Il la serre dans ses bras et la conduit jusqu'à la très belle demeure familiale. Pour Tomoko, tout est ici singulièrement différent. Sa cousine Mina passe ses journées dans les livres, collectionne les boîtes d'allumettes illustrées sur lesquelles elle écrit des histoires minuscules ; un hippopotame nain vit dans le jardin, son oncle a des cheveux châtains, il dirige une usine d'eau minérale et la grand-mère se prénomme Rosa. Au coeur des années soixante-dix, Tomoko va découvrir dans cette maison l'au-delà de son archipel : à travers la littérature étrangère, les récits de Rosa sur son Allemagne natale et la retransmission des Jeux olympiques de Munich à la télévision, c'est un tout autre paysage qui s'offre à elle. La grande romancière japonaise explore dans ce livre, et pour la première fois dans son oeuvre, le thème de l'étranger et des origines. En choisissant le prisme des liens de l'enfance, elle inscrit ce roman, comme le précédent. intitulé la formule préférée du professeur, dans un cycle voué à la tendresse et à l'initiation.
Le soldat Tamura erre, affaibli, dans les plaines dévastées des Philippines. Nous sommes en 1945 et la débâcle de l'armée japonaise est totale. Livré à lui-même, en proie à la solitude, la faim, la peur et sa propre folie, Tamura nous plonge dans l'enfer de la guerre et dans ses instants fugaces de beauté désespérée. De rencontre en rencontre, avec l'ennemi ou un autre soldat en déroute, un dilemme s'impose à lui : faut-il rester humain ou sauver sa peau?
Les Feux, chef-d'oeuvre de la littérature japonaise, lu dans le monde entier et adapté au cinéma, symbolise la tragédie de tous les hommes pris dans l'engrenage d'une guerre dont la logique les dépasse mais qui finit, peu à peu, par les dévorer.
Tsuneo Asai est en mission à Kôbe pour le compte du ministère de l'Agriculture lorsqu'il reçoit un coup de téléphone : son épouse est morte quelques heures plus tôt.
Elle a succombé à une crise cardiaque tandis qu'elle se trouvait dans un magasin. Sous le choc, il décide de rentrer à Tôkyô par le premier train. Eiko avait le coeur fragile, il le savait, et la nouvelle de son décès ne l'a surpris qu'à demi. Les circonstances de sa mort, en revanche, ne laissent pas de l'étonner. Comment cette épouse docile, au caractère réservé, avec laquelle il menait une vie calme et sobre, qui ne s'absentait de la maison que deux ou trois après-midi par semaine pour aller à ses réunions de haïku, a-t-elle pu mourir dans une curieuse petite boutique de cosmétiques, dans un quartier où elle n'aurait jamais dû mettre les pieds ? Quelques jours plus tard, il décide d'aller s'excuser auprès de la commerçante de la gêne occasionnée.
Il découvre alors, non loin de là, la villa Tachibana, une maison de rendez-vous. Son trouble grandit. Peu à peu, d'infimes détails, de curieux haïkus publiés à la mémoire de son épouse dans la revue de son cercle littéraire, les confidences du personnel des "villas" sur les couples illégitimes qui les fréquentent, le convainquent que sa femme menait une double vie... Dans ce roman écrit au début des années 1970, Seichô Matsumoto traque de l'intérieur un fonctionnaire appliqué brusquement débordé par un événement inattendu.
Ce faisant, il nous donne à voir une société japonaise profondément ambivalente, à la fois pétrie de conventions et complice de ceux qui les ignorent.
Avec Gens de Séoul 1919‚ nous retrouvons dix ans plus tard la même famille de papetiers japonais‚ les Shinozaki‚ établis en Corée. Nous sommes le 1er mars 1919‚ jour de la déclaration de l'indépendance des Coréens au cours d'une manifestation à Séoul‚ rebaptisée Keijo par les autorités japonaises au pouvoir. Une manifestation contre l'occupant qui passe totalement inaperçue des membres de la famille Shinozaki‚ plus préoccupée par la création d'une filiale de sa papeterie en Mandchourie et par le spectacle organisé pour un lutteur de sumo venu de métropole avec son manager.
Présenté ici dans une nouvelle édition, Gens de Séoul 1909 est le premier volet d'un ensemble qui se compose de trois pièces. A la manière des Buddenbrook de Thomas Mann, Oriza Hirata nous fait suivre à travers plusieurs générations l'évolution d'une famille d'expatriés japonais, les Shinozaki, propriétaires d'une papeterie en plein coeur de la capitale coréenne.
Nous sommes en 1909, un an avant l'annexion de la Corée par le Japon. En cette après-midi d'été, la famille, réunie autour de la table de la salle à manger au gré des allées et venues de ses membres, des domestiques coréennes et des visiteurs, boit du thé, mange des pâtisseries et parle tranquillement de la métropole, des Coréens, de l'avenir.
Dans un centre de recherche au Congo‚ des Belges se retrouvent autour d'un même intérêt pour la région et les bonobos. Néerlandophones et francophones‚ ils ont aussi à composer avec leurs spécialités et leurs histoires respectives qui ne sont pas toujours concordantes. Aux côtés de deux scientifiques spécialistes des singes et d'un spécialiste de l'acquisition du langage‚ il y a en effet un psychologue qui se recommande de l'université de Kyoto‚ un ingénieur agronome qui cherche à faire pousser des légumes géants pour nourrir la planète‚ et un agent d'une compagnie de tourisme qui pense transformer l'endroit en un parc d'attraction.
Une pièce pleine d'humour sur la communication entre les êtres‚ la difficulté de vivre ensemble‚ et les désordres du monde.
Une jeune femme vient de confier sa grand-mère à une institution médicalisée.
Aujourd'hui devenue totalement dépendante, silencieuse et immobile, la vieille dame semble peu à peu s'effacer de toute réalité. dans la mémoire et l'inconscient de sa petite fille, la solitude est immense. une jeune fille vient d'apprendre que son frère est malade, qu'il doit passer les derniers mois de sa vie à (hôpital. jour après jour elle lui rendra visite. de jour en jour leur intimité, la qualité de leur relation va s'intensifier pour devenir le centre de leur existence.
Dans la quiétude de la chambre blanche, le temps passe au rythme des saisons. dans ces nouvelles écrites en 1989, yôko ogawa n'évoque pas simplement la douleur de la mort ou la violence de la maladie, elle explore déjà ce sas très particulier, ce passage de la vie à l'absence qui génère un accomplissement des sentiments parfois incomparable avant de venir s'inscrire dans la mémoire.
Sang et coquillage.
A l'intention d'une femme qu'elle a secourue dans la rue, une copiste de partitions musicales entreprend la rédaction d'une sorte de journal dévoilant ses passions les plus secrètes. contrairement aux apparences, ce n'est pas la compassion qui l'a poussée à aider cette inconnue légèrement blessée, mais son goût obsessionnel pour le sang. loin d'être une bonne fée, elle s'identifie en effet à une renarde, figure mythique de la sorcellerie au japon.
Au fil du récit, le lecteur pénètre un univers malsain, oú la frontière entre les fantasmes criminels de l'héroïne, qui fait la liste des personnes " dont la mort ne la dérangerait pas ", et sa capacité d'agir se brouille. insidieusement, elle compose une mélodie inquiétante, empreinte d'un érotisme morbide. son monologue intérieur, murmure sourd et oppressant, laisse une impression diffuse de malaise que vient rythmer un étrange fétichisme.
Comme on pince les cordes d'un shamisen, elle force le regard à s'attarder sur ce qui répugne : ces traces brutes de sauvagerie qu'elle fait surgir du quotidien.
Sans laisser de répit à l'angoisse, l'auteur nous entraîne dans les affres d'une obscure jouissance, oú la nature humaine n'est plus qu'un insoutenable grincement.
Elle a seize ans, elle vient de mourir.
Allongée sur un tatami, elle voit deux hommes arriver et, contre son corps, offrir de l'argent à ses parents. dans une grande voiture noire, les deux messieurs déposent son cercueil. a travers les parois, elle voit sa mère s'éloigner, sa ruelle sordide, les passants, le ciel, puis plus tard le porche de l'hôpital. lentement le long véhicule contourne le bâtiment et entre, discrètement, par-derrière. eichi et sone se retrouvent par hasard.
Voisins dans l'enfance, ils vivaient près d'un cimetière ouvert à tout vent, un fantastique terrain de jeux oú ces gamins faisaient parfois de terrifiantes découvertes. mais, à la mort de son père, sone a déménagé et personne n'a su ce qu'il était devenu, ce que le deuil avait fait de lui. deux magnifiques récits à travers lesquels yoshimura fait preuve d'une remarquable modernité d'écriture. pour aborder le thème de la mort sans jamais se laisser gagner par le sinistre et le morbide, il atteint une pureté de langage telle que sa sonorité cristalline fait écho à l'étrangeté de son univers.