Agone
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Central dans les débats sur la reproduction sociale, le racisme, l'État et l'écologie, cet ouvrage est utile à tout lecteur qui souhaite comprendre les crises actuelles. Nancy Fraser y suit le capital de crise en crise pour développer l'idée que, dans les sociétés capitalistes, l'économie s'appuie sur des « zones non marchandes » telles que le « travail domestique » non rémunéré, la nature, la politique et le racisme (en tant que mécanisme justifiant l'expropriation). Son argumentation permet de faire dialoguer Karl Marx, Rosa Luxemburg avec des voix issues du féminisme marxiste (comme Eli Zaretsky, Lise Vogel, Nancy Flobre,...), du marxisme noir et de l'écomarxisme (comme James O'Connor et Jason Moore).
Affirmer l'intersectionnalité de la race, du genre et de la classe n'est pas suffisant pour les décortiquer en tant que caractéristiques du capitalisme. L'oppression fondée sur le sexe estelle une caractéristique structurellement nécessaire du capitalisme ? La discrimination fondée sur la race estelle intégrée dans la reproduction du capitalisme racial ? -
Ce livre analyse l'abandon par les « nouveaux démocrates » des classes populaires et des syndicats au profit des classes aisées et cultivées. Ce choix pour l'« économie de la connaissance » a condamnées les travailleurs manuels et les catégories peu diplômées à la relégation sociale et à une forme de plus en plus agressive de mépris culturel. Dépréciées par le parti qui leur servait autrefois de véhicule politique, les classes populaires sont devenues plus attentives aux thématiques identitaires de démagogues réactionnaires. L'histoire mondiale récente - des mandats de Trump et de Bolsonaro aux élections de Biden et de Macron - n'a fait que confirmer les analyses de l'auteur. Aux États-Unis comme en France, la méritocracie s'est installée sans complexes, mettant à mal les services publics, faisant du marché du travail un marché contractuel profondément défavorables aux petits salariés, démantelant le syndicalisme. En cajolant les hauts salaires, la « gauche » a pavé la voie (royale) à l'extrême droite.
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En 1768, des marins de Sunderland lancent l'un des tout premiers grands arrêts de travail en repliant les voiles de leurs navires (« striking the sails »). À l'époque, l'action est considérée comme une « mutinerie ». Le mot « strike » est alors adopté pour désigner un arrêt de travail ou une grève. Depuis lors, la lutte sociale a connu des hauts et des bas, mais elle vit toujours, ouverte et offensive, ou latente, à l'affût de moments critiques pour faire basculer l'histoire. Entre l'inflation galopante et des salaires revus à la baisse, la situation climatique critique, de mauvaises récoltes, les prix des denrées alimentaires qui s'envolent, nous sommes à un moment de bascule. Ce livre nous mène dans les coulisses du pouvoir, de la spéculation alimentaire en passant par les super-profits pétroliers, avec comme bousolle la volonté du peuple de s'émanciper. En donnant la parole à ceux qui luttent, Peter Mertens offre un nouveau point de vue sur les équilibres mondiaux, en plein basculement. Avec en ligne de mire l'espoir que les mutins du Nord tendent la main à ceux du Sud, et vice-versa, pour un réel virage démocratique, social et écologique.
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Du taudis au airbnb : Petite histoire des luttes urbaines à Marseille
Victor Collet
- Agone
- Contre-feux
- 5 Avril 2024
- 9782748905557
Novembre 2018, Marseille, rue d'Aubagne. Deux immeubles s'effrondrent sur leurs habitants : huit morts, une ville traumatisée, une mairie qui fuit toute responsabiltié. Triple effondrements : physique, moral, politique. Pourtant, la catastrophe était prévisible, presque annoncée, tant la gestion urbanistique de la deuxième ville de France dysfonctionne depuis trop longtemps. Connue pour ses marchands de sommeil, qui exploitent sans vergogne le besoin de logement des plus précaires en louant à des prix exhorbitants des bâtiments indignes, Marseille est désormais en proie à une frénésie de la rénovation. Détruire puis reconstruire pour rendre la métropole enfin attractive et rentable : l'occasion est trop belle de déplacer les populations pauvres et issues de l'immigration du centre-ville, au gré des mises en péril, plus ou moins légitimes. Gentrification, touristification, soutenue par l'explosion d'Airbnb et l'absence de réglementation de la plateforme. Mais tout cela ne se fait pas sans une certaine résistance populaire. Les luttes pour l'accès à un logement dignent préexistent à l'effondrement mais changent de dynamique avec le tourisme et l'installation massive de néo-marseillais, qui participent à l'explosion immobilière.
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À la fin des années 1960, la concurrence internationale et la peur du déclassement transforment un populisme de gauche (rooseveltien, conquérant, égalitaire) en un « populisme » de droite faisant son miel de la crainte de millions d'ouvriers et d'employés d'être rattrapés par plus déshérités qu'eux. C'est alors que la question de l'insécurité resurgit. Elle va embourgeoiser l'identité de la gauche, perçue comme laxiste, efféminée, intellectuelle, et prolétariser celle de la droite, jugée plus déterminée, plus masculine, moins « naïve ».
Cette métamorphose s'accomplit à mesure que l'inflation resurgit, que les usines ferment et que l'« élite », jadis associée aux grandes familles de l'industrie et de la banque, devient identifiée à une « nouvelle gauche » friande d'innovations sociales, sexuelles et raciales.
Les médias conservateurs n'ont plus qu'à se déchaîner contre une oligarchie radical-chic protégée d'une insécurité qu'elle conteste avec l'insouciance de ceux que cette violence épargne. Au reste, n'est-elle pas entretenue dans ses aveuglements par une ménagerie de juges laxistes, d'intellectuels jargonnants et autres boucs émissaires rêvés du ressentiment populaire ?
« Progressistes en limousine » là-bas ; « gauche caviar » chez nous.
Extrait de la préface de Serge Halimi
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Cet essai est le procès d'une absence, celle de la gauche, reléguée au second plan dans la presse depuis 2017. L'autrice analyse la façon dont le débat public a été verrouillé par les médias dominants, qui ont reboublé d'efforts pour bipolariser les champs politique et journalistique autour des figures d'Emmauel Macron, de Marine Le Pen et de leurs thématiques sécuritaires et économiques. Basé sur une documentation précise, ce livre retrace l'effondrement intellectuel du « journalisme politique », qui a perdu tant en substance qu'en consistance, laissant le storytelling remplacer l'information. L'autrice aborde notamment le traitement des différents projets de réformes par les chefs-lieux éditoriaux, souvent transformés en SAV du gouvernement... S'appuyant sur l'émergence de la comm' comme cadre politique et journalistique, Pauline Perrenot dévoile le monopole absolu de la pensée libérale dans les médias et l'imbrication de la profession avec le monde patronal. Un président créé de toutes pièces par les médias, la croisière journalistique de l'extrême droite, une kabbale réactionnaire qui ponctue les séquences des chaînes d'information... drôle d'état que celui de la presse dans l'Hexagone. Pauline Perrenot s'appuie sur le traitement des thèmes qui ont « fait » l'actualité : maintien de l'ordre, sondages, loi sécurité globale, gilets jaunes, violences policières, émergence de Zemmour. Pour que la disparition de la gauche ne passe plus inaperçu.
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Interventions 1961-2001 ; science sociale et action politique
Pierre Bourdieu
- Agone
- Memoires Sociales
- 14 Janvier 2022
- 9782748904802
Seule une critique radicale des formes actuelles de circulation de l'information peut permettre de sortir du désenchantement de la politique. Paradoxalement, les appareils de parti conçus comme des instruments de libération, individuelle et surtout collective, ont très souvent fonctionné comme des instruments de domination, à travers notamment la violence symbolique qui s'exerçait en leur sein. C'est pourquoi la priorité doit être d'élever la conscience critique des mécanismes de violence symbolique qui agissent dans la politique ; et, pour cela, de divulguer largement les armes symboliques pour se défendre contre la violence symbolique - et de se libérer, si besoin, des « libérateurs ».
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Désoccidentalisation, repenser l'ordre du monde
Didier Billon, Christophe Ventura
- Agone
- Contre-Feux
- 20 Octobre 2023
- 9782748905373
L'année 2022 aura ouvert une nouvelle situation internationale, caractérisée par la dimension géopolitique, sanitaire et écologique d'une crise systémique du système-monde, où la guerre d'Ukraine constitue une nouvelle étape.
Les auteurs fondent leur diagnostic sur un rappel des grands conflits et affrontements du siècle dernier, pour comprendre comment on en est arrivés à la situation actuelle : entre nouvelle guerre froide et nouveaux enjeux impérialistes, affirmation des États dits du Sud, restauration de la puissance russe et positionnement central de la Chine face à la fragilisation du modèle démocratique. Leur méthode : analyser l'organisation des relations entre les pouvoirs économiques, financiers, politiques, militaires et technologiques, leurs évolutions au sein de chaque État et société, et entre eux dans le système international.
Le monde serait entré dans une phase de désoccidentalisation, c'est-à-dire d'érosion irréversible des valeurs, de la puissance et de l'influence des pays occidentaux. Certes, mais cela ne suffit pas pour saisir les contradictions à l'oeuvre : partout agit une société vivante dont les évolutions sont forgées par des rapports de classe et des luttes internes, en régime démocratique ou autoritaire, au sein des sociétés occidentales comme dans celles du Sud.
L'analyse de ces processus permet de faire émerger des solutions pour une transformation progressiste et coopérative du monde, pour sortir des crises qui caractérisent notre époque.
Dans quelle mesure les peuples pèseront-ils dans ces évolutions en cours ? Une partie de la réponse se trouvera dans leur capacité d'action et de mobilisation à venir.
Puissent les réflexions contenues dans cet ouvrage contribuer à nourrir la réflexion et les débats de toutes celles et ceux qui ne se résignent pas à l'inéluctable et au chaos, conscients que l'histoire humaine reste largement, pour le meilleur ou pour le pire, une auto- construction collective. -
école publique et émancipation sociale
Laurence de Cock
- Agone
- Contre-feux
- 20 Août 2021
- 9782748904710
Jamais le démantèlement de l'école publique n'a été aussi brutal et implacable que sous le mandat d'Emmanuel Macron. Peut-être la perte du sens de l'enseignement public n'a-t-elle pas permis d'y opposer les résistances nécessaires du côté des enseignants et des parents, des médias et de l'administration. Toujours est-il que les enfants des catégories populaires ont été les premiers sacrifiés. Même si la promesse de la démocratisation scolaire n'a jamais été complètement tenue, il ne faut pas en abandonner l'ambition, sans laquelle aucune société égalitaire n'est possible.
Après avoir posé l'état des lieux (déplorable) laissé par la dernière mandature, ce livre revient sur les fondements des principes d'une éducation nationale, ceux des révolutionnaires de 1793 - principes généreux et audacieux, repris sous le Front populaire et après la Libération. Qu'en reste-t-il ? Sur quoi refonder une école qui retrouve son ambition de servir les masses ? Aux anciens défis se sont ajoutés des dangers tout aussi redoutables : puissance destructrice de l'idéologie néolibérale, obscurantismes religieux, enjeux de santé liés à la crise environnementale.
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Nos leaders d'opinion ont une théorie pour expliquer les comportements de certains de nos concitoyens, qui exaltent la sagesse des foules - et, cela va de soi, sont racistes, sexistes et homophobes. Ces égarés, assurent-ils, agissent sous l'emprise d'une doctrine rétrograde, le « populisme » ; et leurs adeptes sont des bourrins incultes qui ont une dent contre leurs congénères instruits. Le populisme est en guerre contre la pensée moderne et le progrès. Il est complice de la diffusion du mal, pour ne pas dire qu'il est le mal lui-même.
La façon dont nos progressistes autoproclamés mésusent et abusent désormais du mot « populisme » prouve qu'ils se sont résolument tournés contre leur héritage démocratique. La démocratie pose un problème, expliquent-ils, parce qu'elle permet au peuple de faire fi de l'autorité des experts.
Le paysage politique est cul par-dessus tête, mais le combat reste le même : le vrai sujet, ce sont les privilèges des élites, et le populisme est peut-être le remède permettant de nous en délivrer.
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L'Etat français et le génocide des Tutsis au Rwanda
Raphaël Doridant, François Graner
- Agone
- Dossier Noir
- 21 Février 2020
- 9782748903935
Ni aveuglement, ni erreur, le choix politique délibéré d'une poignée de responsables civils et militaires a été de maintenir le Rwanda dans la zone d'influence française, même au prix du soutien discrètement accordé à un régime ami en train de commettre un génocide.
« La réticence des magistrats à mettre en cause des militaires français pour complicité de génocide s'est traduite par le refus, à l'été 2017, d'interroger l'amiral Jacques Lanxade, chef d'état-major des armées en 1994, et son adjoint chargé des opérations, le général Raymond Germanos, au motif que les militaires sur le terrain auraient décidé de façon autonome de leur action ou inaction. C'est méconnaître les réalités de la chaîne de commandement, puisque l'amiral Lanxade lui-même explique : «Les forces françaises au Rwanda exécutaient les ordres qu'on leur demandait d'exécuter.» » Vingt-cinq ans après les événements, ce livre rend compte du soutien français aux forces gouvernementales rwandaises avant, pendant et après le génocide des Tutsis. Il revient sur l'ambiguïté de l'opération Turquoise qui, après avoir laissé massacrer plus d'un millier de civils sur la colline de Bisesero, a aussi laissé partir vers le Zaïre les génocidaires - qu'elle a même été jusqu'à réarmer. Aujourd'hui encore, la plupart des acteurs politiques, quel que soit leur bord, continuent de se taire ou de nier l'implication de l'État français dans le génocide. Le combat judiciaire qui continue lui aussi pour rompre ce silence et mettre fin à l'impunité des responsables français et à celle des Rwandais suspectés de génocide - pour qui le territoire français est encore largement une terre d'asile - rencontre de nombreux blocages, parfois au coeur même de l'État.
Raphaël Doridant est instituteur. Il contribue depuis dix ans à faire reconnaître la responsabilité de l'État français dans les crimes commis au Rwanda, en particulier à travers un travail de fond aux côtés des avocats de la FIDH et de Survie.
François Graner est physicien. Il est auteur d'un autre ouvrage sur l'armée française au Rwanda : Le Sabre et la Machette. Officiers français et génocide tutsi (Tribord, 2014). Tous les deux sont membres de l'association Survie.
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Le grand bond en arrière ; comment l'ordre libéral s'est imposé au monde
Serge Halimi
- Agone
- Elements
- 11 Octobre 2012
- 9782748900514
NOUVELLE ÉDITION ACTUALISÉE. Pourquoi le monde occidental, à partir des années 1980, est passé avec armes et bagages au néolibéralisme: une véritable enquête menée par Serge Halimi, qui débute aux Etats-Unis et se ramifie en Grande-Bretagne et en France. Étude qui touche le milieu politique et économique et leurs deux principaux relais, les intellectuels et les médias.
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De mémoire Tome 2 ; le deuil de l'innocence : un jour de septembre 1973 à Barcelone
Jann-Marc Rouillan
- Agone
- Memoires Sociales
- 5 Mars 2009
- 9782748900965
le 17 septembre, en fin d'après-midi, dans le nord, près de la frontière, la guardia civil a capturé des camarades.
nous n'en savons que ce qu'en ont dit la presse et quelques contacts. la fusillade n'aurait pas fait de morts. deux auraient été pris. depuis, nous prévoyons le pire. près de l'aérateur, nos trois musettes sont alignées en rang d'oignons. quelques munitions, des chargeurs de rechange, une ou deux liasses de billets de mille pesetas, des papiers, un paquet de cartes d'identité comme un jeu de tarot, un couteau, une boussole et les cartes d'état-major alpina.
si nécessaire, nous partirons à pied par le maquis jusqu'au camp de base le plus proche. en cavalant, nous l'atteindrons dans la journée. sur les chemins entre barcelone et la cerdagne, nous avons installé des caches avec des sacs de couchage plus la nourriture indispensable à quatre ou cinq jours de marche. après les années d'insouciance à toulouse, voici celles de la formation sous la dictature de franco.
ici, la dernière journée en espagne pour échapper à la souricière montée par la guardia civil.
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Quand la gauche essayait ; les leçons du pouvoir 1924, 1936, 1944, 1981
Serge Halimi
- Agone
- Elements
- 16 Janvier 2018
- 9782748903560
Longtemps, la gauche au pouvoir a caboté entre deux récifs. Tantôt sa volonté de transformation sociale butait sur les «contraintes» imposées par l'ordre capitaliste. Tantôt sa pratique du pouvoir devançait les préférences et les exigences de ses adversaires. En France, au cours du XXe siècle, les périodes associées au Cartel des gauches (1924-1926), au Front populaire (1936-1938), à la Libération (1944-1947), et aux premières années de l'ère mitterrandienne (1981-1986) ont illustré cette tension entre espérance et renoncement, audace et enlisement.
La gauche a chevauché au pouvoir la puissance de passions collectives, dont celle de l'égalité. Mais elle a accepté ensuite de les dompter, avant de les étouffer sous une couverture de rationalité technique. Cette retraite bureaucratique, cette nouvelle conscience qui ne voit dans le monde que moyens et machines ont forgé les barreaux de sa cage de fer.
Réédition, légèrement revue, d'un ouvrage épuisé depuis plus de dix ans, ce livre reste la seule étude comparative sur les réalisations et les échecs de la gauche française.
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Black lives matter ; un renouveau du mouvement de libération noir américain
Taylor Keeanga-Yamahtta
- Agone
- Contre-Feux
- 19 Septembre 2017
- 9782748903171
« Tout mouvement a besoin d'une étincelle, d'un événement que les gens percevront comme le symbole de leurs propres expériences et qui les rassemblera. Rares sont ceux qui auraient pu prévoir que le meurtre de Mike Brown par un policier blanc déclencherait une rébellion dans la petite ville de Ferguson. Peut-être était-ce l'inhumanité de la police qui laissa pourrir son corps sous le soleil d'août pendant quatre heures et demie. Peut-être était-ce l'équipement militaire - tanks, fusils mitrailleurs, réserves infinies de gaz lacrymogène - qu'elle opposa aux premières manifestations. Toujours est-il que dès le lendemain soir, la révolte éclata ; et les jours suivants, les manifestations se poursuivirent. Chaque soir, la police aspergeait la foule de gaz lacrymogène et tirait des balles en caoutchouc ; le lendemain, la foule se reformait. » Comment un mouvement contre les violences policières, qui visent avant tout les Afro- Américains, a-t-il pu émerger sous le mandat du « premier président noir », dont l'élection était censée inaugurer une période « post-raciale » ? Keeanga Yamahtta-Taylor brosse ici un portrait terrifiant de la persistance du racisme américain. Pour comprendre l'histoire du mouvement et les débats et tensions qui le traversent, elle insiste sur l'aggravation des conditions de vie des Noirs en particulier et des classes populaires en général depuis les années 1970 ; mais aussi sur la défaite des mouvements sociaux des années 1960 et l'émergence d'une élite politique noire prompte à réactiver les préjugés racistes d'une « culture de la pauvreté » attribuée aux Noirs. L'auteure défend le potentiel universaliste du mouvement #BlackLivesMatter : s'il vise d'abord les violences policières, il peut parfaitement rallier d'autres groupes sociaux à une lutte contre les élites - noires ou blanches - et pour la redistribution des richesses. Pour elle, la lutte antiraciste est tout sauf « spécifique ».
Keeanga-Yamahtta Taylor est professeure assistante dans le département d'études afroaméricaines à l'université de Princeton. Militante antiraciste, féministe et anticapitaliste, elle est spécialiste de l'histoire politique des mouvements noirs, des mouvements sociaux et des questions d'inégalités raciales aux Etats-Unis. Elle contribue régulièrement à des publications telles que Jacobin, The Guardian ou New Republic. Récompensé par de nombreux prix et plusieurs fois réimprimé depuis sa sortie, Black Lives Matter est son premier ouvrage.
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Se révolter si necessaire ; textes et discours (1952-2010)
Howard Zinn
- Agone
- Memoires Sociales
- 12 Septembre 2014
- 9782748902068
Ce n'est pas seulement qu'un président soit un politicien. Le pire est qu'il soit entouré de politiciens. Et nous, nous sommes des citoyens. Nous ne devons donc pas voir le monde à travers leurs yeux, en disant : « Bon, il faut faire des compromis, il faut faire ce choix pour des raisons politiques. » C'est la situation dans laquelle se trouvaient les abolitionnistes avant la guerre de Sécession, quand on leur disait : « Écoutez, il faut voir ça du point de vue de Lincoln. » Or Lincoln ne pensait pas que la première des priorités était d'abolir l'esclavage. Pourtant, le mouvement anti-esclavagiste en était convaincu. Alors les abolitionnistes dirent : « Nous allons exprimer notre propre position, et nous le ferons avec une telle force que Lincoln sera obligé de nous écouter. » Telle est notre histoire. Chaque fois qu'un progrès a eu lieu, c'est parce que les gens se sont comportés comme des citoyens, et non comme des politiciens. Ils ne se sont pas contentés de râler. Ils ont travaillé, ils ont agi, ils se sont organisés et se sont révoltés si nécessaire.
De la désacralisation du New Deal à l'après-11 Septembre, en passant par les premiers sit-in du mouvement noir et la défense des actions de sabotage contre la guerre du Vietnam, ce recueil de textes inédits en français rassemble un demi-siècle d'interventions.
Au sommaire :
Hommage à un historien militant. Préface de Noam Chomsky ; Un historien controversé. Avant-propos de Timothy Patrick McCarthy ; Introduction. Par Howard Zinn
Qu'est-ce que l'histoire radicale ?
Les historiens pendant la guerre froide
Archives, secret défense et intérêt public
Christophe Colomb et la civilisation occidentale
La Grève des mineurs du Colorado (1913-1914)
Trois guerres saintes
Le libéralisme agressif
Sur le patriotisme
Hiroshima
Les limites du New Deal
L'affaire Sacco et Vanzetti
Le crime de la punition
La mystique du Sud
Les Freedom Schools
Nouveaux abolitionnistes et stratégies d'action
Le marxisme et la nouvelle gauche
Témoignage au procès Ellsberg
Les marines et l'Université
L'entreprise meurtrière de Dow Chemical
Barons voleurs
Victoire en justice des saboteurs de Camden
L'action directe contre la guerre du Vietnam
La vieille manière de penser
Que faisons-nous en Irak ?
La fièvre électorale
Hommage à Kurt Vonnegut
Se révolter si nécessaire -
De son premier article, publié dans la revue politico-littéraire d'Henri Barbusse, à ses ultimes déclarations sur la signification de 1984, les textes de George Orwell ici réunis sont tous inédits en français.
Ils avaient été écartés de l'édition de ses Essais, articles et lettres choisis par sa veuve, Sonia, qui « n'appréciait pas son positionnement politique » (Bernard Crick). Ce recueil dessine l'itinéraire des engagements d'Orwell et l'évolution de ses idées : témoignages sur l'Espagne de la guerre civile, appels des années 1940-1941 à la révolution en Angleterre pour gagner la guerre contre Hitler, condamnation radicale de l'impérialisme britannique en Inde et en Birmanie, réflexions sur le socialisme et la démocratie, critique des intellectuels et de leur fascination pour le pouvoir, bilan de l'expérience travailliste d'après guerre, etc.
Il inclut des essais méconnus, qui furent des jalons importants dans l'élaboration de ses conceptions sur l'individu, l'Etat et la société, comme « Culture et démocratie », « Les socialistes peuvent-ils être heureux ? » ou « La révolte intellectuelle ». Malgré l'immense célébrité de l'écrivain Orwell, sa pensée reste largement ignorée ou incomprise en France. Il est temps qu'il y soit lu comme une figure majeure, et désormais classique, de la pensée politique du XXe siècle, au même titre qu'un Gramsci ou une Hannah Arendt.
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Grain de sable sous le capot ; résistance et contre-culture ouvrière : les chaînes de montage de peugeot
Marcel Durand
- Agone
- Memoires Sociales
- 4 Octobre 2006
- 9782748900606
Écrit par un ouvrier de Sochaux qui a passé trente ans sur la chaîne, ce livre décrit l'exploitation quotidienne du travail posté dans l'empire Peugeot, des années 1970 à l'an 2000. Le livre s'ouvre sur la description de la ville-usine Peugeot-Sochaux dans laquelle s'agite un petit groupe d'OS (ouvrier spécialisé) de l'atelier de finition-carrosserie. Nous y découvrons l'ambiance ouvrière au ras de la chaîne, « ce qu'est un OS, ce qu'il fait, ce qu'il pense ». Au récit très allant des mille et une facéties du « clan des planches de bord » succèdent la description au jour le jour des grandes grèves qui ont agité ces ateliers en 1981 et 1989. Ces dernières luttes, au cours desquelles vont s'entre-déchirer les « membres de la grande famille Peugeot », rapporteront malheureusement bien peu aux ouvriers, et beaucoup de « perturbateurs » choisiront de quitter définitivement l'usine. Pour ceux qui restent, les gestes de résistance individuelle ne dissimulent plus la sinistrose, comme leurs difficultés croissantes à ne pouvoir plus vivre qu'« ailleurs » - à l'extérieur, et encore- Car « on sort complètement vidé du boulot. Alors à quoi bon ce fric ? à quoi bon, quand tu es devenu un zombie, que tu ne peux plus jouer avec tes gosses, que tu n'arrives même plus à sourire à ta femme ? » Dans sa préface, le sociologue Michel Pialoux insiste sur la rareté et la profonde originalité de cet écrit, que l'on ne peut réduire à un simple témoignage militant dans le registre de la dénonciation. « Ce qu'il donne à entendre, c'est la voix de ce qu'on serait tenté d'appeler un "ouvrier ordinaire", c'est-à-dire ceux qui d'habitude ne sont pas entendus parce qu'ils n'ont pas de titre particulier (ni militant, ni "grande gueule", ni "martyr") ou de légitimité particulière à exhiber pour prendre la parole. »
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Oeuvres complètes Tome 2 ; à l'école du socialisme
Rosa Luxemburg
- Agone
- 18 Octobre 2012
- 9782748901580
Ce recueil de textes de Rosa Luxemburg (1871-1919), tous inédits en français, regroupe ses discours et articles polémiques sur la formation théorique au sein du mouvement ouvrier, ses recensions des oeuvres posthumes de Karl Marx éditées par Franz Mehring ou Karl Kautsky, ainsi que les manuscrits historico-économiques rédigés durant ses années d'enseignement à l'école centrale du parti social-démocrate à Berlin de 1907 à 1913 - documents qui complètent l'"Introduction à l'économie politique".
Celle que l'on cantonne trop souvent à une apologie de la spontanéité interroge : que pourrait être une « éducation révolutionnaire », pourquoi lire Marx, quel rôle assigner à la critique de l'économie politique ? -
L'or noir du Nigeria ; pillages, ravages écologiques et résistances
Xavier Montanya
- Agone
- Dossiers Noirs Agone
- 13 Septembre 2012
- 9782748901634
Dans la riche zone pétrolière du delta du Niger, Shell ou Total opèrent en dehors de tout respect des droits humains. Après cinquante ans d'exploitation sauvage et de marées noires, l'air, les sols et les cours d'eau sont empoisonnés. Les nombreuses résistances, pacifiques ou armées, des populations locales privées de leurs terres et de leurs moyens de subsistance se heurtent à une sanglante répression menée par les compagnies pétrolières et l'armée nigériane.
Le Nigeria, premier partenaire commercial de la France en Afrique subsaharienne, est un cas extrême mais exemplaire pour saisir l'ampleur du désastre engendré par l'extraction intensive des ressources naturelles dans les pays africains, et identifier ses causes, ses acteurs et ses enjeux. Pour l'écrivain nigérian Wole Soyinka « Le monde doit comprendre que le combustible qui fait fonctionner ses industries est le sang de notre peuple. ». -
La brochure de junius et autres textes sur la guerre..
Rosa Luxemburg
- Agone
- 21 Octobre 2014
- 9782748902150
Rédigée en 1915 en prison, La Crise de la social-démocratie, plus connue sous l'appellation de « Brochure de Junius », est complétée dans ce volume par les articles et discours du groupe Die Internationale (traduits pour la première fois) ainsi que les interventions de Rosa Luxemburg dans le cadre de l'Internationale socialiste. L'ensemble constitue un réquisitoire implacable contre la guerre et l'abandon du terrain de classe par la IIe Internationale. C'est aussi une exhortation lucide adressée au prolétariat à prendre toute la mesure de cette bifurcation historique que représente août 1914. Notre présent reste prisonnier de l'alternative posée depuis lors : révolution socialiste ou enfoncement dans la barbarie.
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Jean-Marc Rouillan confesse ses regrets, sans mettre son passé aux oubliettes, ni verser dans le confort bourgeois de la contrition.
- 1 - Je regrette qu'on puisse me croire sans regrets. De quoi serait fait un homme ne connaissant jamais la mélancolie de ce sentiment ? L'étiquette me colle à la peau.
- 5 - Je regrette chaque jour de prison. Moi qui, pour notre cause, ai passé plus d'un quart de siècle derrière les murs. Bientôt vingt-huit années... Vingt-huit fois 365 jours. Sans compter les années bissextiles ! Je vous fais grâce de tous les 29 février de ma vie derrière les barreaux.
Une année-lumière « correspondant à la distance parcourue par la lumière dans le vide en une année, soit env. 9,461.1015 mètres, ou 0,307 parsec ». Mais comment établir scientifiquement la teneur de l'année-carcérale ?
- 7 - Je regrette de ne pas avoir saisi - à chaque instant - le fil du temps à sa juste valeur passagère.
- 13 - Je regrette de ne pas avoir marché vers mon destin avec plus de rigueur et de vigueur. Il me semble pourtant que je n'ai pas traîné en chemin. Incendiaire à seize ans. Braqueur et prisonnier à dix-sept. Recherché dans deux pays à dix-huit. Condamné à mort par des militaires à vingt-deux. Gracié, amnistié et libéré à vingt-quatre... J'ai vécu sur la crête des vagues de temps passionnés. Le regard aiguisé par les rêves. Le coeur empoisonné de justice. Les mains armées d'une conscience aveuglante.
- 194 - Je regrette d'avoir dû rappeler ces principes élémentaires à tous ceux qui traquent mon repentir pour conforter l'histoire officielle, politique et judiciaire.
Série d'aveux indéniables et de souvenirs carcéraux, politiques, amoureux, militants, littéraires, cinématographiques, révolutionnaires et enfantins enfin délivrée avec une bonne foi irréprochable par cet ancien membre du groupe Action directe, qui joue avec ce que ses juges attendent de lui. Écrits au printemps 2010 (sur le modèle du Je me souviens de Pérec), alors qu'il venait de passer à Marseille sa première année en semiliberté de vingt ans, ce texte a été revu pour son édition.
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Les intellectuels contre la gauche ; l'idéologie aintitotalitaire en France (1968-1981) (2e édition)
Michael s. Christofferson
- Agone
- Elements
- 15 Janvier 2014
- 9782748902020
Au cours de la seconde moitié des années 1970, une vigoureuse offensive contre le « totalitarisme de gauche » ébranla la vie politique française. Dans leurs livres et leurs articles polémiques, dans les journaux et à la télévision, les intellectuels antitotalitaires dénoncèrent bruyamment, sur un ton dramatique, la filiation entre les conceptions marxistes et révolutionnaires et le totalitarisme. Issus eux-mêmes de la gauche et ne craignant qu'une faible opposition de sa part, les antitotalitaires marginalisèrent bientôt la pensée marxiste et réussirent à saper la légitimité de la tradition révolutionnaire française. Ils ouvrirent ainsi la voie aux solutions politiques postmodernes, libérales et républicaines modérées des années 1980 et 1990. Capitale de la gauche européenne, et à bien des égards mondiale, après 1945, Paris devint la « capitale de la réaction européenne ».
Déconstruction de la notion d'« antitotalitarisme », tel qu'elle fut intellectuellement et politiquement exploitée en France, ce livre revient sur les usages de ce concept après la Seconde Guerre mondiale puis sur la manière dont, dans la deuxième moitié des années 1970, il fut instrumentalisé pour marginaliser le Parti communiste français en particulier et le marxisme et la stratégie politique révolutionnaire en général.
L'auteur montre comment la « rupture » de la gauche française associée à la réception de L'Archipel du Goulag d'Alexandre Soljenitsyne en 1974 ne fut que le point culminant d'une dynamique qui permit l'intégration d'intellectuels radicaux (universitaires mais aussi écrivains et gens de presse) à la stratégie de prise du PS par les urnes. L'usage de l'« antitotalitarisme » doit donc bien moins à la (re)découverte d'une tradition libérale à l'anglosaxonne dont manquerait la culture politique française qu'à la droitisation de la gauche intellectuelle et politique française dans la seconde moitié du XXe siècle.
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Un pompier pyromane ; l'ingérence française en Côte d'Ivoire, d'Houphouët-Boigny à Ouattara
Raphaël Granvaud, David Mauger
- Agone
- Dossiers Noirs Agone
- 21 Août 2018
- 9782748903706
Tout l'arsenal de la Françafrique s'est déployé en Côte d'Ivoire : diplomatie parallèle, réseaux officieux, affaires troubles, coups tordus et crimes de guerre.
Dans la nuit du 6 au 7 novembre, plusieurs dizaines de milliers de manifestants descendent dans les rues à l'appel de Charles Blé Goudé, leader des « jeunes patriotes », et se dirigent vers l'aéroport et la base militaire française.
Pour « casser la manifestation », selon les termes du général Poncet, les manifestants sont pris pour cibles par les hélicoptères de combat de l'armée française. Les Ivoiriens qui réussissent à passer les ponts se heurtent aux barrages et aux chars des soldats français, qui tirent à balles réelles et à la grenade offensive.
Le lendemain, le chiffre de plus de trente morts et d'une centaine de blessés par l'armée française est avancé par un membre du Front populaire ivoirien et aussitôt récusé par l'étatmajor français, qui ne reconnaît que « des tirs d'intimidation ». Le soir, le général Bentégeat reconnaît qu'ils ont « peut-être blessé ou même tué quelques personnes », mais il ne parle que de « pillards » et se déclare « très fier de la réaction qu'a eu le détachement Licorne. Ils ont montré qu'on ne tue pas impunément les soldats français ». La suite des événements confirmera qu'on peut en revanche tuer impunément des civils ivoiriens.
Derrière une neutralité affichée, la France n'a cessé d'intervenir dans la vie politique ivoirienne, défendant âprement ses intérêts économiques et son influence régionale. Elle a arbitré la guerre de succession ouverte par la mort du président Houphouët-Boigny, poussant les candidats les plus proches de la France pour pouvoir maintenir la Côte d'Ivoire à la place qu'elle occupe depuis l'indépendance de 1960, à savoir u n des pivots de la Françafrique - cette forme spécifique du néocolonialisme français.
Sous prétexte d'éviter un « nouveau Rwanda », la France est aussi intervenue militairement en Côte d'Ivoire, jouant le rôle de force « impartiale » aux côtés de l'ONU.
C'est d'ailleurs dans le cadre de l'opération Licorne - censée illustrer l'exemplarité des nouvelles modalités d'intervention de l'armée française en Afrique - que les militaires français ont ouvert le feu sur des foules de civils ivoiriens désarmés, en novembre 2004, sur fond de manipulations qui laissent suspecter une tentative avortée de coup d'État.
La France n'a jamais été ni un arbitre neutre ni un acteur désintéressé dans la crise ivoirienne ; ce livre participe à documenter son rôle, qui reste aujourd'hui encore insuffisamment critiqué et débattu.
Raphaël Granvaud et Gérard Mauger sont tous deux membres de l'association Survie, et rédacteurs de Billets d'Afrique, bulletin mensuel d'information alternative sur les avatars de la politique africaine de la France. Raphaël Granvaud est par ailleurs l'auteur de deux autres livres chez Agone : Areva en Afrique. Une