Raisons D'Agir
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Depuis les années 60, insensiblement et comme par imprégnation lente, la langue de la politique, la langue publique c'est-à-dire médiatique se modifie. Elle est devenue, au cours des années 90 l'idiome qui explicite et qui légitime le néolibéralisme. De modernité à social en passant par performant, réforme, crise, croissance ou diversité, Eric Hazan montre la transformation, «l'essorage» dit-il, d'expressions isolées, de tournures, de formes syntaxiques qui sont peu à peu vidés de leur sens, c'est-à-dire de leur force subversive ou politique. Cette langue a une dynamique propre, elle est performative : plus elle est parlée, et plus ce qu'elle défend - sans jamais l'exprimer clairement - a lieu. « Il s'agit de faire le tableau, écrivait Marx, d'une sombre oppression que toutes les sphères sociales exercent les unes sur les autres, d'une maussaderie générale mais inerte, d'une étroitesse d'esprit faite d'acceptation et de méconnaissance, le tout encadré par un système de gouvernement qui, vivant de la conservation de toutes les vilenies, n'est lui-même que la vilenie au gouvernement. »
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à l'extrême droite de l'hémicycle : le Rassemblement national au coeur de la démocratie européenne, comment le RN profite de l'Europe
Estelle Delaine
- Raisons D'Agir
- Cours Et Travaux
- 17 Novembre 2023
- 9791097084356
Ce livre déplace le regard sur l'extrême droite. Alors que la plupart des travaux s'attachent à son ancrage local et à ses électeurs, l'enquête minutieuse menée par Estelle Delaine au Parlement européen montre au contraire l'arrimage élitaire et international de l'extrême droite française. Elle analyse la façon dont les extrêmes droites, tout en affichant un anti-européisme très idéologique, ont su profiter des ressources et des réseaux du Parlement européen où elles ont été élues.
Elle mobilise une longue enquête, des entretiens approfondis et une connaissance fine des réseaux d'élus, pour monter qu'au Parlement européen, les cadres d'extrême droite sont en mesure de bénéficier des ressources que leur offre l'institution, et d'assurer l'insertion de leur parti dans le jeu démocratique. En donnant à voir comment les militants «?se fondent dans le décor?», elle montre la façon dont les dispositifs politiques peuvent se trouver détournés vers des usages qui n'avaient pas été imaginés par l'institution, ce qui contribue sans doute à ancrer le RN dans une forme de «?respectabilité?».
Le Parlement européen devient un lieu d'observation privilégié pour saisir l'historicité d'une normalisation institutionnelle des extrêmes droites. Autant le livre s'appuie sur une enquête située, précise, à propos de terrains particulièrement difficiles d'accès et réticents si ce n'est hostiles à l'égard des sciences sociales, autant l'enjeu est d'une large portée et concerne des phénomènes qui dépassent le cadre français?: c'est la première étude de sociologie politique. Il permet de comprendre la menace collective que constitue la présence paradoxale d'un extrémisme anti-démocratique de droite au sein même des institutions démocratiques.
Cet ouvrage fait le portrait de militants d'extrême-droite en col blanc et il documente la facette élitaire de l'arrimage nationaliste. L'enquête peut aussi être appropriée par des professionnel·les de l'information, de l'enseignement, ou des citoyen·nes désireux de mieux connaître ces phénomènes. Il donne à voir, à travers la restitution de nombreuses scènes de la vie ordinaire du Parlement (que l'on ne trouve généralement pas dans les ouvrages de science politique sur le FN/RN), les pratiques, les représentations et les carrières de membres d'équipes parlementaires frontistes, pour déconstruire le paradoxe de la présence d'un extrémisme de droite au sein même d'une institution démocratique. -
L'illusion du bloc bourgeois : alliances sociales et avenir du modèle français
Bruno Amable, Stefano Palombarini
- Raisons D'Agir
- 20 Septembre 2018
- 9782912107978
La crise politique française entre dans sa phase la plus aiguë depuis plus de trente ans, avec l'éclatement des blocs sociaux traditionnels, de gauche et de droite. L'éloignement des partis «?de gouvernement?» des classes populaires semble inexorable?; il laisse sur la touche, d'un côté, artisans, commerçants et petits entrepreneurs déçus par la timidité des réformes de la droite libérale et, de l'autre, ouvriers et employés hostiles à une unification de l'Europe des marchés à laquelle le parti socialiste reste attaché. La présidence Hollande est de ce point de vue moins une anomalie que l'échec définitif des tentatives de concilier la base sociale de la gauche et la «?modernisation?» du «?modèle français?». Ce projet se prolonge désormais par la tentative d'édifier un «?bloc bourgeois?» fondé sur la poursuite des «?réformes structurelles?», destinées à dépasser le clivage droite/gauche par une nouvelle alliance entre classes moyennes et supérieures.
L'émergence, en réaction, d'un pôle «?souverainiste?», coexiste avec les tentatives de reconstruire les alliances de droite et gauche dans un paysage politique fragmenté. L'avenir du «?modèle français?» dépend de l'issue d'une crise politique qui n'est donc pas liée à des querelles d'appareils et encore moins de personnes, mais à la difficulté de former un nouveau bloc dominant. Elle est loin d'être terminée.
Nouvelle édition actualisée et augmentée.
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En luttes ! les possibles d'un syndicalisme de contestation
Sophie Béroud, Martin Thibault
- Raisons D'Agir
- 4 Mars 2021
- 9791097084127
L'Union Syndicale Solidaires représente une tentative pour retrouver un syndicalisme de contestation, contre les stratégies de cogestion prônées par le patronat et les gouvernements en place et le choix de la négociation adoptés par d'autres centrales syndicales. Depuis les années 1990, elle a tenté d'insuffler d'autres pratiques syndicales, moins bureaucratiques et plus branchées sur les luttes interprofessionnelles. Mais la spécificité de Solidaires se manifeste aussi dans la trajectoire de ses militants, dont certains ont tenté de reconvertir la dynamique du syndicalisme autogestionnaire dans la défense des salariés fragilisés et précarisés par la dérégulation croissante du marché du travail. Ce livre s'attache aux difficultés rencontrées par une telle rénovation du syndicalisme, mais il trace aussi des pistes de réflexion sur les conditions d'un rapprochement entre causes syndicales et luttes sociales.
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Docteur en sociologie, Laurent Denave a interrompu ses recherches en novembre 2018 pour se consacrer entièrement au mouvement des Gilets jaunes. Cet ouvrage est le fruit deux années d'expérience et de réflexions sur cette lutte politique. L'auteur souhaiterait mettre à disposition des militants engagés dans ce mouvement (toujours en cours, même s'il est moins visible), ou engagés d'une manière ou d'une autre dans la guerre des classes, des outils d'analyse et de compréhension produits par les sciences sociales critiques. Eclairer ou clarifier certains problèmes rencontrés sur le terrain pourrait sans doute contribuer à les résoudre.
Il s'agit de donner des pistes de réflexion pour tenter de répondre à certaines questions déterminantes pour l'avenir de ce mouvement de contestation inédit : Quelles actions sont les plus efficaces dans ce combat ? Sur quelles bases peut-on construire des alliances et avec qui ? Comment se positionner par rapport à la question centrale de la violence ? Comment résister à la répression et tenir sur la durée ? Comment structurer le mouvement afin de mettre nos pratiques en accord avec les principes que l'on défend (égalité, liberté et solidarité) ?
Cet ouvrage s'adresse également à celles et ceux qui soutiennent la lutte sans y participer directement et qui aimeraient en avoir une meilleure compréhension. Il entend déconstruire (et donc délégitimer) certaines représentations négatives, portées par les médias et leurs intellectuels de service sur la diversité des protagonistes de cette lutte, ce qui peut avoir des conséquences sur la manière dont ils sont considérés, traités et criminalisés, par la police ou la justice. Il donne à voir, derrière les mobilisations des Gilets jaunes, la véritable guerre des classes que les classes populaires livrent en réalité contre le libéralisme autoritaire en marche.
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L'immigration ou les paradoxes de l'altérité Tome 1 ; l'illusion du provisoire
Abdelmalek Sayad
- Raisons D'Agir
- 2 Février 2006
- 9782912107275
Trente années d'enquêtes réalisées par le sociologue Abdelmalek Sayad (1933-1998) ont renouvelé l'étude du phénomène migratoire : à l'immigration dans une société correspond toujours une émigration hors d'une autre société. L'une ne peut s'expliquer sans l'autre. Ce premier volume de l'immigration ou les paradoxes de l'altérité montre que la présence d'étrangers dans un espace national est toujours pensée comme provisoire, alors même que la réalité dément cette représentation. La dimension économique de la condition de l'immigré détermine tous les autres aspects de son statut : le travail fait " naître " l'immigré mais rend sa présence illégitime quand l'emploi vient à manquer. L'illusion du provisoire se prolonge dans le logement, avec ces foyers qui assignent durablement leurs résidants à un habitat temporaire, Elle se perpétue en fin dans l'idée du retour, qui entretient l'espoir que l'exil n'a qu'un temps.
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En marche forcée ; une chronique de la libéralisation des transports : SNCF, cars Macron et quelques autres
Laurent Kestel
- Raisons D'Agir
- 6 Septembre 2018
- 9782912107985
Les transports, parents pauvres des discours et des programmes politiques, auront rarement autant été sur le devant de la scène publique qu'en cette année 2018. Leur libéralisation, inscrite dès les textes fondateurs de l'Union européenne et depuis lors patiemment orchestrée en France dans l'ensemble des secteurs d'activité, prend aujourd'hui une intensité particulière avec les annonces du gouvernement sur l'ouverture programmée à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs.
Un profond bouleversement est donc engagé « en marche forcée » dans l'un des derniers bastions du service public à la française. Il faudrait « réformer » la SNCR, au nom d'une supposée « amélioration de la qualité de service » pour l'usager que la concurrence serait supposée apporter. Ce mantra répété à l'envi dans les médias participe de l'économie du « nouveau monde » que le président de la République s'attache à incarner en faveur de la « mobilité du futur » - le futur de « ceux qui réussissent » contre celui de « ceux qui ne sont rien » ?
Mais que se joue-t-il réellement derrière ce vocable aseptisé propre à convaincre tout un chacun ? Que révèle-t-il des dernières transformations du capitalisme et que porte-t-il comme conséquences pour notre modèle de société ? Défendre le service public du rail ne revient-il pas encore, comme l'affirmait Pierre Bourdieu en 1995, défendre une civilisation construite autour des droits sociaux et des valeurs d'égalité ?
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Du balai ; essai sur le ménage à domicile et le retour de la domesticité
François-xavier Devetter, Sandrine Rousseau
- Raisons D'Agir
- Raisons D'agir
- 17 Février 2011
- 9782912107589
Faire le ménage est une activité particulièrement commune : l'entretien du domicile apparaît comme une nécessité naturelle, répétitive, routinière, d'ordre privé. Ce n'est apparemment pas une question politique et économique. Pourtant, le ménage est au centre de nombreux rapports de force et de pouvoir. La question du partage des tâches entre hommes et femmes est évidemment la première qui vient à l'esprit : les femmes plus souvent que les hommes se chargent de ces tâches peu valorisées. Mais là n'est pas le seul enjeu, à la division du travail au sein de la famille se superpose une division du travail extra-familiale, par le biais de l'externalisation, autrement dit, du recours à une femme de ménage. Ainsi d'intime cette question apparemment banale prend des aspects plus larges, interférant avec de nombreuses questions sociales et politiques fondamentales comme " qui occupe ces emplois ? ", " quelle valeur accorder à ces activités ? " ou encore " sous quelles modalités déléguer ou non certaines tâches ? ". La réponse à ces questions loin d'être anodine, est au contraire au centre d'enjeux politiques, économiques et éthiques.
L'externalisation repose sur l'idée suivante : puisque les hommes rechignent à prendre leur part de tâches domestiques, l'égalité au sein du couple peut être en partie retrouvée ou contournée grâce au recours à une tierce personne dont la tâche est de décharger les femmes d'une partie de ce qui crée de l'inégalité au sein du couple. Cette solution non seulement semble résoudre en grande partie la question des rapports de genre mais elle s'inscrit également dans le cadre des politiques de l'emploi et constitue un véritable " gisement d'emplois " pour les salarié(e)s les moins qualifié(e)s et les services rendus facilitent la vie des femmes actives. Cet aspect justifie les nombreuses mesures d'incitation au recours aux services d'une femme de ménage par les particuliers. Le " plan Borloo " en est le dernier exemple.
Enfin, les caractéristiques du marché du travail domestique font que la question de l'entretien du domicile est également au coeur des politiques d'immigration. En effet, une part très importante des employées de maison sont étrangères ou d'origine étrangère (presque la moitié selon l'enquête emploi qui minore très largement la population étrangère en ne mesurant que très imparfaitement le travail informel encore élevé dans le secteur).
La question du ménage et de son organisation sous-tend ainsi plusieurs débats fondamentaux. Pourtant ce thème est assez peu traité en France, notamment en comparaison avec les pays anglo-saxons. Partant d'un objet apparemment marginal, il aboutit à des questions qui touchent à des aspects essentiels du fonctionnement de l'égalité et de la démocratie en France aujourd'hui.
François-Xavier Devetter et Sandrine Rousseau sont Maîtres de Conférence en Sciences économiques à l'Université de Lille 1 - Telecom Lille I, membre du CLERSE - CNRS (UMR 8019).
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La question climatique ; genèse et dépolitisation d'un problème public
Jean-Baptiste Comby
- Raisons D'Agir
- Cours Et Travaux
- 8 Octobre 2015
- 9782912107817
Avec la montée en puissance de la thématique climatique dans les médias généralistes français à partir du début des années 2000, les détracteurs de la « pensée unique » ont pu espérer que les enjeux environnementaux globaux permettraient de colorer le débat public. Alors qu'à l'aube du XXIe siècle les « altermondialistes » donnent de la voix et les commentateurs patentés se gargarisent de l'émergence d'une « société civile » censée limiter l'hégémonie des logiques marchandes, l'accentuation des problèmes écologiques viendrait signaler l'urgence de reconsidérer l'emprise du capitalisme sur l'organisation des sociétés.
Or ce n'est pas une diversification de l'idéologie dominante que révèle la médiatisation accrue de la question climatique mais bien les processus au gré desquels les définitions conformistes des problèmes deviennent les plus récurrentes et les plus accessibles dans les espaces du débat public. Pour attirer l'attention des journalistes sur les changements climatiques, les entrepreneurs de cette cause doivent en livrer une version consensuelle afin de se plier aux verdicts du « plus grand nombre ».
L'analyse sociologique de la configuration formée par ces agents permet de comprendre pourquoi ils s'adonnent sans coup férir à ces génuflexions. C'est notamment parce qu'ils ont intériorisé les conceptions indissociablement psychologisantes et marchandes du « bon » reportage comme de la « bonne » campagne de communication qu'ils reprennent en choeur une mélodie climatique s'apparentant à une moralisation des individus sans référence aux logiques économiques et politiques contribuant à la catastrophe écologique en cours.
Or c'est précisément parce que les discours « éco-citoyens » occultent le coût environnemental élevé des styles de vie des classes supérieures et moyennes que ces dernières peuvent régulièrement faire leur profession de foi écologique sans avoir à interroger leurs aspirations consuméristes. En d'autres termes et à rebours des prophéties sur les progrès de la réflexivité au sein des sociétés dites « post-modernes », progrès dont on pouvait attendre qu'ils favorisent si ce n'est la remise en cause du moins le questionnement du cours marchand des choses, c'est plutôt l'adhésion à une organisation sociale tournée vers l'accroissement généralisé mais fortement inégalitaire des capitaux qui est donnée à voir.
Précis et argumenté, cet ouvrage donne une lecture sans concession de l'impuissance des politiques environnementales en France.
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Métier : député ; enquête sur la professionnalisation de la politique en france
Julien Boelaert, Sébastien Michon, Etienne Ollion
- Raisons D'Agir
- 13 Avril 2017
- 9782912107893
De Nuit debout au Tea Party étatsunien, de Donald Trump à Emmanuel Macron, la dénonciation de l'establishment est devenue un thème récurrent de la politique contemporaine. À droite comme à gauche, aux marges comme au centre, la critique d'un « système » qui monopoliserait le pouvoir est omniprésente.
À partir d'une enquête originale menée à l'Assemblée nationale, ce livre dresse un tableau inédit de la politique française. Celle-ci est profondément marquée par le phénomène de professionnalisation des élus, toujours plus nombreux à avoir été des salariés de la politique, depuis leur plus jeune âge et au point d'y réaliser toute leur carrière. Il faut désormais avoir passé un temps bien plus long - deux fois plus comparé aux années 1970 -, avant de pouvoir espérer parvenir aux responsabilités nationales. Constat sans appel de ces transformations, ce livre met en lumière leurs conséquences sur la politique contemporaine comme sur la démocratie.
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Un digne héritier ; Blair et le thatchérisme
Keith Dixon
- Raisons D'Agir
- 7 Janvier 2000
- 9782912107091
Sous couvert de « modernisation » le parti travailliste britannique s'est transformé progressivement à partir du milieu des années 1980 en incorporant dans ses analyses et ses propositions l'essentiel de l'héritage thatchérien. Ce processus s'est accéléré avec l'arrivée à la tête du parti, en 1994, de Tony Blair, qui, dans sa pratique gouvernementale comme dans ses tentatives de théorisation, représente la pensée de marché au sein de la gauche européenne. Loin d'aller dans le sens d'une rénovation, le triomphe des thèses néo-travaillistes conduirait inéluctablement à une rupture avec l'ensemble des traditions socialistes et à l'acceptation des inégalités sociales, de la précarisation des salariés et du régime sans partage des marchés financiers comme autant de nécessités historiques de l'ère de la « mondialisation ».
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Déclaration ; ceci n'est pas un manifeste
Antonio Negri, Michael Hardt
- Raisons D'Agir
- 17 Mai 2013
- 9782912107725
Ce livre n'est pas un manifeste. Les manifestes entendent faire advenir un autre monde en endossant le rôle du prophète qui crée un peuple à son image. Les mouvements de protestation contemporains, dont Occupy Wall Street ou les Indignés constituent la dernière expression, ont renversé cet ordre, rendant les manifestes et les prophètes obsolètes. Ils sont descendus dans la rue et, au lieu de suivre les puissants sur leurs lieux de réunions officielles ou officieuses, ils ont occupé les places et les espaces publics : ils n'entendent pas tant constituer une menace face aux puissants qu'une force de proposition. Plus important encore, ces multitudes mobilisées, à travers leurs discours comme leurs pratiques, leurs slogans et leurs désirs, ont engendré de nouveaux principes politiques : comment leurs déclarations peuvent-elles devenir les principes d'organisation d'une nouvelle société ? Comment peuvent-elles réinventer des relations sociales susceptibles de ruiner les rapports d'exploitation de l'ancien monde ? Comment ces déclarations de révolte peuvent-elles devenir un pouvoir véritablement constituant ?
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Cet essai de critique sociologique analyse les impasses des tentatives pour « refonder la gauche ». Le rejet de la politique institutionnelle pousse en effet une grande partie des militants anticapitalistes à se replier sur des formes culturelles et communautaires de contestation, et à s'éloigner des milieux populaires comme des enjeux électoraux. Ce rejet de la politique « traditionnelle », en particulier des partis et des syndicats, s'accompagne d'une véritable incapacité à penser une contradiction fondamentale : s'il faut dénoncer le démontage néolibéral des droits sociaux et des services publics, il est en même temps très difficile de prôner le retour à un Etat dont on sait qu'il exerçait des fonctions de domination tout à fait essentielles au système capitalisme, qu'il s'agisse de la reproduction des inégalités mise en évidence par Pierre Bourdieu ou de la domestication des dominés étudiée par Max Weber. Le livre s'attache donc à penser les conditions d'une politique d'émancipation, qui se situe non seulement sur le terrain des « idées », mais qui prenne surtout en compte les conditions sociales d'accès à la politisation des fractions les plus défavorisées - et les plus ordinaires - de la population, celles-là même qui, sous le nom de « peuple », ne sont bien souvent invoquées que comme des cautions sans lendemain.
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"nous serons des millions". evo morales et la gauche au pouvoir en bolivie.
Do Alto/Stefanoni
- Raisons D'Agir
- 20 Mars 2008
- 9782912107398
Avant d'être exécuté pour avoir mené l'insurrection indienne de 1780-1781 dans le haut pérou, dont la future bolivie est une des composantes, tupac katari annonce : " je reviendrai et nous serons des millions.
". plus de deux siècles plus tard, en décembre 2005, le peuple bolivien élit evo morales à la présidence de la république. le candidat du mouvement vers le socialisme (mas° devient le premier dirigeant indigène d'un pays où les fractures ethniques redoublent les divisions de classe. son programme, qui ambitionne de rompre simultanément avec l'héritage colonial et le néolibéralisme, traduit sur le plan électoral les conquêtes des mouvements sociaux.
La mobilisation contre les multinationales de l'eau en avril 2000, puis la " guerre du gaz " de 2003 en faveur de la nationalisation des hydrocarbures, sont les épisodes les plus marquants d'une résistance multiforme, qui a fait converger organisations rurales et syndicats urbains, processus identitaires et revendications économiques, nationalisme révolutionnaire et indianisme. convaincus qu'on ne change pas le monde sans prendre le pouvoir, paysans et ouvriers métis et indigènes, ont transformé leur attelage hétéroclite en une force politique capable de diriger le pays.
Faut-il pour autant y voir le modèle d'une recomposition de la gauche ?
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Des syndicats domestiqués ; répression patronale et résistance syndicale aux Etats-Unis
Rick Fantasia, Kim Voss
- Raisons D'Agir
- 15 Janvier 2003
- 9782912107169
Le " modèle " économique américain tant vanté en europe est une illusion d'optique, entretenue à la fois par la presse et les milieux d'affaires.
L'exception américaine, loin d'être le produit d'un système économique miraculeux, est en fait la conséquence de la destruction programmée de toute forme d'organisation et de protection du travail la culture politique et te droit américains ont peu à peu démantelé les mouvements syndicaux de contestation sociale. voyage dans l'amérique oubliée des travailleurs ordinaires ceux qui louent des garages pour survivre à silicon valley, ceux qui, coincés dans des box minuscules, emballent les livres pour amazon.
Com, ceux qui doivent cumuler deux ou trois emplois sous-payés pour se maintenir juste au-dessus du seuil de pauvreté. la fameuse " exception américaine " repose en réalité sur l'exceptionnelle toute-puissance des dirigeants d'entreprises, c'est-à-dire sur l'extraordinaire faiblesse organisée des syndicats américains. pourtant, ce travail, mené par deux sociologues américains, n'annonce pas la fin du mouvement syndical aux etats-unis.
Il fait apparaître au contraire l'émergence d'un syndicalisme d'action et de contestation sociale, assumant sa dimension politique et sa volonté de lutter pour imposer une plus grande justice sociale.
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Quelque chose de pourri au royaume-uni ; libéralisme et terrorisme
Tariq Ali
- Raisons D'Agir
- 7 Décembre 2006
- 9782912107329
"Charivari" est un terme en général usité en Angleterre depuis la fin du XVIIe siècle pour désigner un tohu-bohu assez grossier, avec ou sans rituel plus élaboré, exprimant en général de la moquerie ou de l'hostilité contre des individus ayant violé certaines normes publiques. Il s'applique donc particulièrement bien à ce livre, paru en anglais en 2005, sous le titre Rough Music. Il a en effet été écrit en réponse a la crise politique britannique qui a suivi guerre d'Irak et les attentats a la bombe qui ont eu lieu à Londres le 7 juillet 2005. Dans ce livre polémique, écrit sous l'empire de la colère pendant l'été 2005, Tariq Ali décrit Tony Blair comme le Dorian Gray de la politique
britannique et révèle la dynamique d'une politique conduite à partir de la seule logique médiatique. Le style est dynamique, la critique sans concessions: "Un système électoral non représentatif, non réformé ; une politique étrangère dont la loyauté à l'égard de Washington n'est comparable, selon l'expression mémorable du romancier John Lanchester, « qu'au cran de sécurité coïtal qui rend impossible de séparer des chiens quand ils ont un rapport sexuel » ; le droit d'être jugé par un jury et la présomption d'innocence fortement attaqués ; un programme social autoritaire ; des médias conformistes, utilisés sans vergogne comme outil de propagande au service du nouvel ordre - voilà les principales caractéristiques de la scène britannique aujourd'hui. Ajoutons
l'homogénéisation généralisée de la culture nationale, la direction de la BBC singeant ses concurrents privés ; la mort virtuelle du cinéma national[; un théâtre qui s'embourgeoise toujours plus, dans lequel les frontières entre le boulevard et le théâtre subventionné deviennent floues ; l'édition britannique convertie au réalisme du marché par les conglomérats globaux ; la marginalisation de toute pensée qui ne produit pas des profits rapides et la mainmise sur les universités du dogme de la gestion par l'évaluation, aux termes duquel les universitaires sont encouragés à considérer les étudiants qui lisent leurs livres comme des « clients ». La vie politique en Grande-Bretagne ressemble de plus en plus à celle d'une monarchie bananière". Mais au delà de la violence verbale de l'auteur contre le premier ministre britannique, le livre déconstruit minutieusement les mécanismes qui conduisent une gauche libérale à soutenir non seulement une politique internationale marquée par l'expansionnisme américain, mais aussi les dérives d'un système représentatif où le seul impératif de rester au pouvoir l'emporte sur les exigences démocratiques élémentaires. Au moment où ce qu'on appelle "l'Europe" cherche à relancer sa dynamique, il n'est pas inutile de tirer les leçons du "modèle britannique".
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Recherche précarisée, recherche atomisée ; production et transmission des savoirs à l'heure de la précarisation
Collectif
- Raisons D'Agir
- 14 Avril 2011
- 9782912107596
La précarisation de l'enseignement supérieur et de la recherche publics est une réalité peu connue, et pour partie rendue invisible, dans un univers que l'on imaginerait comme protégé : elle affecte pourtant de plus en plus le travail et les travailleur·e·s de ce secteur dans leur ensemble. Fondé sur une enquête conduite en 2009 ainsi que sur des travaux et rapports variés, cet ouvrage livre un diagnostic lucide sur les mécanismes de cette précarisation, qui apparaît comme un élément d'une déstructuration plus globale, organisée et méthodique : mise en concurrence généralisée, et particulièrement forte au moment de l'entrée dans la carrière, au nom de l'efficacité ; remise en cause des statuts et des règles définissant les conditions de formation et construction d'une relation de travail durable au nom de la flexibilité ; pilotage de la recherche par projets et financements sur contrats courts, au nom de la nécessité de répondre à la demande sociale du moment.
A travers le cas exemplaire du monde de l'enseignement supérieur et de la recherche, ce livre dévoile donc les effets d'une politique qui consiste à constituer la précarité en norme de fonctionnement choisie : la dégradation des conditions de travail poussée jusqu'aux limites de l'exploitation illégales, la destruction des collectifs et des conditions de la collaboration entre individus ou entre entités institutionnelles de recherche, l'abandon des projets et des investissements de long terme. Tout cela au bénéfice, finalement, des structures privées...
Loin de s'en tenir à un simple diagnostic, ce livre propose un certain nombre de directions pour mener une autre politique. Il s'adresse ainsi aussi bien à tous ceux qui sont liés à l'enseignement supérieur et à la recherche, aux personnels, mais aussi aux postulants, et plus largement à tous les étudiants, à leurs parents, à tous ceux qui sont concernés par l'enseignement, l'innovation et le développement du savoir.
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On ne présente pas Noam Chomsky et c'est une grande chance pour les éditions Raisons d'agir que de pouvoir éditer un de ses livres. Un livre projet sur une question essentielle pour son auteur, linguiste majeur et universitaire, puisqu'il porte sur la définition même de l'université. C'est un livre qui touche en cela à des questions très débattues en France ces dernières années avec la réformes des universités qui se déroule dans le cadre du " processus de Bologne ". Questions auxquelles les éditions Raisons d'agir ont déjà consacré un livre (Le cauchemar de Humboldt) qui a marqué la communauté de l'enseignement supérieur et de la recherche. C'est enfin un livre original au sens où il reprend et regroupe des textes anciens de Noam Chomsky et un entretien récent qui montre la force et la constance du point de vue développé par l'auteur dans ces matières.
Etonnamment, les idées de Chomsky sur l'éducation en général et sur l'université en particulier, bien que fortes et originales, restent, malheureusement et très injustement, peu connues et inexplorées, surtout dans le monde francophone.
Chomsky défend une conception claire et exigeante de l'université .
On a souvent noté l'influence que la pensée de Wilhelm von Humboldt (1767-1835), notamment par son rationalisme, son libéralisme et la place qu'elle fait à l'idée de nature humaine, a exercé sur la pensée de Chomsky. C'est tout particulièrement le cas de sa réflexion sur l'éducation. C'est bien, pour l'essentiel, à la conception normative de la nature et des fonctions de l'université que ces idées commandaient déjà chez lui, que Chomsky est resté profondément attaché. Il défend à la fois une position idéaliste faisant de l'universalité et de la recherche désintéressée le but même de l'université tout en analysant avec acuité tout ce qui dans la réalité doit être surmonté pour qu'il en soit ainsi et que l'université surmonte la pression des intérêts particuliers dont elle est l'objet.
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Les primaires socialistes ; la fin du parti militant
Rémi Lefebvre
- Raisons D'Agir
- 18 Août 2011
- 9782912107626
Les socialistes ont décidé d'organiser des primaires en octobre 2011 pour désigner leur candidat à l'élection présidentielle.
La consultation n'est plus ouverte aux seuls adhérents, comme en 1995 ou en 2006, mais aux électeurs de gauche. Comment le parti d'Epinay en est-il venu à adopter une procédure qui contrevient à sa culture organisationnelle et qui dévalue le militantisme ? Comment un parti de militants historiquement hostile à la présidentialisation en vient-il à approuver une procédure qui lui accorde une place centrale ? Cet ouvrage remet en cause la vision enchantée des primaires socialistes, présentées comme une " révolution démocratique " qui donnerait un nouveau droit aux électeurs.
Les primaires consacrent de fait la personnalisation du débat public, la présidentialisation du système politique et la domination des logiques d'opinion. Elles contribuent à l'affaiblissement de la légitimité militante et idéologique d'un parti que ses dirigeants ont été incapables de " rénover " - accréditant l'idée qu'il était une forme politique dépassée. Les socialistes tournent ainsi le dos à une conception historique du parti comme lieu d'élaboration collective, d'éducation populaire et de mobilisation idéologique.